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Meeting réussi pour BDS-34

Criminalisation et poursuite de militant.e.s BDS : à Montpellier la résistance s’organise

Dom Thomas C'est dans une salle comble que le meeting organisé par le comité local montpelliérain de BDS s'est tenu lundi soir, avec le soutien de nombreuses organisations dont le NPA34. Réunissant à la tribune Alain Gresh, Pierre Stambul et des militant.e.s réprimé.e.s de Toulouse et de Montpellier, les interventions ont porté sur la situation en Palestine et sur les attaques qui ont visé BDS ces derniers mois, en particulier dans le contexte français, appelant à une solidarité pleine et entière non seulement avec les militant.e.s réprimé.e.s localement, mais bien sûr également avec le peuple palestinien sur place.

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BDS : de l’émergence de la campagne à sa criminalisation

En ouverture, l’intervention d’Alain Gresh a rappelé quelques éléments historiques. La campagne Boycott – Désinvestissement – Sanctions est née en 2005 à l’appel de la société civile palestinienne, face au constat de l’échec du « processus de paix » et de l’absence de réaction internationale. Les accords d’Oslo, signés en 1994 et censés ouvrir le processus de paix israélo-palestinien, sont en effet restés lettre morte, sans que leur non-application ne donne lieu à aucune sanction effective à l’échelle internationale. De la même manière, si la Cour Internationale de Justice avait bien rendu, en 2004, une décision condamnant le mur en cours de construction par Israël, et appelé à cesser de le construire ainsi qu’à abattre les pans déjà en place, un an après, la situation n’avait fait pour autant qu’empirer. En 38 ans d’occupation, la colonisation n’a fait que se poursuivre ; le nombre de colons est passé, entre les accords d’Oslo et l’année 2005, de 100.000 à 400.000 (hors Jérusalem Est).

Face à cette absence de perspectives, la société civile palestinienne lance la campagne BDS pour interpeller la communauté internationale, sur la base de trois revendications : 1) le démantèlement du mur, la fin de l’occupation et de la colonisation israéliennes ainsi que du blocus de Gaza ; 2) la reconnaissance des droits des Palestiniens ; 3) le droit au retour des réfugiés, en conformité avec la résolution prise par l’ONU en décembre 1948, et jamais appliquée.

Les moyens d’action proposés par BDS tiennent dans les trois lettres de son nom : le Boycott des produits israéliens, qui passe également par le refus de toute collaboration culturelle, sportive ou universitaire ; le Désinvestissement en incitant les entreprises à cesser toute coopération économique et financière avec Israël, et l’application réelle des Sanctions émanant de la communauté internationale. Plus largement, l’appel au boycott, au désinvestissement et à la prise de sanctions permet aux militants de BDS d’informer et d’interpeller localement sur la situation en Palestine, comme le faisait jusqu’à il y a peu le comité BDS34 tous les samedis sur la place de la Comédie.

La mobilisation a trouvé un certain écho du fait des agressions israéliennes à Gaza en 2009 et en 2014, du maintien du blocus aérien touchant Gaza et de l’évolution des prises de position gouvernementales, en particulier françaises, rejetant désormais systématiquement la faute du retour des tensions actuelles sur les Palestiniens. Face aux succès de la campagne BDS – victoires économiques avec le désinvestissement de Veolia et à l’écho que la campagne rencontre désormais, le gouvernement israélien a alors mis en place une cellule de crise pour faire pression sur les Etats afin de criminaliser le mouvement.

Le gouvernement français fait à ce titre figure de meilleur élève mondial. Dès 2010, la circulaire Alliot-Marie a posé les bases de l’interdiction de l’appel au boycott, et ce tout particulièrement pour faire face aux actions organisées par BDS . Si l’application de cette circulaire a donné lieu à des interprétations diverses par les juges, un arrêt de la Cour de Cassation vient de confirmer la condamnation de 14 militant.e.s BDS de Colmar, sous prétexte de provocation à la discrimination : cet arrêt devrait désormais s’imposer comme seule interprétation possible par les tribunaux français. Exception faite de l’Etat d’Israël lui-même, l’Etat français est le seul dans le monde à avoir prononcé une telle interdiction. Par ailleurs, les attaques se multiplient contre les comités locaux, de l’interdiction de réunions publiques comme à Toulouse, à l’interdiction pure et simple de manifester

Antisionisme, antisémitisme ? Fabrique d’une confusion

Pierre Stambul est ensuite revenu sur l’antisémitisme – un terme qu’il récuse, car entérinant étymologiquement l’existence des Sémites et donc d’une « race » juive. Le co-président de l’Union Juive Française pour la Paix, soutien inconditionnel de BDS régulièrement attaqué pour ses prises de position politique, a rappelé que l’antijudaïsme a été inventé au IVème siècle par le christianisme, qui faisait vivre aux Juifs des persécutions bien plus grandes que celles qui existaient dans le monde arabe à l’époque : ghettos, pogroms et stéréotypes racistes étaient le lot commun des Juifs en Europe. Plus tard, au XIXème siècle, les nationalismes exclusivistes fondés sur l’idée « un peuple = un Etat » constitueront les Juifs en ennemis principaux. Ils donneront naissance aux idées qu’on peut actuellement retrouver dans les théories complotistes, selon lesquelles les Juifs seraient partout, contrôleraient le monde et empêcheraient les Etats de gouverner. Le développement de cet antisémitisme aura les conséquences que l’on sait, aboutissant au génocide hitlérien.

