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Grève pour les salaires

Daher. 5ème jour de grève majoritaire sur cinq sites du sous traitant aéronautique

Depuis ce vendredi 21 octobre, différentes équipes du groupe aéronautique Daher sont entrées en grève reconductible pour les salaires. A Bordes, Tarnos, le Haillan, St Médard en Jalles ou encore Rosny sur seine, des centaines de travailleurs exigent 5% pour suivre à minima l’inflation.

Antoine Bordas

27 octobre 2022

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Photo du piquet de grève devant le site de Bordes, réunissant les travailleurs de Safran et de Daher

Ce jeudi marquera la cinquième journée de mobilisation pour les travailleuses et travailleurs du groupe Daher, géant de l’aéronautique. Si un mouvement de grève plus partiel avait mobilisé quelques dizaines de salariés de Daher durant trois jours à Toulouse il y a deux semaines, c’est aujourd’hui un mouvement d’ampleur national qui secoue le sous-traitant aéronautique, avec une grève coordonnée et reconductible sur cinq sites. Si les travailleurs précédemment en grève à Toulouse revendiquaient une augmentation des salaires de 10 % et une prime PEPA à 1000 euros, les grévistes mobilisés actuellement à l’échelle nationale demande a minima 5 % d’augmentation pour rattraper l’inflation. Alors que la dernière augmentation allait de 2 à 2.5% en mars dernier, actuellement la direction refuse toujours d’ouvrir toute nouvelle négociation.

« Des assistants sociaux et du covoit, voilà ce que propose la direction »

Ce mercredi, Révolution Permanente était au côté des travailleurs en lutte sur le piquet de grève du site Ariane Group le Haillan à Bordeaux. Les ouvriers de St Médard en Jalles, deuxième site Daher à Bordeaux, avaient rejoint ceux du Haillan pour cette quatrième journée. Sur les sites du géant spatial Ariane en Gironde, c’est un contrat de sous-traitance de logistique que Daher réalise, sur la petite trentaine de travailleurs, la grève est majoritaire.

Pour cette quatrième journée, les travailleurs sur place témoignent d’une détermination importante : il n’y a aucune raison de reprendre le travail, alors que la direction méprise la mobilisation. En effet, alors qu’aucunes réelles négociations ne sont engagées, des représentants de la direction passent sur les piquets de grèves pour mettre la pression, mais aussi étaler leur mépris : « des assistants sociaux et du covoit, voilà ce que propose la direction » nous confiait Amandine, élue CSE Nouvelle-Aquitaine pour Sud Industrie.

Face à cela, la grève est pour l’instant reconduite et une caisse de grève de Daher Nouvelle Aquitaine est d’ores et déjà lancé pour appuyer les grévistes les plus en difficultés. De plus, du côté du donneur d’ordre Ariane Group, des représentants syndicaux surveillent attentivement la mobilisation. S’ils ne voient pas encore de possibilité de rejoindre immédiatement la mobilisation aux côtés de leur sous-traitant, ce sont des dons à la caisse qui sont promis pour les encourager cette bataille.

Finalement, c’est avec un constat simple qu’un des grévistes concluait la discussion : « si on ne se bouge pas aujourd’hui, nous, on sera des retraités pauvres et nos enfants, n’en parlons pas ».

Sur le site de Bordes, des débrayages à 500 qui paralysent le site

À Daher Bordes dans le Béarn, la grève est la plus impressionnante. Le site central de Safran qui prend en charge l’assemblage des moteurs d’hélicoptères et la fabrication de « sous-ensemble » est quasiment à l’arrêt.

Et pour cause, depuis vendredi dernier, les travailleurs de Daher sont en grève reconductible, accompagnés par des débrayages des travailleurs de Safran. Au total, près de 500 grévistes se réunissent quotidiennement devant l’usine. Les modalités ne sont pas tout à fait les mêmes : côté Safran le mouvement dure depuis plus longtemps avec une modalité de débrayage sur quelques heures quotidiennement. Du côté des travailleurs de Daher, le ton est donné dès le vendredi 21 octobre : grève reconductible suivie par 90% des collègues.

