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Élections à l'UP

Bouge Ta Fac - La FAGE, le meilleur allié de LREM dans la casse de l’université ?

Élu au CA de l'Université de Paris, le syndicat Bouge Ta Fac-La Fage, fier d'être un « interlocuteur » du gouvernement, se revendique pourtant « apartisan ». À l'heure des élections étudiantes, il convient de rappeler ses liens étroits avec LREM, et sa participation active aux attaques de ces dernières années contre l’Enseignement Supérieur, de la loi ORE à la fusion de l’Université de Paris.

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Jimmy Losfeld (au fond à gauche), président de la FAGE en 2016 reçu à la table des discussions sur la Loi Travail à l’Élysée par Manuel Valls, Emmanuel Macron et Myriam El Khomri. Crédits : Thomas Samson / AFP

Les élections aux conseils centraux- conseil d’administration et conseils facultaires- de l’Université de Paris vont se dérouler du 12 au 15 avril. Les listes candidates sont peu nombreuses mais l’une d’entre elles, Bouge Ta Fac - La Fage a largement dominé les dernières élections.

Tant au niveau national qu’à l’Université de Paris, Bouge Ta Fac - La Fage s’est retrouvée au cœur des différentes attaques contre nos conditions d’étude, en accompagnant et soutenant toutes les réformes qui ont dégradé la situation des étudiants, de la loi instaurant la sélection à l’université à la fusion qui a abouti à la création de l’Université de Paris.

Un syndicat « apartisan » … très lié à La République En Marche

Si le syndicat se dit « apartisan » ou « apolitique », beaucoup d’anciens membres entretiennent un rapport privilégié avec la Macronie. Au moment de la campagne présidentielle de 2017, des fuites dans les mails internes d’En Marche révélaient la connivence entre l’équipe de Macron et la présidence de la FAGE. On y voit notamment Jean-Baptiste Mougel, ex-président du syndicat, désormais soutien de Macron, faire jouer son carnet d’adresse pour que le président de la FAGE de l’époque, Jimmy Losfeld, obtienne un rendez-vous avec Macron. Et la réponse favorable de Thierry Coulhon, le responsable LREM du volet Enseignement Supérieur, à cette demande d’entretien entre la FAGE et LREM est on ne plus éloquente : « C’est important : on s’en félicitera au moment où on aura besoin d’eux pour passer les réformes… ».

Jimmy Losfeld n’a finalement pas pu rencontrer Emmanuel Macron en personne, mais a obtenu un entretien avec ce même Thierry Coulhon de LREM. Il en a même rédigé lui-même un compte-rendu par mail à l’équipe d’En Marche, rendu public par WikiLeaks, dans lequel il assure à propos du projet de réforme de l’ESR de Macron, qu’ils ne “polémiqueront” pas pendant la présidentielle, et pourront même allumer des “contre-feux” si une opposition se faisait entendre :

Et effectivement, ce rôle que s’est donné la FAGE a été clairement mis en évidence en 2018 lors de la mobilisation contre la loi ORE, qui prévoyait la création de Parcours Sup et la mise en place de la sélection à l’université. Face à une loi prônant une logique élitiste et excluante pour les étudiants les plus précaires et issus de milieux populaires, la FAGE a soutenue dès le début le projet et s’est félicitée d’être « la seule organisation étudiante à s’être investie dans l’élaboration du Plan Etudiants puis à avoir soutenu la philosophie de la réforme du premier cycle qui en découlait. ». Quelques mois après leur échange avec le président de la FAGE, les vœux des conseillers de Macron étaient exaucés.

Soucieuse de défendre la réforme de Macron, elle a aussi usé de son influence pour nuire au mouvement étudiant, allant jusqu’à élaborer un sondage sur leur site auquel 14 000 étudiants ont répondu, demandant de noter de 1 à 5 une liste de modes d’actions et de propositions sur la loi ORE, en pleine mobilisation dans de nombreuses universités contre la réforme. Le syndicat en publie un compte-rendu dans lequel ils analysent (sans expliciter la méthode employée) que les étudiants soutiendraient majoritairement la réforme, et que 74% d’entre eux seraient opposés aux blocages, qui seraient l’expression d’une « minorité radicale, parfois violente ». Une info sans aucune fiabilité, mais qui a tout de suite été relayée par la presse et qui a contribué à opposer l’opinion publique aux étudiants et enseignants mobilisés, au profit de LREM au gouvernement.

L’entente est telle entre les deux organisations qu’il n’est pas rare de voir des élus du syndicat finir en poste en Macronie. On a déjà évoqué plus haut le cas de Jean-Baptiste Mougel, président de la FAGE pendant 3 ans, qui a fini conseiller de campagne de Macron. Mais plus récemment encore Graig Monetti, l’ex-dirigeant de l’antenne niçoise du syndicat, a pu se trouver une place au gouvernement et est devenu l’un des principaux conseillers de la Ministre de l’Enseignement Supérieur, Frédérique Vidal, avec laquelle il a activement travaillé sur la LPR, la loi qui signe la privatisation de la recherche et précarise encore plus le statut de chercheur.

Derrière l’étiquette « a-partisan » il semblerait malgré tout qu’être élu à la Fage soit une bonne passerelle pour travailler pour Macron.

