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Élections Européennes

Gilets jaunes et Européennes. Tout sauf Macron ?

Le mouvement des gilets jaunes a révélé la profonde fracture sociale qui existe aujourd’hui en France, de même qu’il a critiqué les limites de la représentation dans le cadre des institutions actuelles. L’échéance des élections européennes devrait ainsi être l’occasion d’en tirer des conclusions au moment de choisir pour qui voter. Et pourtant…

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Gilets Jaunes et élections Européennes

À défaut de désigner directement les patrons des grandes entreprises, le mouvement des gilets jaunes s’est fortement attaqué à une élite d’ultra-riches, les mêmes qui après s’être dits incapables de résoudre la crise sociale et le chômage dans le pays, s’amusent aujourd’hui dans une sorte de course aux dons pour la restauration de la Cathédrale de Notre Dame. C’est le sens de la focalisation du mouvement sur le rétablissement de l’ISF, dont la suppression apparaît clairement comme un cadeau du gouvernement aux plus riches, au même moment où il augmente les taxes et coupe les aides qui concernent les plus pauvres.

Mais les gilets jaunes ont également critiqué le fonctionnement même d’institutions qui permettent à un candidat plébiscité par moins de 20 % du total d’électeurs au premier tour comme Macron, de se retrouver à la tête du pays avec une majorité absolue à l’Assemblée. Ils ont critiqué les privilèges des politiques et tenté de réfléchir à des formes de contrôle populaire sur les institutions (dont le RIC, même si nous ne le partageons pas), tandis qu’ils demandaient la démission d’un président qu’ils jugent trop déconnecté de la réalité de la majorité des gens au sein de cette France ouvrière et populaire qui constitue la base de soutien au mouvement.

Et pourtant de nouvelles élections s’approchent et on risque d’avoir une fois de plus des millions de travailleurs (quand ils ne s’abstiennent pas, dégoûtés par les derniers gouvernements de « gauche » et de droite) qui votent pour leurs pires ennemis, ceux qui incarnent au quotidien les intérêts et le train de vie des patrons et des plus riches. Il suffit de faire un petit tour sur les CV des différents candidats pour se rendre compte à quel point la plupart d’entre eux sont éloignés de la réalité de ceux qui ont du mal à finir les mois.

Diplômés de l’ENA (Philippot et Asselineau), ex-ministres (Hamon), diplomates de carrière (Nathalie Loiseau), jusqu’à des personnages comme Nicolas Dupont-Aignan qui, avec ses 2,4 millions d’Euros, ses six appartements et sa statue, était déjà le plus gros patrimoine des dernières élections présidentielles, on est très loin de la vie que vivent des millions de travailleurs dans ce pays. Révolution Permanente passera au crible leur CV dans une série d’articles d’ici les élections, pour aider nos lecteurs à faire leur choix.

Le scandale des méthodes de financement de campagne

Mais les liens entre les différents politiciens du système et la classe dominante ne s’arrêtent pas du tout à leur train de vie. La question des méthodes de financement de campagne constitue une véritable machine de corruption légale. C’est ce que démontre l’économiste Julia Cagé, auteur de l’ouvrage Le prix de la Démocratie, lorsqu’elle explique aux journalistes de Libération qu’en « France […] ce sont les plus aisés qui financent la vie politique. Ils ne sont d’ailleurs pas nombreux. Chaque année, seuls 290 000 foyers fiscaux français font un don, 0,79 % des Français adultes. Mais si on regarde parmi les 0,01 % des Français aux revenus les plus élevés, on s’aperçoit que 10 % d’entre eux font un don. […] Mais le scandale, c’est que les dons privés des plus aisés sont financés par l’ensemble des citoyens. »

Car il y a une façon de faire des dons, « dont on ne parle jamais, ce sont les déductions fiscales : votre don à un parti politique est remboursé à 66 %, par le biais d’une réduction d’impôt. Ces réductions représentent 56 millions d’euros par an pour les seuls dons aux partis politiques ! » Et le pire c’est qu’on « ne peut bénéficier de déductions d’impôt… que si on paie l’impôt sur le revenu, ce qui n’est le cas que d’un Français sur deux. Pour le dire autrement si vous êtes parmi les 10 % des Français les plus fortunés, et que vous faites un don de 7 500 euros, celui-ci vous reviendra au final à 2 500 euros. Et le coût de votre don pour l’ensemble des citoyens sera de 5 000 euros. […] Bref, en France, les plus pauvres paient pour satisfaire les préférences politiques des plus riches. »

