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Black Lives Matter

Brésil : des manifestants prennent la rue contre les violences racistes et Bolsonaro

Ce dimanche, au Brésil, l’épicentre actuel de la pandémie, des milliers des manifestants sont descendus dans la rue du pays, contre le racisme et le gouvernement convergeant pour dire stop à la mort de la population noire tant par les crimes policiers, que par le covid-19 et la crise économique.

Tatiana Lima

11 juin 2020

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Crédits : Tais Aquino

En plus de la gestion désastreuse de la crise sanitaire par Bolsonaro, la crise politique – avec l’exécutif, l’aile militaire, la justice et le législatif qui se disputent le pouvoir de dicter la politique nationale – s’approfondit au Brésil. Les tensions entre Bolsonaro et la justice sont de plus en plus importantes à mesure que s’ouvre des enquêtes qui peuvent déstabiliser le pouvoir en place. Il fait d’ores et déjà déjà l’objet de plusieurs demandes « d’impeachment » venant de partis de gauche, d’avocats et médecins et même d’ anciens alliés. Un manifeste pour la démocratie, demandant sa destitution, a recueilli plus de 250 000 signatures, dont celles de plusieurs personnalités publiques brésiliennes. Ceci est clairement l’expression d’un rejet au gouvernement d’extrême-droite qui va crescendo.

Le président d’extrême-droite s’appuyant sur sa base électorale, a promis d’armer la population et essaye de la mobiliser pour le soutenir, pour la fin des restrictions liées au confinement, la dissolution du Congrès et du Tribunal Suprême Fédéral. Parmi les soutiens de Bolsonaro, certains ont défilé arborant des symboles nazis, des références au groupe suprématiste blanc Ku klux Klan ou en encore en demandant le retour de la dictature. En réponse à l’escalade autoritaire du gouvernement et à ces petites protestations de la base sociale de Bolsonaro, ont grandi peu à peu des manifestations appelées comme étant des rassemblements antifascistes et « pro-démocratie », impulsés par des groupes antifascistes de supporters de foot de différents clubs. C’est donc pour contrecarrer l’escalade autoritaire du gouvernement – avec les références explicites à Mussolini ou encore le général Augusto Heleno, ministre du Cabinet de la sécurité institutionnelle, qui a menacé la Cour Suprême d’un coup d’Etat pour protéger le président d’une enquête – et l’expression réactionnaire de sa base électorale, qui a agressé des professionnels de la santé et demande le retour de la dictature, les supporters ont lancé les manifestations contre Bolsonaro et « pour la démocratie ».

La passivité face aux attaques de Bolsonaro, et maintenue par les principales centrales syndicales du pays et dirigées par le Parti de Travailleurs (PT) et le Parti Communiste du Brésil (PCdoB), commencent à être brisées après la révolte déclenchée par le meurtre de George Floyd aux États-Unis et les manifestations au Brésil qui ont pris de l’ampleur.

Dépassant la barre de 37.000 morts, le Brésil est le nouveau épicentre du virus, mais cela n’a pas empêché que des milliers des personnes descendent dans les rues contre les violences policières, le racisme d’État et le gouvernement d’extrême-droite. Des hommages ont été rendus aux différentes victimes du racisme d’État – que ce soit celles mortes sous les balles de la police dans les favelas comme Joao Pedro, soit de la violence économique, comme Miguel, enfant d’une domestique, qui était sous la responsabilité de sa patronne et qui est tombée du neuvième étage d’un immeuble pendant que sa mère promenait les chiens de ses patrons.

Les supporters ont marché aux côtés des activistes du mouvement noir, qui ont repris le slogan américain « Black Lives Matter ». Les habitants de favelas organisés expliquaient, « on sort dans les rues parce qu’on ne veut pas mourir de faim, ni par des tirs de balles ni par le covid-19 ». Ainsi, des milliers de jeunes, différentes personnalités publiques et même des étudiants et professeurs de médecine ont dénoncé la gestion catastrophique de Bolsonaro et la censure des données sur les morts et les contaminés.

Plusieurs manifestations ont été réprimées, mais à Sao Paulo, depuis les fenêtres des appartements, il était possible de voir la solidarité envers les manifestants réprimés et les policiers traités de « fascistes » et de « lâches ».

Après la crise de 2008 et la fin du boom des matières premières, la pandémie a renforcé les contradictions existantes en Amérique Latine, dans une région où la croissance économique, dépendante du secteur primaire, était déjà très faible et les emplois précaires et informelles en hausse. A cela s’ajoute les différents attaques – réforme des retraites, réforme du travail, coupes budgétaires dans la santé et l’éducation –, qui ont porté un grand coup principalement aux noirs, qui composent majoritairement les secteurs les plus précaires et les plus exposés au coronavirus.

Les manifestations antifascistes et anti-racistes qui prennent de l’ampleur sont l’expression de toute la misère et les inégalités engendrées par le capitalisme, dont George Floyd a été le catalyseur, et qui frappent particulièrement les africains-américains au même égard que les brésiliens noirs, présents majoritairement dans des travaux surexploités comme la livraison, avec 70 % des livreurs qui sont noirs, travaillent sans aucune protection, vivent dans des lieux sans assainissement (au moins de 48 % n’en possèdent pas) ou d’eaux filtrées. Aujourd’hui, c’est entre autres parmi ces noirs brésiliens qui se révoltent aujourd’hui, représentant la couche la plus exploitée et opprimée de la société, que se trouvera ceux qui vont affronter demain le régime de Bolsonaro et les attaques qui se préparent contre les travailleurs, la jeunesse, à l’image d’un livreur à la manifestation antifasciste disant qu’ils allaient devenir les « Black Panthers du Brésil ».

Nos camarades d’Esquerda Diario, média frère au Brésil, et membres du collectif de noirs brésiliens Quilombo Vermelho, défendent une sortie de la crise à travers une politique d’indépendance de classe, qui favorise l’auto-organisation à travers une assemblée constituante libre et souveraine, pour que la classe ouvrière et les secteurs opprimés de la société puissent répondre à la crise politique du gouvernement, imposer des mesures d’urgence contre la pandémie et le chômage et dire stop à la violence policière et aux attaques contre notre classe. Sans placer aucune confiance dans le judiciaire et dans d’autres sorties institutionnelles et en s’organisant autour d’un programme indépendant, il faut dire haut et fort « Dehors Bolsonaro, Mourao (vice-président et militaire nostalgique de la dictature) » !


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