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Entretien

Coupures de courant : « à RTE, on alerte sur les risques de la privatisation depuis 2004 »

Alors que le gouvernement annonce des risques de coupures d’électricité, les salariés du secteur se mobilisent pour leur salaires et leurs conditions de travail. Yoann Lecante, Représentant Syndical CGT RTE Sud-Ouest, revient pour Révolution Permanente sur les grèves qui ont éclaté et le sous-investissement dû aux mécanismes de marchés dans le secteur, responsable des risques de coupures actuels.

Seb Nanzhel

9 décembre 2022

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RP : Est-ce que tu peux décrire la dynamique des grèves récentes à RTE ?

Yoann Lecante, Représentant Syndical CGT RTE Sud-Ouest : Ça dure depuis longtemps, il y a eu plusieurs phases. Dans le Sud-Ouest on se battait déjà contre la fermeture du dispatching l’an dernier (centre qui gère la répartition des flux d’électricité), puis en début d’année des grèves pour les salaires ont éclaté dans l’Ouest et le Sud-Ouest.

A ce moment-là, la direction n’a pas voulu ouvrir de discussions, prétextant qu’elle attendait le gouvernement, puis les discussions au périmètre de la branche des IEG (Industries Electriques et Gazières) et enfin par entreprises. En juin on a eu une revalorisation de grille d’uniquement 2.3% par la branche professionnelle.

Depuis 15 jours, dans le cadre des négociations par entreprises, avec la CGT on est partis en grève reconductible dans le Sud-Ouest, avec des blocages. On revendique une augmentation de 3 NR (Niveau de Rémunération), ce qui correspond à 6.9% d’augmentation. Le 1er décembre, on a eu 50% de grévistes sur le GMR (Groupe de Maintenance Réseau) de Gascogne-Bordeaux. Le 6 décembre, la veille des négociations, il y avait 58% de grévistes dans le même centre. On a aussi eu par exemple 71% de grévistes à Pau et 61% à Toulouse et plus généralement en moyenne sur la maintenance dans le Sud-Ouest, on avait 55% de grévistes.

RP : Face à ça, qu’ont proposé les directions ?

Y.L. : Jeudi un accord a été finalisé, qui va être soumis à une consultation des syndiqués. Ils nous ont fait une véritable usine à gaz, avec une augmentation de 1 NR soit 2,3 % pour tous au 1er janvier 2023, et une prime mensuelle qui sera convertie en NR en 2025.

En fait la direction dit qu’ils sont bridés par le TURPE (Tarif Utilisation Réseaux Publics Electricité), et ils se cachent derrière pour dire qu’ils ne peuvent pas nous augmenter plus. Mais de fait si y a une catastrophe, par exemple une tempête, le TURPE peut être renégocié. Avec l’inflation qui pèse sur tout le monde, il faut des augmentations !

Nous on a une logique de dire à la direction : si le TURPE peut réévaluer le budget sur des événements pourquoi pas sur nos salaires ? On veut une augmentation d’au moins 2 NR !

RP : Comment tu fais le lien entre les salaires, les conditions de travail et la situation actuellement de crise énergétique ?

Y.L. : Niveau énergie, la grille salariale est très peu réévaluée depuis des années. Avec l’inflation, ça fait qu’on a eu une dévaluation de notre salaire. Ça crée un climat social très tendu. Dans le même temps il y a des dynamiques de gestion et de management d’entreprises privées qui se mettent en place. On a un management pas très différent de France Télécom. On se souvient par exemple des 4 gardes à vues de 72 heures à la DGSI de militants syndicaux.

Nous on a des revendications qui sont justes : face à l’inflation, on ne veut pas perdre d’argent. On a des missions de service public, et des rémunérations au rabais avec une politique managériale délétère.

Quand il y a des problèmes, il faut qu’on intervienne, s’il y a besoin on y va même le weekend. Le lignard, qui est en haut des pilonnes, c’est comme ça, il est à peine au-dessus du SMIC.

Plus généralement, on paie actuellement une politique libérale sur l’énergie qui s’est déployée depuis des années.

RP : En lien avec ça, comment tu analyses les risques de coupures de courant qui risquent de se produire cet hiver ?

Y.L. : Comme je dis, les coupures qu’on va avoir dans l’hiver c’est pas dû à ce qui s’est passé dans l’année. C’est la conséquence d’années de privatisation. Récemment, on a ressorti un vieux tract de 2004 qui avertissait déjà des conséquences de la privatisation.

Il faut voir que EDF doit vendre à un prix plafonné aux fournisseurs privés d’électricité une partie de sa production (mécanisme de l’Arenh). RTE derrière, est obligé d’alimenter EDF pour maintenir les comptes à flot. Au final, tout ça se fait sur le dos de la maintenance des lignes et les investissements. En réalité les fournisseurs privés pompent l’argent mais ils ne font aucun investissement, que ce soit sur les réseaux ou la production.

De manière générale il y a quelques investissements de neuf, dans le raccordement notamment des énergies dites renouvelables, mais à côté de ça c’est tout le réseau existant qui est délaissé, et dans un état de vétusté important. Donc on se retrouve dans cette situation, avec des coupures à prévoir.


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