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Depuis plusieurs mois, la crise économique sur fond de guerre en Ukraine plonge les classes populaires dans une situation de précarité inédite tandis que la grande majorité des entreprises du CAC40 profitent de cette situation exceptionnelle, de la crise de la Covid à la crise énergétique, pour engranger des profits records.

Si le gouvernement annonce des taux d’inflation aux alentours de 6% et se félicite de l’efficacité du bouclier tarifaire, la réalité est tout autre pour les classes populaires. En effet, le prix des biens de première nécessité comme les pâtes, l’huile, la viande ou encore le café, enregistrent des taux d’inflation supérieurs à 15% qui pénalisent en premier lieu les ménages les plus modestes.

Face à l’inflation, les étudiants contraints d’activer le mode « survie »

Une situation qui n’épargne pas une grande partie des étudiants, pour qui ces produits constituent le cœur des dépenses quotidiennes, et qui vient aggraver une précarité déjà importante. A la rentrée, la hausse du coût de la vie étudiante a ainsi été estimée entre 6 et 8% selon les syndicats UNEF et FAGE. Déjà en 2019, l’immolation d’Anas avait brutalement mis en lumière un état de détresse dans les couches les plus populaires de la jeunesse face à des aides sociales et des conditions de vie extrêmement dégradées. Dans la foulée, alors que confinement avait poussé 36% des étudiants à interrompre leur activité selon la DARES – équivalant à une baisse de 274 euros mensuels en moyenne – les banques alimentaires ont permis à des centaines d’étudiants de manger pendant que l’Etat appliquait la baisse des APL et fermait les universités.

Dans ce cadre, la très forte inflation sur les produits de première nécessité pose, à une échelle plus large encore, la question de la précarité et même de la survie pour nombre d’étudiants. « Étant donné que même les pâtes ont augmenté, je ne sais pas ce que je vais manger » témoigne Agathe dans les colonnes de FranceInfo. « Toute l’année, j’ai mangé un repas par jour, voire un tous les deux jours. J’ai fait les poubelles à Aix pour manger » relate un autre à France 3.

Mais l’alimentation n’est pas le seul poste de préoccupation des étudiants. En effet, la crise énergétique va plus fortement impacter les logements insalubres et mal isolés, autrement dit les logements étudiants. Tandis qu’Elisabeth Borne annonçait la fin progressive du bouclier tarifaire et l’augmentation des factures d’électricité pour janvier 2023, de nombreux jeunes sont contraints d’abandonner leurs domiciles faute de moyens pour supporter ces hausses : « Certains étudiants dorment dans leur voiture, ou occupaient le local du foyer, quand il était encore ouvert », alerte Youssef Ben Said, membre de l’Association des résidents de Nanterre au Monde.

Le gouvernement continue les attaques, précarisant toujours plus les étudiants

Comme il l’avait fait pendant la pandémie avec l’approfondissement de la sélection à l’université et la baisse des APL, l’exécutif accélère le train des réformes contre les étudiants pour leur faire payer la crise.

A l’automne, Sylvie Retailleau ouvrira notamment une période de concertation sur les bourses et allocations étudiantes. Un projet d’attaque qui vise a priori à réduire le périmètre des bénéficiaires et à réduire les montants alloués, et qui s’inscrit dans le cadre d’une politique généralisée de durcissement des conditions d’accès aux allocations à l’instar des réformes du RSA et de l’allocation-chômage.

En outre, la crise énergétique est une opportunité pour accélérer la cure austéritaire alors que le manque de moyens est déjà structurel dans l’enseignement supérieur. Les fermetures administratives cet hiver comme à Strasbourg, l’interruption des recherches doctorales jugées trop "coûteuses" en énergie, ou la banalisation du passage au distanciel de certains enseignements, ne sont finalement que la mise en œuvre des politiques expérimentées pendant le confinement afin de réduire les coûts sur le dos des étudiants et du personnel.

Plus profondément, la période de crise économique rend d’autant plus pressant pour les classes dominantes la poursuite des réformes structurelles dans les universités. La généralisation de Parcoursup en Master ou la hausse des frais d’inscription s’inscrivent ainsi dans le cadre d’un projet plus structurel pour les universités, comprenant une adaptation accrue des enseignements aux besoins des entreprises, l’intégration poussée du privé aux organismes décisionnaires et une baisse des budgets de l’enseignement et de la recherche dans la continuité de la LPR. Dans ce cadre, les universités constituent un des terrains d’offensive majeur pour Macron qui compte bien laisser son empreinte pour ce second quinquennat, ce qui augure une offensive dédoublée contre les étudiants.

Imposons un programme d’urgence pour pouvoir étudier dans des conditions décentes !

Dans cette situation, il y a urgence à imposer un programme pour que les étudiants puissent faire face à la précarité et à la crise économique que le gouvernement veut leur faire payer.