L’argument de la direction de Daher étant le même partout, pas de négociation en vue. Les travailleurs pointent que comme souvent la situation de l’entreprise qui est loin d’être à plaindre avec 1.2 milliard de chiffres d’affaires en 2021. De plus, alors que les salaires permettent de moins en moins de survivre dans un contexte d’explosion des prix, les travailleurs du sous-traitant aéronautique observent des mouvements financiers colossaux : rachat en cours du principal concurrent, rachat du groupe américain Triumph, investissement en Russie etc…

Olivier Pedeflous Delegue délégué CGT Nouvelle aquitaine pour Daher commente simplement cette situation : « plus rien ne passera, les excuses de calendrier alors que les frigos se vident ça suffit !  ». Ce dernier dénonce également la direction de Daher qui semble plus occupée à « faire péter la grève » qu’à autre chose : police sur les piquets en région parisienne, rapatriement d’autres sous-traitants pour tenter de relancer la production à Bordes… Cet acharnement n’est pas anodin : «  quand ils font descendre les cadres des bureaux pour faire le taff, c’est qu’ils flippent  ». Et pour cause, comme à chaque fin de mois, ça parle chiffre d’affaires entre donneur d’ordre et prestataire : la direction cherche à sauver la face d’une activité fortement impactée par la grève.

Face à cette répression, les travailleurs avec qui nous avons échangés nous affirment leur détermination. Plusieurs d’entre eux mentionnent d’ailleurs la récente grève des raffineurs : « si certains collègues avaient des doutes en voyant les prix de l’essence remonter, finalement de plus en plus ont compris qu’ils nous montraient la voie !  ». À présent, c’est à Daher que l’on reprend la main, avec ces cinq jours de grève majoritaire et reconductible !

Élargir la grève pour gagner de réelles augmentations de salaires

Faire craquer la direction sur les 5% et rien d’autre, c’est bien ce que l’on retient lorsque l’on discute avec les grévistes de Daher. Mais l’on sent aussi une tension à réfléchir sur comment la mobilisation pourrait s’élargir, dans les autres sites où intervient le sous-traitant logistique, 31 dans tout le pays. Aussi, la question de l’unité se pose avec les donneurs d’ordres, comme c’est déjà le cas dans une certaine mesure avec Safran sur le site de Bordes, mais pas encore à l’échelle nationale avec l’ensemble du groupe Safran et encore moins avec Airbus ou Ariane.

Récemment, différentes mobilisations dans la sous-traitance aéronautique ou chez les donneurs d’ordres ont montré que la colère sur les salaires était bien présente dans le secteur. Une colère dans la sous-traitance illustrée par les quatre jours de grève à Sabena Technics Toulouse, suivie par 100 % ouvriers, ou encore la mobilisation très récente à Blanc Aéro sur le site de Villefranche de Rouergue. Au niveau des donneurs d’ordres, Safran connait actuellement un mouvement de grève national sur la question des salaires et les salariés de la FAL A320 (chaine d’assemblage) ont mené une grève inédite la semaine dernière pour une augmentation de 10 % de tous les salaires.

Ces différentes luttes posent la question de l’unité de l’ensemble de la chaîne de production aéronautique qui a été particulièrement divisée sur les dernières décennies. La coordination entre les sous-traitants et les donneurs d’ordre est l’une des clés des futures luttes pour les salaires dans le secteur. Sur le site de Bordes, le soutien mutuel entre les grévistes de Daher et ceux de Safran est un premier pas dans ce sens. Comme le résumait l’un des grévistes de Sabena Technics à la fin de la grève : «  Il faut qu’on soit tous solidaires et essayer de faire un jour en commun avec toutes les entreprises du bassin aéronautique » (…) « On aimerait bien un jour qu’on bouge tous ensemble pour montrer à ces patrons qu’on n’est pas divisé mais ensemble ».

Donnons à la caisse de grève des travailleurs de Daher Nouvelle Aquitaine pour soutenir leur lutte !


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