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Business et colonialisme

Hollande en tournée en Afrique : affairisme, combine militaire, et soutien aux pires dictateurs

Nina Kirmizi Deux jours pour trois pays : le Bénin, l'Angola et le Cameroun. Entouré d'une armada de petits et grands patrons, Hollande va-t-en-guerre vient régler les comptes après avoir imposé la puissance impérialiste française sur le continent. L'intervention en Centrafrique, l'opération Serval puis Barkhane au Mali, ont permis de renforcer l'impérialisme français dans la région qui comptait déjà plusieurs milliers de soldats français dans des bases militaires installées en permanence. Tandis que la course aux parts de marché africain bat son plein, en dispute avec les émergents – et notamment la Chine –, la nouvelle position acquise de la France comme « gendarme » africain devrait faciliter les affaires. Après la bataille, l'heure est au butin.

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Bénin : adouber le nouveau premier ministre et préparer la suite


Depuis Mitterrand aucun président ne s’était rendu au Bénin. Hollande, lui, fait le grand retour de la France dans le pays, en s’improvisant représentant de la démocratie qu’il est venu défendre dans un long discours. Un discours qui prête à rire quand personne n’ignore, et encore moins les journalistes béninois, la réelle raison de sa venue. La visite de Hollande intervient deux semaines seulement après la nomination de l’ancienne plume de Laurent Fabius, le franco-béninois Lionel Zinsou comme premier ministre, qui n’aurait eu sa place qu’à la faveur de l’injonction de l’Élysée auprès de Boni Yayi, actuel président du Bénin. Étrange coïncidence ? Pas vraiment. Hollande, malgré les promesses de campagne, n’en est pas moins le meilleur représentant du capitalisme français en Afrique, et maintient la réalpolitik à la française. Fort de la nouvelle position militaire de la France en Afrique, il intervient pour rebattre les cartes du jeu dans les réseaux françafricains et préparer la continuité du pouvoir alors que Boni Yayi approche de la fin de son deuxième – et dernier – mandat.

Angola : sceller des contrats en dehors du pré-carré français


Un discours sur les valeurs du pluralisme politique d’autant plus risible qu’Hollande s’apprête à poursuivre sa visite chez le très démocratique José Eduardo Dos Santos, 72 ans dont 35 au pouvoir. L’Angola n’appartient pas au pré-carré colonial de la France, mais le pays dont les taux de croissance annuel dépassent les 8% est riche de son sous-sol : deuxième producteur de pétrole du continent, il regorge également de diamants. Et les ambassadeurs du capitalisme français aux côtés de Hollande, du raffineur Total au cimentier Lafarge, comptent bien rafler la mise des juteux contrats qu’a promis le président angolais : 10 milliards d’investissements dans les logements et 15 dans l’électricité, qui seront vigoureusement négociés lors d’un forum économique organisé sur place pour l’occasion.

Au diable les belles paroles et les injonctions démocratiques de la veille, « business is business » ! Car, comme l’a fait remarquer Hubert Védrine, ancien chef de la diplomatie française, l’idée est bien de doper la croissance française en berne en allant chercher ailleurs, et notamment sur le continent africain, de nouvelles parts de marché. Imiter pour mieux concurrencer le modèle économique allemand, alors que la croissance française ne parvient pas à décoller. L’impérialisme, stade suprême du capitalisme, disait Lénine... et pour cela Hollande honore entièrement la mémoire de Charles Pasqua, reprenant le flambeau de son héritage françafricain et pour qui la « démocratie s’arrêt[ait] là où commence l’intérêt de l’Etat ».

Cameroun : remercier le fidèle Biya, adjudant de la lutte contre le terrorisme

C’est la visite rendue à Paul Biya, dirigeant du Cameroun depuis plus de trente ans, qui indispose le plus le chef d’État français. Forcé de remercier la coopération du Cameroun dans les opérations de libération des otages de Boko Haram, la position d’un Biya qui souhaite se reconduire à son poste en 2018 rend difficile la démarche. Non pas que le président français soit particulièrement mal à l’aise par la franche et notable usurpation du pouvoir de Paul Biya, mais ce dernier attend en retour de cette collaboration un soutien renouvelé à son pouvoir au Cameroun. Or, la stabilité de Biya n’est qu’une façade et une reconduite de sa candidature pour 2018 pourrait bien faire sortir la contestation dans les rues, situation qui indisposerait fortement le positionnement stratégique français sur le continent.

A quelques jours de la mort de Charles Pasqua, connu pour ses réseaux et ses activités françafricaines, dont certains journalistes français faisaient le symbole d’une page tournée dans les relations françafricaines, la visite de François Hollande vient confirmer qu’il n’en est rien. Au versant militaire de sa politique impérialiste, qui n’a rien à envier à ses prédécesseurs, le colonialisme français sous Hollande n’a pas non plus perdu la vigueur de ses relations incestueuses avec les dirigeants du continent africain : affairisme, combine militaire, et soutien aux pires dictateurs...


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