Si l’antisémitisme existe bel et bien encore en France aujourd’hui et doit absolument être dénoncé, il ne constitue qu’une petite partie des actes racistes qui ont lieu de plus en plus fréquemment en France aujourd’hui. D’autre part, cet antisémitisme s’exprime dans un tout autre contexte : les Juifs ne sont plus les parias de l’Europe.

Le sionisme porté par le gouvernement israélien, Netanyahu en tête, consiste à prôner la séparation des peuples : il s’agit bel et bien d’une politique raciste. Les sionistes n’ont d’ailleurs jamais combattu réellement l’antisémitisme, mais s’en sont servi pour leur cause : faire émigrer les Juifs vers Israël afin de renforcer la présence sur place. Si pour Pierre Stambul, les théories complotistes sont des alliés objectifs du sionisme en ce qu’elles essentialisent une soit-disant « race juive », la comparaison entre sionisme et nazisme est cependant à éviter : l’Etat d’Israël a commis et commet de toutes façons suffisamment de crimes en son nom propre pour qu’il soit inutile de chercher plus loin les motifs de dénonciation.

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Témoignage de la criminalisation de BDS à Toulouse

Un militant de Toulouse a alors témoigné des interdictions successives et de la criminalisation subie localement. L’année 2015 a en effet été émaillée d’attaques contre les militant.e.s de BDS Toulouse, attaques émanant des organisations juives d’extrême-droite comme des pouvoirs publics : agression physique par un commando LDJ-SPCJ pendant un tractage le 17 janvier, interdiction d’une réunion publique par le maire le 31 mars et d’une conférence par le président de l’université du Miral le 30 septembre, tentative de perturbation d’une réunion publique par la LICRA et le CRIF le 9 juin, et enfin convocation de 6 militant.e.s au commissariat le 23 juin. A la suite de cette convocation, quatre militant.e.s passeront en procès le 9 décembre pour entrave à l’exercice normal d’une activité économique... et ce alors même qu’aucune dégradation n’a été commise, et que les magasins devant lesquels le tractage incriminé avait eu lieu n’ont pas porté plainte. Derrière ce procès, ce sont en fait la LICRA et le CRIF qui sont à la manœuvre ; le CRIF participe par ailleurs depuis 2006 à la formation des magistrats, intervenant sur l’antisémitisme à l’Ecole Nationale de la Magistrature. Un rassemblement de soutien aura lieu le 9 décembre à 13h devant le tribunal.

A Montpellier, un procès scandaleux et indigne, intenté par la Ligue des Droits de l’Homme

C’est Saadia, militante montpelliéraine et porte-parole de BDS34, qui a clos la série des interventions en rappelant l’attaque indigne dont Hussein et elle sont victimes à Montpellier. La Ligue des Droits de l’Homme, présidée localement par Sophie Mazas, a en effet porté plainte contre eux à la suite d’une publication partagée sur leur mur facebook à l’été 2014, pendant les bombardements israéliens à Gaza. Si la publication était effectivement malencontreuse, les deux militants l’ont retirée dès qu’ils ont été informés de son contenu réel. En tout et pour tout, la publication sera restée en ligne deux jours et demi.

Contrairement à ce qu’elle prétend, Sophie Mazas a fait faire un constat d’huissier, et a demandé à sa direction nationale de porter plainte le jour suivant. Depuis, ce sont le MRAP, mais aussi et surtout la LICRA, le BNCVA et Avocats Sans Frontières (présidé par un membre du CRIF) qui se sont portés partie civile auprès de la LDH, afin de faire de ce procès celui de la campagne BDS dans son ensemble.

Saadia et Hussein passeront en procès demain jeudi 12 novembre, pour « apologie du génocide et négationnisme ». Une pétition est en ligne pour les soutenir , et un rassemblement aura lieu devant le tribunal à 13h30

La LICRA et le CRIF ont d’ores et déjà profité de cette brèche pour faire interdire le stand que BDS34 tenait tous les samedis sur la place de la Comédie. Dorénavant, le stand politique est assimilé à un stand commercial, et assujetti à une demande d’autorisation deux mois à l’avance. Le rassemblement du 17 octobre dernier, en soutien à l’activité de BDS a été réprimé dans la violence ; celui du 31 octobre a été tout simplement interdit le matin même, Une manifestation a pu avoir lieu depuis, sans qu’il soit cependant possible de monter de nouveau le stand.

La criminalisation de BDS au niveau national comme au niveau local, sous la pression de l’Etat israélien, s’inscrit dans la droite ligne d’une politique de répression dure menée par le gouvernement français. Face à la répression des militant.e.s associatifs, syndicaux et politiques, mais aussi face à l’intensification de la répression sur le sol palestinien, il nous faut plus que jamais lutter ensemble et afficher un soutien plein et entier aux militant.e.s concerné.e.s et à l’ensemble du peuple palestinien opprimé.


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