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Droit des femmes

IVG : grâce à l’appui du gouvernement, le Sénat annule l’allongement du délai légal

Grâce à l'appui de Agnès Buzyn, la droite a réussi à faire revoter l'allongement voté vendredi dernier et à faire retirer cet amendement. Une décision déplorable alors que la France est toujours en retard sur cette question.

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Alors qu’un amendement de loi prévoyant l’allongement de 2 semaines du délai légal de recours à l’IVG avait été adopté vendredi dernier par le Sénat, ce dernier fait marche arrière et rejette finalement la proposition d’amendement ce mardi suite à une manœuvre de l’alliance LREM-LR. Une fois de plus, une minorité au pouvoir composée majoritairement d’hommes décide de confisquer aux femmes le contrôle de leur corps au détriment de leur santé.

Une mesure minimale qui aurait pu améliorer le sort de milliers de femmes

La proposition d’amendement, défendue par la sénatrice socialiste Laurence Rossignol visait, à l’heure où le droit à l’IVG est largement attaqué à travers le monde, à permettre aux milliers de femmes qui subissent une grossesse non désirée et qui ont dépassé le délai légal aujourd’hui en vigueur de 12 semaines d’avorter jusqu’à la 14è semaine, comme c’est notamment le cas en Espagne.

Sous d’autres législations, le délai légal s’étend bien au-delà, jusqu’au double du délai français comme aux Pays-Bas où il est possible d’avorter jusqu’à la 24è semaine. C’est pourquoi, bien que l’IVG soit légal et gratuit en France jusqu’à 12 semaines de grossesse, de nombreuses femmes restent chaque année contraintes d’aller à l’étranger pour avorter. Dans un rapport de 2013, le Haut Conseil à l’Egalité (HCE) estimait qu’elles étaient 5000 à recourir à cette « solution », couteuse économiquement mais aussi physiquement et psychologiquement.
On peut également souligner que parmi les femmes concernées, bien que leur nombre soit difficile à estimer, certaines ne peuvent aller à l’étranger et sont alors contraintes de renoncer à l’avortement ou encore de s’exposer aux risques d’un avortement clandestin.

La disparité des législations quant au délai maximum pour avorter montre qu’il s’agit là d’une contrainte qui est politique avant d’être médicale. En effet, il est possible techniquement de réaliser un avortement à la fin de la 24ème semaine de grossesse, en France comme aux Pays-Bas. La limite fixée par la loi reste donc principalement le produit du jugement sexiste et paternaliste des membres du parlement et du gouvernement, reflétant des croyances qui restent largement répandues dans la société française selon lesquelles une femme qui veut avorter doit se sentir coupable de le faire et ne peut le faire que dans une certaine mesure, encadrée par le nombre toujours plus limité de centres IVG, le délai maximum arbitrairement fixé à 12 semaines ou encore la clause de conscience que les médecins peuvent encore invoquer pour refuser de pratiquer un avortement.

Parmi les mesures qui pourraient être facilement portées par le gouvernement du prétendu « quinquennat de l’égalité » et sa majorité à l’assemblée dont on a depuis longtemps compris qu’il ne fallait rien attendre, le Planning Familial revendique dans un communiqué publié ce mardi non seulement « l’allongement du délai légal pour pouvoir avorter » mais aussi « la suppression de la clause de conscience spécifique à l’avortement, la pratique de l’IVG instrumentale par les sages-femmes , des moyens financiers pour tous les centres IVG en métropole et dans les DROM ».

Ainsi, bien que minimale et insatisfaisante au vu de toutes les contraintes qui pèsent sur la santé des femmes en matière d’IVG, la mesure simple de l’allongement du délai maximum aurait pu permettre l’amélioration du sort de milliers de femmes. Mais le Sénat, composé à 66% d’hommes, en a décidé autrement.

Une alliance LREM-LR contre le droit des femmes à disposer de leur corps

Le 7 juin, à l’occasion de l’examen en première lecture du projet de loi santé dans un hémicycle habituellement déserté par une partie des sénateurs et sénatrices en fin de séance, Laurence Rossignol avait réussi à faire adopter l’amendement sur l’allongement du délai maximum, à douze voix « pour » et dix « contre ». D’autres amendements, comme la suppression de la clause de conscience ou l’avortement instrumental par les sages-femmes, avaient été rejetés la même séance. L’ensemble du texte devait être voté ce mardi.

Mais c’était sans compter sur la capacité de l’alliance LREM-LR à manœuvrer pour revenir sur cette décision. En effet, comme le rapporte Libération, la droite majoritaire au Sénat a utilisé une disposition prévue par le règlement du Sénat selon laquelle « avant le vote sur l’ensemble d’un texte, tout ou partie de celui-ci peut être renvoyé, sur décision du Sénat, à la commission, pour une seconde délibération à condition que la demande de renvoi ait été formulée ou acceptée par le Gouvernement. ».

La ministre de la santé Agnès Buzyn a donc donné son accord pour qu’une seconde délibération ait lieu au détriment de l’amendement adopté le vendredi, justifiant sa décision par les conditions de vote jugées « non satisfaisantes ». Ainsi l’amendement a finalement été rejeté, avec 205 voix « contre » et 102 « pour » et des milliers de femmes continueront d’aller avorter loin de chez elles dans des conditions plus difficiles que ne l’est déjà, en soi, cet acte médical sans cesse remis en cause à travers le monde.


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