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Grève générale contre Macron !

« Il faut des comités d’action partout » : le Réseau pour la grève générale appelle à s’organiser à la base

Raffineurs, égoutiers, énergéticiens, métallos : le réseau pour la grève générale organisait, mardi 21 mars, sa troisième rencontre, qui a réuni plus de 300 personnes. Le but, coordonner et amplifier les secteurs en grève reconductible, faire face à la répression, mettre en place des comités d’action dans tout le pays.

Arthur Nicola

22 mars 2023

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« Il faut des comités d'action partout » : le Réseau pour la grève générale appelle à s'organiser à la base

Crédits photo : Révolution Permanente

A la Flèche d’Or, près de la porte de Bagnolet, comme dans la réunion en distancielle organisée simultanément, l’ambiance était à la généralisation de la grève ce mardi soir. Lors de la précédente réunion, les discussions s’étaient centrées sur la nécessité d’une grève marchante, et de la préparation des grèves reconductibles pour le 7 mars. Depuis, la situation a radicalement changé. « Il y a un saut dans la crise politique, explique en introduction Adrien Cornet, de la CGT Total Grandpuits. On pourrait basculer dans une situation prérévolutionnaire, avec des actions qu’on n’imaginait pas comme des syndicalistes CFDT qui brûlent des marionnettes à l’effigie du gouvernement à Dijon, ou encore des milliers de personnes qui sont allés à la Concorde en disant qu’ils ne voulaient pas rentrer chez eux ».

Depuis, la situation a radicalement changé. Près d’une vingtaine de secteurs ont entamé la réunion par des comptes rendus de l’état du mouvement dans leurs secteurs et entreprises : RATP, SNCF, éboueurs et égoutiers, centrales nucléaires (Paluel et Nogent-sur-Seine), de RTE, Enedis, de la métallurgie comme Airbus, Sidel, Safran, Stellantis/PSA, de l’aéroport de Roissy et Orly, de Sanofi, de Saint-Gobain, de l’éducation et évidemment de la jeunesse. Dans tous les secteurs, c’est une radicalisation du mouvement qui s’exprime, avec de plus en plus de secteurs en reconductible, la pointe avancée étant chez les éboueurs, raffineurs et énergéticiens. Si dans certaines entreprises, les grèves reconductibles ne sont pas encore majoritaires, tous ont fait part de la colère grandissante post 49.3. « Le 49.3 a déclenché la mise en œuvre de nouveaux secteurs et personnels qu’on aurait jamais pensé voir entrer dans un mouvement social. On est dans une phase exceptionnelle que je n’ai jamais connue en 22 ans de boîte : on est dans une phase insurrectionnelle et il était temps », se félicite Cédric Liechti, de la CGT énergie Paris. Même son de cloche chez tous les intervenants, la grève reconductible, et le regain de radicalité ont changé la situation en quelques jours seulement.

« On peut gagner ! » : voilà l’un des changements forts dans la mobilisation. Une cheminote explique qu’il y a un changement subjectif chez les grévistes : on est passé d’un moment où les gens font grève « parce qu’il faut résister », à une grève « où l’on peut gagner ». Adrien Cornet de la CGT Total poursuit : « Face à cette situation, on a une intersyndicale qui nous propose la stratégie de la défaite : des grèves isolées semaines après semaines. Face à la grève des profs, Laurent Berger et Martinez disent qu’il ne faut surtout pas déranger le bac. »

Mais personne dans cette réunion de grévistes et dirigeants syndicaux ne sous-estime les difficultés. Un des obstacles principaux réside évidemment dans la répression policière des manifestations, et dans les réquisitions des grévistes qui écrase le droit de grève. Face à cela, l’appel du réseau est clair : « constituer un vaste réseau de solidarité capable de faire face à la répression », notamment par des rassemblements systématiques devant les commissariats lors des interpellations, ou devant les usines en cas de réquisitions préfectorales des grévistes.

