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Violences d'État

« Je me suis réveillé avec le crâne ouvert, l’arcade et le poignet cassés » : témoignage de Rémy, 21 ans

Après être allé en garde à vue une première fois en janvier, Rémy, 21 ans, s'est fait interpeller le 23 mars lors d'une manifestation à Marseille. Nous publions ci-dessous son témoignage dans le cadre de la campagne contre la répression lancée par Le Poing Levé.

Le Poing Levé

14 mai 2023

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« Je me suis réveillé avec le crâne ouvert, l'arcade et le poignet cassés » : témoignage de Rémy, 21 ans

Crédits photo : Hubert2T

Ce témoignage a été recueilli dans le cadre de la campagne anti-répression menée par le collectif jeune de Révolution Permanente, Le Poing Levé. Pour y participer également et témoigner, vous pouvez remplir ce formulaire.

Dans le cadre de cette campagne, nous avons recueilli le témoignage que nous publions ici de Rémy, un livreur de 21 ans, qui a été interpellé violemment lors d’une manifestation sauvage à Marseille, le 23 mars. Procès à venir en octobre, interdiction de manifestation, relevé d’empreinte, hématome intracrânien, poignet et arcade cassés, lèvre ouverte… voilà ce qu’aura couté à Rémy le fait de s’être mobilisé contre la politique du gouvernement.

Le Poing Levé : Bonjour, merci de nous accorder ton témoignage. Peux-tu commencer par te présenter et nous dire si tu t’étais déjà mobilisé contre la réforme des retraites avant ton arrestation ?

Je m’appelle Rémy, j’ai 21 ans et je suis livreur. Quelques mois avant mon arrestation le 23 mars, le 19 janvier, j’avais déjà été interpellé lors de la première manifestation. Il était midi et pendant un mouvement de foule, dû à une charge de CRS, un policier m’a mis une balayette. Quatre policiers se sont mis sur moi et m’ont coupé la respiration. J’ai fait 18 ou 19 heures de garde à vue, pris 450 euros d’amende et un stage de citoyenneté obligatoire d’une journée et pour lequel je vais devoir payer 100 euros.

Peux-tu nous expliquer comment s’est déroulée ton arrestation le 23 mars ?
Nous étions à peu près 300 personnes en manifestation sauvage, après la manifestation appelée par l’intersyndicale le 23 mars. On venait d’arriver à la Plaine à Marseille, il y avait un feu de poubelle sur la place. J’étais à l’arrière de la manif’ et je n’ai pas bien réalisé ce qu’il se passait sur le moment, il y a eu un mouvement de foule et, tout d’un coup, tout le monde a commencé à courir. De nombreux CRS venaient d’arriver. Donc j’ai couru avec tout le monde. J’ai essayé de bifurquer dans une rue adjacente et à partir de ce moment j’ai un trou de mémoire, j’ai perdu connaissance. Je me suis réveillé 5 ou 10 minutes après, avec le crane ouvert à l’arrière, la lèvre ouverte, l’arcade pétée, le poignet cassé. Aujourd’hui j’ai 3 cicatrices dessus. Je me souviens que, sur le moment, je pouvais voir mon os.

Lorsque j’ai repris connaissance, les policiers étaient en train de me trainer sur le sol. Ils m’ont emmené directement au commissariat, sans passer par l’hôpital. D’après eux, je me serais pris un mur et j’aurai perdu connaissance. Ils m’ont dit que j’avais lancé une bouteille en verre sur un des policiers. Face à ces accusations, j’ai préféré garder le silence, tellement cela me paraissait incompréhensible. Mes amis qui étaient présents m’ont dit après coup que, lorsque j’ai bifurqué, je suis tombé sur des policiers qui m’ont assené plusieurs coups de matraque, des coups de genoux dans la tête etc.

Comment s’est passée ta garde à vue ?

Pendant que j’étais en cellule de dégrisement, lors des deux premières heures, j’ai fait des chutes de tensions, j’avais des petits évanouissements toutes les 10 minutes. J’avais toujours le crâne ouvert à l’arrière, et le sang qui continuait à couler. J’ai dû toquer aux barreaux pour avoir un médecin, qui est venu au bout de 3 heures. Ensuite la police m’a emmené à l’hôpital, où j’ai passé la nuit. Je suis sorti de l’hôpital vers 11H, avec 14 agrafes dans la tête, une entorse sur deux doigts, des plaies béantes au poignet et un hématome intracrânien. C’est-à-dire que j’avais du sang qui coulait à l’intérieur de mon crâne. J’aurai dû rester en observation à l’hôpital trois jours. Mais directement la police m’a emmené voir le médecin légiste, qui a dit que je n’étais pas en état d’être placé en garde-à-vue.

Après ça, les policiers m’ont donné une convocation au commissariat. Lorsque j’y suis retourné une dizaine de jours plus tard, j’ai été placé en cellule pendant une heure. Ils ont appelé la magistrate. Celle-ci a décidé de prolonger ma garde à vue et a décidé que je sois déféré à la prison des Beaumettes le lendemain. Après quelques échanges, la magistrate a finalement décidé de me faire sortir. C’est là que j’ai appris que j’aurai un procès en octobre.

Comment te sens-tu après ta garde à vue ? Ton rapport à la police a-t-il changé ?

Aujourd’hui, je sais que je vais avoir du mal avec la police pour un certain temps. Pourtant mon père est policier et je n’avais aucun problème avec ce corps de métier. Mais ce mouvement a montré une violence policière tellement importante, que ça a changé ma vision de la police. J’ai de l’incompréhension, de la colère, le sentiment qu’ils font n’importe quoi. Ayant été confronté à leur discours, j’ai l’impression maintenant que le commissariat est une cour de récréation pour les policiers et qu’ils cherchent à ce que tout parte en vrille. En attendant, je suis interdit de manifestation. Mais je vais continuer à me mobiliser contre la réforme des retraites.


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