Alors que l’inflation frappe les travailleurs et les classes populaires, une vague de grève a débuté avant l’été dans de nombreuses entreprises pour arracher des augmentations de salaire, et se développe aujourd’hui dans des multinationales comme TOTAL ou ExxonMobile. La majorité des étudiants sont bien entendus directement concernés par la question, eux qui soit travaillent en parallèle de leurs cours, soit travailleront demain.
Révolution Permanente fait campagne pour une augmentation de 400 euros de tous les salaires, pensions, minimas sociaux et bourses étudiantes, mais aussi pour leur indexation sur l’inflation pour qu’ils suivent l’augmentation des prix. Pour aboutir à ces revendications, nécessaires pour mettre fin à la baisse brutale du niveau de vie des travailleurs et des classes populaires, nous avons besoin d’engager un vrai combat avec un plan de bataille national contre le gouvernement et le grand patronat, auquel prennent part les salariés et les jeunes.

Instauration d’un revenu étudiant à hauteur du SMIC financé par un impôt fortement progressif sur les grandes fortunes

L’augmentation immédiate des salaires et des bourses pour toutes et tous est un impératif d’urgence, mais cela n’est pas suffisant pour s’attaquer à la précarité étudiante. De fait, les jeunes qui travaillent pour payer leurs études sont en grande majorité issus des classes populaires et souffrent du décrochage scolaire en raison de leurs horaires professionnelles. Dans ce cadre, il s’agit également d’imposer la création d’un revenu étudiant pour qu’aucun jeune n’ait plus à travailler pour payer ses études.

Mais derrière cette revendication peut se cacher différentes réalités : selon le financement, les conditions d’accès, et le montant, l’objectif politique d’une telle allocation varie. Par exemple, le Parti Socialiste propose un élargissement du RSA aux jeunes dès 18 ans, EELV plébiscite une refonte des aides préexistantes (bourses étudiantes, allocations de logement social, détachement du foyer fiscal parental), et LFI propose un revenu sous condition de poursuite d’étude.

Dans tous les cas, ces revenus tendent à être un cache misère dans le meilleur des cas, voire à consacrer la précarité étudiante car en se situant systématiquement en dessous (PS, EELV) ou au niveau (LFI, UNEF) du seuil de pauvreté. A rebours de cette conception, nous revendiquons l’instauration d’un revenu étudiant sans condition à hauteur du SMIC et indexé sur l’inflation afin qu’aucun jeune n’ait à vivre sous le seuil de pauvreté et ait à travailler pour financer ses études. Et pour que ça ne soit pas aux classes populaires de financer par l’impôt le revenu de leurs propres enfants, cette mesure doit s’appuyer sur un impôt fortement progressif sur les grandes fortunes afin que ce soit au patronat de payer.

Ceci est une condition fondamentale pour pouvoir revendiquer une université véritablement ouverte à toutes et tous, où les plus précaires ne sont pas broyés par le rouleau-compresseur de la sélection à cause de l’exploitation qu’ils subissent au travail.

Exproprier les grands groupes de l’énergie

Le fait que des étudiants aient à dormir dans des logements insalubres voire même dans leurs voitures pour pouvoir survivre avec des revenus extrêmement maigres est inacceptable. Face à la crise énergétique, ce sont encore une fois les habitants des logements mal isolés qui vont devoir payer la facture pendant que les patrons d’EDF, TOTAL et ENGIE s’en mettent plein les poches.

Le problème du logement étudiant ne date pas de la crise énergétique. Le fait que des étudiants aient à dormir dans des logements insalubres voire même dans leurs voitures pour pouvoir survivre avec des revenus extrêmement maigres est inacceptable. En France en 2021, l’INSEE recensait 3 085 000 logements vacants. Ces derniers doivent être réquisitionnés pour que les étudiants sans domicile fixes ou dans des logements insalubres puissent avoir un toit. Les expulsions doivent cesser et les loyers doivent être bloqués.

Pour ne pas payer la crise énergétique, Révolution Permanente fait campagne pour que ces grands groupes énergétiques soient expropriés, et placés sous le contrôle direct des travailleurs et de la population. D’une part pour pouvoir mettre fin à une hausse effrénée des prix et des profits, d’autre part parce que c’est la condition première pour pouvoir réduire massivement la production d’énergie fossile en convertissant ces énormes capacités industrielles au service de la planification d’une véritable transition énergétique, ce sans quoi la catastrophe climatique va empirer.

C’est la condition pour pouvoir se chauffer correctement cet hiver sans avoir à payer des factures qui vont pousser des milliers de jeunes et de travailleurs à la sous-nutrition voire à la rue, comme c’est déjà le cas d’étudiants trop précaires pour pouvoir supporter les charges énergétiques et les loyers trop élevés.

Ces mesures attaquent directement les intérêts du grand patronat et pour pouvoir les obtenir il faudra les imposer à ce dernier. Alors que la crise économique s’intensifie, les grands patrons sont à cran pour pouvoir augmenter leur marge de profit et refusent de donner même des miettes aux classes populaires.

C’est par la mobilisation et le rapport de force, qu’on devra leur arracher le droit de vivre dignement. Cette lutte n’est pas étrangère à celle du monde du travail qui se bat dans de nombreuses entreprises pour augmenter ses salaires qui sont rongés par l’inflation. En réalité, les étudiants précaires sont dans une situation similaire à des couches non négligeables de la population qui travaillent en 35h pour un SMIC et n’arrive plus à manger à leur faim.

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