« En face, ils sont très organisés, ils ont leur bras armé, comme on a vu à Fos-sur-Mer ». Pour les grévistes de la centrale nucléaire de Nogent, le constat est clair : « à chaque fois qu’il y a eu la force du nombre, on les a fait reculer, il faut qu’on soit dix fois, cent fois plus nombreux et qu’on leur résiste, même s’ils nous mettent des coups ! ». Idem pour Alexis Antonioli, de la raffinerie de Normandie : « Face aux réquisitions, il n’y a qu’une réponse : la masse devant les usines, pour les empêcher ».

D’où l’importance des piquets de grève pour assurer la poursuite du conflit face à toutes les formes de répression, pour tenir les blocages et pour organiser la convergence. Guillaume, égoutier à la mairie de Paris, témoigne ainsi de la force reçue par les éboueurs, devant le blocage des TIRU où se rencontrent des étudiants, des chômeurs, des retraités, des grévistes, déterminés à venir en aide aux éboueurs réquisitionnés. Charles Carlhant, secrétaire général de la CGT EDF de Nogent appelle ainsi à ce que ces piquets « deviennent des QG de grève, auxquels chaque secteur puisse relier ».

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Cette radicalisation dans les méthodes de lutte amène aussi une radicalisation des revendications. Face à un régime aux abois, dont la brutalité ne reflète que la faiblesse, tout le monde sent qu’il est possible d’obtenir beaucoup plus que le retrait de la réforme des retraites. Une évidence pour Guillaume, égoutier à la ville de Paris : « On se bat contre quoi ? Contre cette réforme des retraites ? Mais après ? On se bat contre la précarisation de la classe ouvrière et des classes populaires ! ».

Pour Cédric Liechti, les jours et les semaines que nous vivons sont l’occasion de partir à la « reconquête sociale » : « Il va falloir gagner des semaines de congés payés, la retraite à 60 ans pour tous, 55 ans pour les métiers pénibles, sans condition d’annuités, pour les femmes, pour les plus précaires. » Et parmi ces secteurs précaires figurent évidemment les travailleurs immigrés, qui se cassent le dos dans les métiers les plus ingrats, et qui sont condamnés à bosser jusqu’à la mort, ne pouvant atteindre le nombre d’annuités requis pour une retraite à taux plein. La marche contre la loi immigration de Darmanin ce 25 mars doit permettre de fêter la première victoire du mouvement, et de grossir le rapport de force pour enterrer définitivement le projet. Elle doit plus généralement être l’occasion d’exprimer la solidarité du mouvement ouvrier envers les migrants qui meurent à cause de l’Europe forteresse. 

Finalement, après avoir évoqué la lutte nécessaire contre la répression, les manières d’étendre la grève, notamment en alliant extension des revendications et travail militant en allant chercher les secteurs qui ne sont pas encore en reconductible, se pose la question de la manière de faire peser ce réseau dans la poursuite du mouvement. « Ce réseau pour la grève générale doit être un réseau interprofessionnel, de jeunes, d’artistes et d’intellectuels où chacun met ses positions au service de la lutte des classes pour faire plier ce gouvernement ! » lance ainsi Anasse Kazib du triage du Bourget à Paris Nord : « Berger & Cie, l’intersyndicale, ce qui se passe en ce moment, ça ne leur plaît pas. Ils vont chercher la première brèche pour se sauver, et on va devoir aller ramasser nos camarades devant les dépôts, les raffineries, les technicentres etc. Alors pour éviter ça, il faut commencer à se préparer à construire ce réseau pour la grève générale, avec des comités d’actions partout, dans tout le pays. Il faut qu’on vise à construire une réelle coordination interprofessionnelle, qui organise tous les secteurs en grève, avec une direction qui veut réellement aller jusqu’au bout ! »

Ces comités d’action sont une perspective aussi concrète qu’urgente, pour rassembler dans toutes les localités, les travailleuses et les travailleurs déterminés à lutter à la hauteur de ce qu’exige la situation. Ce réseau pour la grève générale qui rassemble pour le moment quelques centaines de travailleurs, de syndicalistes, doit désormais s’étendre dans tout le pays pour construire la généralisation de la grève !


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Arthur Nicola

Journaliste pour Révolution Permanente.
Suivi des grèves, des luttes contre les licenciements et les plans sociaux et des occupations d’usine.
Twitter : @ArthurNicola_

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