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Néocolonialisme

« Islamisme radical », « délinquance » : les mensonges racistes de Darmanin pour défendre Wuambushu

Ce jeudi 20 avril, Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur et des Outre-Mer a confirmé la tenue de l’opération « Wuambushu » à Mayotte. Mobilisant une rhétorique raciste et néocoloniale, il cherche à justifier ce qui s’apparente de plus en plus à une opération militaire.

Maëva Amir

21 avril 2023

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Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur et des Outre-Mer a confirmé l’opération « Wuambushu » à Mayotte dans un entretien donné au Figaro ce jeudi 20 avril. Au programme : un ramassis d’arguments racistes et néocoloniaux pour justifier ce qui apparaît de plus en plus comme une opération militaire aux allures coloniales. Rappelons qu’avec cette opération qui devrait démarrer lundi, le gouvernement français prévoit de détruire des quartiers entiers, délogeant y compris des Mahorais, mais il prévoit aussi d’expulser environ 400 personnes sans-papiers par jour, principalement des Comoriens, vers l’île d’Anjouan. En l’espace de deux mois c’est plus de 24 000 personnes en qui pourraient être expulsés.

Pour justifier une telle opération de déportation et destruction de l’habitat informel, Gérald Darmanin utilise un procédé bien connu de la droite, de l’extrême-droite et de l’Etat, et allègrement mobilisé par le macronisme récemment : la criminalisation des personnes immigrées. Les quartiers visés par l’opération seraient des « refuges aux bandes criminelles, au recel d’objets volés et à tous les trafics ». Les nombreux jeunes immigrés sans-papiers déscolarisés seraient directement liés à des « réseaux criminels » avec une « quarantaine de bandes criminelles organisées » qui sont directement désignés par le gouvernement comme les principaux responsables du climat de tension sur l’île.

Pourtant, la situation sociale dramatique de l’île où près de 80% des habitants, mahorais compris, vivent sous le seuil de pauvreté, n’est en aucun cas la responsabilité de ceux qui pour la plupart arrivent à Mayotte pour fuir la misère de leurs pays d’origine. Le véritable responsable de cette situation c’est l’État français qui entretient et nourrit la pauvreté sur le territoire. En durcissant constamment l’accès aux titres de séjour et à la nationalité française pour les étrangers à Mayotte comme en 2018 avec le durcissement du droit du sol, l’État fabrique délibérément des sans-papiers et plonge ces jeunes dans des situations de précarité extrême.

De plus, le ministre de l’Intérieur utilise également une rhétorique islamophobe nauséabonde en mobilisant l’idée selon laquelle « l’islamisme radical » serait une menace à Mayotte. « N’oublions pas que nous sommes à Mayotte, près de l’Afrique des Grands Lacs, menacée par l’islamisme radical » affirme Darmanin. L’argument du « péril islamiste » n’est pas nouveau et a été constamment mobilisé ces dernières décennies pour justifier les opérations militaires extérieures de la France, notamment en Afrique. Aussi, Darmanin oppose un islam plus « modéré » à Mayotte que dans le reste de l’archipel des Comores, mobilisant là aussi un argument historique développé par l’État français pendant la colonisation du territoire comorien pour diviser l’archipel.

Derrière ces procédés, Darmanin cherche à cacher une opération militaire. Lors de la dernière visite en décembre dernier, le ministre de l’Intérieur revendiquait déjà le fait qu’il y ait deux fois plus de policiers à Mayotte qu’à Lyon qui compte pourtant sept fois moins d’habitants. Avec cette opération c’est un cap qui promet d’être franchi puisque ce sont « quatre escadrons de gendarmes mobiles, des policiers de la CRS 8, spécialistes de la lutte contre les violences urbaines, au total 510 membres des forces de l’ordre » qui sont envoyés pour mener l’opération en plus du Raid et du GIGN déjà présents sur place. Darmanin revendique la militarisation accrue de l’île et confirme par ce biais l’aspect militaire de l’opération.

Avec ces renforts policiers, Darmanin entend également « lutter contre l’habitat insalubre » c’est-à-dire détruire des quartiers entiers au motif qu’ils serviraient de « refuges aux bandes criminelles ». Ce sont donc bien des Comoriens mais aussi des Mahorais qui risquent de se retrouver à la rue avec cette opération.

Par ailleurs, au-delà de l’opération, le premier ministre revendique fièrement les expulsions massives jusqu’à 5 000 l’an dernier et évoque une nouvelle fois la possibilité d’aller encore plus loin dans son offensive xénophobe. « J’ai proposé d’aller plus loin : pour devenir Français à sa majorité, les deux parents du demandeur doivent être en situation régulière depuis plus de neuf mois à sa naissance. » Cette mesure viendrait renforcer toutes les mesures d’exceptions déjà en vigueur à Mayotte pour mener une chasse constante aux étrangers et les expulser massivement.

Gérald Darmanin vient confirmer par cet entretien que c’est bel et bien une opération militaire qui se prépare sur l’île. L’objectif de cette opération n’est absolument pas d’apporter des solutions aux problèmes de l’île et de la population sur place mais de conserver les intérêts de la France dans la région. Cette opération aura des conséquences dramatiques et viendra encore aggraver les conditions de vie des Mahorais et des Comoriens. Il y a urgence à ce que l’ensemble du mouvement ouvrier doit s’opposer frontalement à cette opération militaire et exiger la régularisation immédiate de tous les sans-papiers.

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