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Jeunesse précaire

Chronodrive. Les étudiants salariés s’organisent pour exiger la prime de 1000 euros

Dans le magasin Chronodrive de Toulouse Lalande, une pétition exigeant une prime de 1000 euros pour tous a été lancée par les salariés. La colère monte notamment chez les étudiants en temps partiel qui appréhendent de recevoir une prime ridicule. Eux qui passent leur confinement à gérer des grosses cadences en multipliant les heures supp’, exigent maintenant une même prime de 1000 euros pour tous et toutes.

Rafael Cherfy

3 mai 2020

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Pour soutenir les travailleurs de Chronodrive, signez et partagez massivement la pétition.

Des effets d’annonce... au silence Radio

Le ministre de l’économie avait annoncé le 19 mars une prime exceptionnelle pour tous les salariés continuant à travailler pendant le confinement. Cela avec le même dispositif de prime défiscalisée que pour les Gilets jaunes en 2018. Dans la foulée, le 22 mars 2020, Edgar Bonte, président d’Auchan Retail, annonçait une prime de 1000 € aux salariés continuant de travailler pendant le confinement. De nombreux articles de presse précisaient bien que des employés d’Auchan et de Chronodrive allait percevoir cette prime de 1000 euros : La voix du nord, L’union, dans Le courrier Picard, dans L’aisne Nouvelle ou encore sur Francetransaction qui présente Auchan comme « montrant l’exemple ».

D’un autre côté, depuis le début de la pandémie la fréquentation des drives a explosé. On enregistre un bond de l’activité de l’ordre de 40 %. Les employés de la grande distribution, obligés de travailler se retrouvent à devoir gérer des cadences infernales, prenant le risque d’être contaminés, tout ça pour être payés au SMIC. A partir de là, l’annonce d’une prime de 1000 euros ne sonnait pas non plus comme une victoire, plutôt comme une concession pour garder les gens dans le rang comme avec les Gilets jaunes, cela a permis de calmer la colère qui émergeait dans la grande distribution. Mais une prime de 1000 euros pour prendre des risques face aux virus ça reste méprisant. En suivant, les annonces ont laissé place au silence des directions de la grande distribution. Chez les salariés, notamment les précaires (temps partiels, intérimaires) beaucoup réalisent qu’ils n’auront quasiment rien ou rien du tout.

Le cas Chronodrive, quand les étudiants salariés s’organisent

Plus précisément à Chronodrive, une filiale d’Auchan spécialisée dans les courses en ligne, la majorité des employés des plus de 60 drives du groupe, sont des étudiants en temps partiels. Dans le magasin Chronodrive de Toulouse Lalande, les effets d’annonce d’Auchan Retail sur la prime avaient permis de calmer les esprits. La direction du magasin, sans communiquer officiellement, a laissé courir la rumeur d’une prime de 1000 euros pour tous sans la démentir. Mais après quelques semaines sans nouvelles de la direction comme des représentants du personnel, les salariés ont commencé à douter. A ça s’est ajoutée la diffusion d’une pétition nationale « Prime de 1000 euros = Mensonge » qui dénonçait une réalité de versement de la prime bien différente que celle annoncée, notamment pour les temps partiels.

Dans les jours suivants, l’inquiétude a commencé à se faire sentir chez les étudiants salariés. De son côté, la direction répond seulement que Chronodrive est une filiale d’Auchan, donc que son conseil d’entreprise reste indépendant et que les décisions sur le versement de la prime ne sont pas les mêmes. C’est avec cet argument que la direction de Chronodrive se dédouane aujourd’hui de la communication du président d’Auchan Retail, Edgard Bonte. Pourtant à côté elle ne communique toujours pas à ses salariés les discussions sur le versement de la prime.