Bouge Ta Fac à l’Université de Paris : cogestion et soutien à la fusion

Cette même volonté d’accompagner les attaques contre les étudiants s’est vue très clairement à l’Université de Paris, où les élus Bouge Ta Fac ont soutenu la fusion, au mépris des votes internes et en dissimulant aux étudiants les attaques qu’elle représentait tant du point de vue d’une sélection accrue que de la réduction des moyens, en témoigne ce tract de la FAGE.

En ce sens, alors que la direction de la fac voulait imposer un nouveau règlement intérieur liberticide à cette occasion, qui prévoyait entre autres, en pleine mobilisation contre la LPPR, que, pour autoriser une réunion étudiante il faudrait une autorisation de la préfecture au moins 2 mois à l’avance, les élus étudiants de la FAGE au Conseil d’Administration ont gardé l’information pour eux. Et c’est seulement parce qu’un professeur mobilisé a alerté les étudiants en assemblée générale, que l’affaire a pu être dénoncée, puis fuitée par nos militant.e.s dans un article de Révolution Permanente et repris par 20 minutes, et abandonnée par la direction.

Car, alors que les élus de Bouge Ta Fac appuient la version de la direction sur cette affaire, expliquant que ce règlement n’était qu’un brouillon et une "erreur" qu’ils auraient réglé par le haut, la réalité est toute autre. Le scandale déclenché par les articles et les rassemblements, ont contraint la direction - qui avait peur que ceci détruise son image voire pire, que ça déclenche une grande mobilisation - de réécrire en entier leur règlement intérieur liberticide.

Et désormais, des menaces de suppressions de filières causées par la fusion, et de la rentrée chaotique entraînée par les réductions de postes de personnels, quels bilans tire la FAGE ? Celui de poursuivre main dans la main avec la présidence et soutenir le projet néolibéral qu’elle défend de concert avec les différents gouvernements.

C’est ainsi qu’ils sont à l’initiative du projet d’ « universités européenne Circle U », où en duo avec la présidence ils défendent un projet profondément élitiste qui favoriserait « la qualité et l’excellence de l’enseignement et de la recherche  » et qui impliquerait « des organisations et des entreprises qui souhaitent rejoindre Circle U. en tant que partenaires associés ». En somme, Bouge Ta Fac s’inscrit comme un soutien sans faille non seulement à la fusion, mais également aux suites qui lui sont données.

Et alors que Bouge Ta Fac - La FAGE prétend défendre une université émancipatrice et non-discriminante, des déclarations racistes et islamophobes d’un élu de Bouge ta fac à l’Université de Paris ont refait surface et restent toujours sans réponse de la part du syndicat. Et tandis qu’un des élus en question se retrouve d’ailleurs à nouveau en tête des listes cette année, cette affaire se retrouve massivement censurée sur les groupes de promos où nous avons partagé les révélations, par les élus Bouge Ta Fac qui sont administrateurs de la plupart d’entre eux qui bloque les commentaires et publications qui évoquent l’affaire. Alors que le gouvernement, la droite et l’extrême-droite mènent une offensive islamophobe qui a des conséquences concrètes au sein de l’université (proposition de dissoudre les associations qui organisent des réunions en non-mixité racisée, de s’en prendre aux prières à l’université, ou encore d’en finir avec ce qu’ils nomment l’ « islamo-gauchisme » en attaquant la recherche engagée) : nous ne pouvons tolérer ces voix racistes dans nos facs.

Du 12 au 15 avril : vote Le Poing Levé

C’est en ce sens qu’avec Le Poing Levé nous défendons une liste anti-raciste et anti-impérialiste. Nous voulons lutter contre le racisme et l’islamophobie, qui existent à l’université et en dehors, et que l’impunité policière, le racisme d’État et la loi Séparatisme ne feront que renforcer.

Contre des élus qui ont marché main dans la main avec le gouvernement et la direction de la fac pour travailler à la dégradation de nos conditions de vie et d’étude, nous pensons qu’il faut construire un rapport de forces pour permettre aux étudiants, aux enseignants et aux personnels de l’Université d’en finir avec les attaques en cours et refuser de payer la crise économique des capitalistes. Ces dernières années, les gouvernements successifs s’en sont pris aux acquis de mai 68, et ils ont notamment fait entrer des représentants d’entreprises -et donc des intérêts privés- au sein de nos universités.

Avec la liste du Poing Levé, portée par des militants du NPA-Révolution Permanente et des indépendant.e.s, nous refusons la cogestion et nous nous présentons dans ces conseils sans aucune illusion : ce sont des institutions anti-démocratiques, dans lesquelles nous ne pouvons avoir aucune confiance. Tout est verrouillé pour que ne s’y exprime que ce qui s’accorde à la gestion de la misère : le reste est proscrit d’avance ou sera porté et cassé devant les tribunaux plus tard, à l’image des juges qui se sont positionnés contre le vote du CA à la Sorbonne pour le 10 améliorable face à la pandémie.

Nous nous présentons pour porter un programme d’urgence face à la situation sanitaire, économique et psychologique déplorable, mais également pour porter une voix anti-capitaliste, anti-raciste, féministe et lutte de classe dans une université élitiste.

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