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L’État à l’offensive sur tous les fronts pour organiser un durcissement de la répression

À la veille de l’Acte XII, le secrétaire d’État au ministère de l’Intérieur Laurent Nuñez défend une utilisation jugée « proportionnée » des lanceurs de balle de défense (LBD). Peu après dans la journée, la CGT et la Ligue des Droits de l’Homme (LDH) qui avaient saisi le Conseil d’État pour faire interdire l’usage de ces armes au cours des manifestations ont vu leur demande rejetée. Au même moment, une loi « anti-casseur » éminemment répressive est en train d’être votée. L’État est donc à l’offensive sur tous les fronts pour organiser le durcissement de la répression.

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Alors que la répression des Gilets Jaunes a tué Zineb Redouane et fait au moins 152 blessures à la tête, 17 personnes éborgnées, et 4 mains arrachées, d’après le rescencement de David Dufresne, le mouvement se maintient et les mobilisations dénonçant ouvertement les violences perpétrées par l’État prennent de l’ampleur. On peut citer ici l’organisation de Gilets jaunes en collectif contre la répression à Bordeaux ou encore le lancement d’une pétition contre l’utilisation des LBD par un collectif de médecins. L’usage du LBD est coeur de la polémique car — servant notamment au tir de balles en caoutchouc, assourdissantes, lacrymogènes ou fumigènes — est à l’origine de nombreuses blessures graves : récemment sur une figure du mouvement Jérôme Rodrigues le 26 janvier dernier mais elle a également causé un coma à Bordeaux. C’est dans ce contexte qu’intervient l’offensive répressive en cours, révélant la nécessité pour l’État de se radicaliser pour maintenir son hégémonie.

Invité sur RTL vendredi matin, Laurent Nuñez estime que le LBD est « fondamental » au maintien de l’ordre. Il explique selon une logique plus que douteuse que l’utilisation de cette arme est « proportionnée », en avançant le nombre de 9000 tirs au LBD depuis le mois de novembre, comme argument. Déniant le caractère extrêmement dangereux voire potentiellement mortel de cette arme, Nuñez joue le refrain habituel du "deux poids deux mesures" en présentant la répression d’État comme une réponse juste et nécessaire face aux « exactions extrêmement violentes commises contre les policiers ». Mais qui est encore dupe ?

Le Conseil d’État, sans surprise, l’est : il a confirmé ce même vendredi 1er février le droit des policiers à mutiler. En effet, le juge des référés du Conseil d’État a tout simplement rejeté les demandes opérées par la CGT et la LDH visant à interdire l’usage de LBD lors des manifestations de Gilets Jaunes. En effet, en refusant de reconnaitre le lien direct de causalité entre l’utilisation du LBD et les blessures « parfois très graves » constatées, la plus haute juridiction administrative estime elle aussi que les « actes de violence et de destruction » perpétrés durant les manifestations justifient un droit de la police à mutiler.

Sur le plan législatif, l’adoption d’une loi dite « anti-casseurs » est en cours depuis mercredi. Si le texte final ne sera voté que mardi 5 février, certaines dispositions ont déjà été adoptées. Notamment, les députés ont voté la possibilité pour les préfets d’interdire à des personnes de manifester via un arrêté alors qu’une telle prérogative était jusqu’ici réservée à un juge via une condamnation judiciaire. En outre, si la loi passe, il existera un délit de dissimulation du visage lors des manifestations, passible d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 15 000€ d’amende.

Ainsi, une offensive est à l’œuvre sur les plans exécutif, juridique et législatif pour augmenter encore le niveau de répression. Tout comme l’intervention de Nuñez et la décision du Conseil d’État, le texte de loi qui est toujours en discussion et divise jusque dans la majorité témoigne de la détermination de Macron et son monde : il s’agit d’étouffer le mouvement en dissuadant les manifestants de descendre dans la rue mais aussi en divisant ces derniers sur la question de la violence, entre des "casseurs" et des manifestants qui seraient davantage "légaux" car respectueux du cadre imposé par l’État. Il s’agit de ne pas tomber dans le piège de cette opposition binaire et de dénoncer la violence systématiquement perpétrée par l’État contre la classe ouvrière au sens large, sous une forme symbolique mais aussi physique à travers la police qui est son bras armé. Comme le disait le brésilien Helder Camara : «  Il y a trois sortes de violence. La première, mère de toutes les autres, est la violence institutionnelle, celle qui légalise et perpétue les dominations, les oppressions et les exploitations, celle qui écrase et lamine des millions d’hommes dans ses rouages silencieux et bien huilés. La seconde est la violence révolutionnaire, qui naît de la volonté d’abolir la première. La troisième est la violence répressive, qui a pour objet d’étouffer la seconde en se faisant l’auxiliaire et la complice de la première violence, celle qui engendre toutes les autres. Il n’y a pas de pire hypocrisie de n’appeler violence que la seconde, en feignant d’oublier la première, qui la fait naître, et la troisième qui la tue. »

Crédit photo : Andrés Felipe
Un de ses albums à Toulouse


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