Des maisons littéralement glacées le long du Lac Erie entre les États-Unis et le Canada après le passage du « blizzard du siècle » / © Twitter, via @Nicklwanyshyn
Alors que les États-Unis émergent lentement du « blizzard du siècle », le bilan de la tempête s’alourdit : d’après les derniers chiffres, celle-ci aurait causé plus de 60 morts. Plus de 240 millions de personnes, soit 70% des étasuniens, ont été affectées par la catastrophe.
« Nous nous remettons d’une des pires tempêtes que nous n’ayons jamais vues, avec malheureusement le nombre de morts le plus élevé que nous ayons jamais eu dans une tempête », a déclaré Mark Poloncarz, responsable du comté d’Erié, région la plus touchée, lors d’une conférence de presse. C’est dans ce comté à l’ouest de New York que l’on a recensé plus de la moitié des décès : la tempête, après avoir balayé l’État de Washington et celui de l’Ohio, s’y est abattue en « bombe cyclonique ».
De plus, plus de 1,5 millions de foyers se sont retrouvés sans électricité ni chauffage, causant la mort de plusieurs personnes, terrassées par le froid. « C’est le pire blizzard que j’ai couvert » témoigne Reed Timmer, météorologue spécialisé dans les phénomènes extrêmes.
« Niveau de douceur inédit » en Europe et grand écart de températures attendu aux États-Unis
Dans le même temps, en Europe, les températures battent des records de douceur. « L’Hexagone a connu le deuxième Noël le plus doux depuis le début de l’indicateur de 1947 » d’après François Gourand, météorologue à Météo France, avec une moyenne de 11,3°C le 25 décembre, soit « 5,5°C au-dessus de la normale […] dans le détail, il y a eu des valeurs à près de 10°C au-dessus des normales ». Il ajoute que « sur la moyenne des deux jours [24 et 25 décembre] on est sur un niveau de douceur inédit pour cette période de l’année ».
Or même après l’enfer blanc, les États-Unis ne seront pas exempts de la douceur des températures, qui devraient augmenter drastiquement dans les jours à venir. Dans l’est du pays, elles prendront plus de 20°C : alors qu’il faisait entre -12°C et -20°C, des températures entre 8 et 15°C sont attendues pour le 30 décembre.
Quelle responsabilité de la crise écologique ?
Même si le lien de causalité ne peut être attribué automatiquement à la crise écologique pour chaque évènement climatique extrême, il est à noter la multiplication incontestable de ces évènements, leur passage « d’un extrême à l’autre » et la différenciation d’un côté à l’autre du globe.
François Jobard, prévisionniste, rappelle : « La raréfaction des vagues de froid est un marqueur du changement climatique. La dernière vague de froid à l’échelle du pays remonte à février 2012. […] Il y a un an tout juste, la France vivait (déjà) une fin d’année extraordinairement douce... Notamment la période du 24 au 31 décembre. La répétition des épisodes de douceur/chaleur en 2022 a atteint un niveau caricatural ». À rappeler que l’année 2022 a été la plus chaude jamais enregistrée en France.
Quant aux vagues de froid qui ont bien lieu, ici celle extrême et historique qui a balayé les États-Unis, Novethic rapporte que « Le blizzard du Siècle qui frappe les États-Unis a entraîné avec lui son lot de commentaires mettant en doute la réalité du changement climatique, certains n’hésitant pas à évoquer un ‘refroidissement climatique’ ». En effet si le lien entre les vagues de chaleurs, leur multiplication et la crise écologique est largement avéré scientifiquement, quid des vagues de grand froid ?
Dans son billet sur l’EGU, Davidad Faranda, climatologue au CNRS, cite différentes études ayant abouti à un lien entre changement climatique et vagues de froid localisées aux États-Unis, puis ajoute : « Il y a un débat en cours sur la mesure dans laquelle le changement climatique affecte les périodes de froid. Il est clair que le changement climatique a un impact significatif sur les modèles météorologiques de notre planète, y compris les événements extrêmes tels que les vagues de chaleur et les vagues de froid. Si le rôle spécifique du changement climatique dans les vagues de froid fait encore débat, il est probable que le changement climatique joue un rôle non négligeable dans l’intensité et la fréquence de ces événements ».
Les déséquilibres auxquels on assiste ne font donc qu’en annoncer d’autres pour les années à venir : les catastrophes liées à la crise climatique et les phénomènes météorologiques extrêmes et brutaux sont amenés à se multiplier. La tempête qui a eu lieu et ses conséquences dramatiques laisse elle entrevoir les aspects toujours plus destructeurs de la crise climatique, particulièrement sur les vies humaines.
Alors que seulement 90 entreprises sont responsables de 70 % des émissions de CO2 au niveau mondial qui provoquent le dérèglement climatiques, c’est elles qu’il faut combattre pour espérer une véritable transition écologique. Car c’est bien tout le système capitaliste, où les profits de quelques uns causent la mort de milliers de personnes, qui est responsable.