Tout cela a des conséquences évidentes sur la politique menée par la suite par des candidats aussi gracieusement soutenus. Il est évident que les grands patrons et les plus riches donnent de l’argent, car ils y voient un intérêt. Le cas de la suppression de l’ISF est assez illustratif, comme le met en évidence Julia Cagé : « une personne soumise à l’ISF qui a donné 7 500 euros à la République en marche, ce qui lui est revenu à 2 500 euros, et qui voit l’ISF supprimé a effectivement fait un bon investissement. » On comprend tout de suite beaucoup mieux l’intérêt que les patrons et les riches ont dans le financement des partis politiques…

Les organisations indépendantes des grandes entreprises et de l’État comme le Nouveau Parti Anticapitaliste, auquel appartiennent les militants de Révolution Permanente, ont quant à elles beaucoup plus de mal à financer leur campagne, comme en témoigne le fait que le parti d’Olivier Besancenot et Philippe Poutou n’ait pas pu rassembler le million d’euros et demi qui leur était nécessaire pour pouvoir se présenter.

C’est bien pour cela qu’il ne suffit pas de dire « tout sauf Macron » pour être sûrs d’échapper au même piège que ceux qui ont voté pour lui en 2017 car c’était « tout sauf Le Pen ».

Le « conseil » des communards

La question de comment choisir ses représentants et faire en sorte qu’ils ne défendent pas des intérêts opposés à ceux de l’énorme majorité des votants n’est pas nouvelle. Pendant la Commune de Paris de 1871, qui a aboli tout privilège des élus et les a rendus révocables à tout moment par leurs électeurs, le Comité Central de la Garde Nationale donnait les conseils suivants aux électeurs à la veille d’un scrutin, conseils que nous reprenons à notre compte :

« Citoyens,

Ne perdez pas de vue que les hommes qui vous serviront le mieux sont ceux que vous choisirez parmi vous, vivant votre vie, souffrant des mêmes maux. Défiez-vous autant des ambitieux que des parvenus ; les uns comme les autres ne consultent que leur propre intérêt et finissent toujours par se considérer comme indispensables. Défiez-vous également des parleurs, incapables de passer à l’action ; ils sacrifieront tout à un beau discours, à un effet oratoire ou à un mot spirituel. Evitez également ceux que la fortune a trop favorisés, car trop rarement celui qui possède la fortune est disposé à regarder le travailleur comme un frère. Enfin, cherchez des hommes aux convictions sincères, des hommes du peuple, résolus, actifs, ayant un sens droit et une honnêteté reconnue. Portez vos préférences sur ceux qui ne brigueront pas vos suffrages ; le véritable mérite est modeste, et c’est aux électeurs à choisir leurs hommes, et non à ceux-ci de se présenter. Citoyens, Nous sommes convaincus que si vous tenez compte de ces observations, vous aurez enfin inauguré la véritable représentation populaire, vous aurez trouvé des mandataires qui ne se considèrent jamais comme vos maîtres.

Le Comité Central de la Garde Nationale »

De la campagne Poutou au vote pour les candidats de LO

C’est cette idée que les travailleurs et les couches populaires doivent se représenter eux-mêmes, sans laisser cette tâche à des professionnels de la politique, que le NPA a toujours mis en avant, d’abord à travers les candidatures d’Olivier Besancenot, postier, puis de Philippe Poutou, ouvrier de l’automobile. Et même si son score a été modeste, on peut se souvenir à quel point cela faisait du bien et cela changeait du discours habituel de la plupart des candidats, dans cette vidéo du premier débat présidentiel de 2017.

Ne pouvant pas être présents à ces élections, le NPA a décidé d’appeler à voter pour les candidats de Lutte Ouvrière. Enseignante dans le secondaire, Nathalie Arthaud se trouve à la tête d’une liste composée exclusivement par des ouvriers, des employés, des infirmières et des aide soignantes, des cheminots, des retraités, etc., et sans aucun financement autre que celui des contributions de ses propres militants. C’est déjà un premier (et très important) critère pour choisir son bulletin de vote pour le 26 mai.


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