Pour les étudiants, face à toutes ces rumeurs de couloirs et à l’absence de communication officielle de la part des représentants du personnel comme de la direction, il était temps de prendre les choses en main. C’est dans ce sens que plusieurs étudiants salariés de Chronodrive ont commencé à s’organiser pour lancer une pétition avec trois revendications principales :

→ Une information claire par le groupe Chronodrive, si ils ne sont pas en capacité de donner la prime, qu’ils nous montrent les comptes !
→ Une information des initiatives des partenaires sociaux par les délégués supposés nous représenter ;
→ Une prime égale de 1000 euros pour tous les salariés de Chronodrive

La colère monte dans le secteur de la grande distribution

Plus largement dans la grande distribution, entre le 9 et le 15 mars selon le cabinet d’études Nielsen, le chiffre d’affaires des grandes enseignes a bondi de 38%, générant un surplus de 700 millions d’euros en comparaison avec le mois de mars 2019. Malgré ces chiffres records, « La prime de 1000 euros a du plomb dans l’aile » comme titrait Le Monde. Une grande majorité des enseignes de la grande distribution n’ont toujours rien annoncé aux salariés. Avec cette prime qui n’arrive pas et qui risque de laisser un goût amer aux précaires, la colère commence à se faire ressentir dans la grande distribution. Une colère plus que légitime de la part des salariés d’un secteur essentiel, en première ligne de la crise sanitaire. Ces derniers qui ont pris le risque d’être contaminés pour un SMIC, ne sont même pas sûrs de toucher une petite prime de 1000 euros. A ce niveau, cela devient une question de dignité !

Face à des annonces qui prévoient le versement de primes différentes selon le statut des travailleurs (temps partiels, intérimaires etc.) quelques réactions ont eu lieu à l’image de la grève de la plateforme logistique d’Auchan (sur le site d’ATAC logistique à Cournon-d’Auvergne, près de Clermont-Ferrand) les 28 et 29 avril. Plus d’une centaine d’intérimaires, soutenus par 200 employés ont débrayé pour revendiquer une prime pour tous, et plus largement l’augmentation des salaires. Du côté des étudiants travailleurs, on a pu voir des réactions sur la question de la prime notamment à Casino. « C’est tout bonnement inacceptable, car on a travaillé, on a pris des risques, on a mis notre santé en jeu, pour que les gens puissent se nourrir, et Casino a décidé de ne pas nous récompenser » déclare un salarié dans une vidéo. Émerge donc une colère dont la pointe avancée semble être Auchan avec plus de 500.000 employés qui doutent sérieusement après les effets d’annonce d’Edgar Bonte.

Une colère sur la prime avec un potentiel explosif

Pour les salariés de la grande distribution, l’enjeu est là. Il faut se coordonner avec d’’autres magasins et d’autres enseignes, pour établir un plan de bataille commun. C’est le seul moyen pour construire un rapport de force à la hauteur. La pétition des salariés de Chronodrive comme celle d’Auchan est un premier pas dans ce sens. Pour aller plus loin, il faut coordonner toutes ces initiatives sur la base de revendications communes dont la première serait évidemment celle d’une même prime de 1000 euros pour tous et toutes. Une même prime pour chaque personne ayant travaillé pendant la pandémie prenant le risque d’être contaminé et de contaminer ses proches.

Cette revendication de la prime apparaît dans de nombreux autres secteurs du travail en première ligne du Covid-19 comme chez les ambulanciers privés, plus largement pour les employés de commerce ou encore pour l’ensemble du personnel mobilisé pendant la pandémie

Si pour l’instant la colère s’exprime sur la question de la prime, elle pourrait se déplacer sur la celle d’une augmentation générale des salaires dans les prochains mois. La crise sanitaire met en lumière les secteurs essentiels de notre société (infirmières, ambulanciers, livreurs, routiers, nettoyage, alimentaire etc...). Mais quand on regarde de plus près, on réalise que ce sont eux qui sont le moins bien rémunérés, souvent au salaire minimum ou juste un peu plus.

Et il y a bien un secteur du travail qui ne connaît pas la crise économique actuellement, c’est celui de la grande distribution. La fermeture de nombreux petits commerce alimentaire (bars, restaurants, snacks, boulangerie etc...) a fait gagner de grosses parts de marché aux grandes enseignes comme Leclerc, Auchan, Carrefour, Casino etc... Si ces derniers disent ne pas être en capacité de verser cette prime de 1000 euros à l’ensemble de leur salariés qu’ils le prouvent en dévoilant toute leur trésorerie ! Si augmenter les salaires n’est d’après eux « pas viable économiquement », qu’ils nous montrent les comptes !

Signez et faites signer la pétition pour soutenir les étudiants salariés de Chronodrive !


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