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La Poste. Face à la précarité : stop à l’intérim, un CDI pour tous !

Chez La Poste, après la privatisation de la société qui effectue un service public, la nouvelle géométrie des contrats permet au groupe de bénéficier d'une main d’œuvre plus malléable. Des logiques salariales qui permettent en réalité à la société de diviser le personnel et les précariser encore plus. Un intérimaire témoigne.

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Crédit photo : Mychele Daniau AFP / Archives
(Un centre de tri de la Poste dans le Calvados, le 26 novembre 2008)

Bien que La Poste soit une société privée avec une mission de service public, ce ne sont que quelques anciens qui bénéficient encore d’un statut de fonctionnaire. Avec le temps, même les CDI La Poste en contrat privé se font de plus en plus rares. Rien que pour la branche courrier, ce seraient 30 à 40 % des postiers qui seraient en contrats précaires selon Sud PTT, enchaînant CDD à répétition et contrats en intérim : qu’il s’agisse d’intérim, CDI intérim (3 ans), contrats GEL, contrats senior, contrat à fin d’employabilité, alternance avec intérim à la suite...Des contrats faits sur-mesure qui permettent au groupe de bénéficier d’une main d’œuvre plus précaire et corvéable.

Une précarité qui bénéficie à l’entreprise pour masquer les accidents du travail, mettre de côté les employées souhaitant avoir des enfants, les personnels souffrant de problèmes de santé empêchant ainsi les précaires qui ne peuvent lutter sans craindre de se faire congédier. Tout cela est renforcé par l’externalisation d’une partie des fonctions de tri et de distribution du courrier et des colis.

Un statut précaire qui tend à dégrader les conditions de travail, les CDD et intérimaires cherchant souvent à maximiser leurs cadences pour se faire embaucher et qui les contraint à supporter des situations inacceptables. Utiliser ces travailleurs « jetables » pèse aussi sur les CDI, entraînant des accidents, des arrêts de travail dus à la surcharge de travail (rattraper des erreurs, méconnaissance des tournées des débutants précaires).

Crédit photo : DR

Former un salarié prend du temps que l’entreprise n’accorde peu : cette organisation, qui ne donne aucun espace à la formation, se ressent sur la perte de qualité de la distribution. Chaque centre local de La Poste dispose en effet d’un quota de contrats CDI, situation qui bloque de manière absurde les contrats en CDI. Comment avoir une qualité de service public tout en ayant des travailleurs jetables ?

Nous avons interrogé un intérimaire qui témoigne : « Alors l’entreprise propose des "pseudos" CDI au sein d’entreprises partenaires extérieures ou CDI intérim comme une alternative au quota, mais en réalité nous avons toujours plus de travailleurs précaires. La proposition de CDI intérimaire, signifie qu’une fois la mission à La Poste terminée (pour une durée maximum de 36 mois), la boite d’intérim peut nous reclasser ailleurs, surtout dans les catégories « des emplois non désirés » dans des domaines complètement différents (industrie, commerce, logistique). Ce type de contrat nous promet des mutations continuelles, toujours de nouvelles formations sur le tas, c’est l’éternelle précarisation. Le temps d’adaptation, de formation, d’intégration à une entreprise est à associer à une menace de la quitter à tout moment et de devoir commencer à nouveau le processus d’intégration ailleurs. Nous n’avons donc aucune stabilité.  »

Cette situation de turn-over peut se ressentir par les usagers, notamment dans les territoires les plus isolés, les facteurs changeant continuellement et n’ayant pas le temps de retenir l’ensemble des adresses, ce qui peut amener des erreurs. « Nous n’avons plus le temps de discuter, d’écouter, de prendre des nouvelles des usagers, souvent des personnes âgées et isolées qui n’ont que ce contact avec le facteur pour sortir de leur isolement. Depuis que la Poste est une société privée, pour la direction, il s’agit de client, alors que pour nous, les travailleurs, en tant que mission de service public, ce sont des usagers ! ». Une logique marchande qui a amené La Poste à faire payer ce service aux familles pour visiter ou discuter avec leurs proches « ce que nous ferions de bon cœur si nous avions le temps ! ». Enfin, précise-t-il, « la réduction de postes rend les tournées de plus en plus grandes ce qui entraîne une distribution de courrier tardive. »

Une logique infernale qui permet de monter les uns contre les autres : « Il y a une incertitude constante qui est pesante, une mise en concurrence entre les travailleurs, une hiérarchie inconsciente entre les agents sous contrat CDI La Poste qui seraient supérieurs aux CDD etc. Nous exécutons les mêmes tâches qu’un salarié de La Poste mais nous ne sommes pas titulaires de nos tournées, donc nous pouvons être changés à tout moment, remplacés ou reclassés ailleurs, dans un autre poste. Nous sommes tributaires, comme une pièce rapportée. Plus nous sommes en bas de l’échelle des contrats, précaires, plus les cadences et la performance sont mises à l’épreuve. »

Pour en finir avec cette mise en concurrence malsaine et le travail précaire à La Poste nous devons commencer par se réunir et discuter dans des réunions ouvertes à tous les travailleurs, que ce soient les CDI de La Poste, les CDD ou les intérimaires, syndiqués ou non syndiqués, seul moyen d’avoir une organisation véritablement représentative de tous les travailleurs.

Les journées de grève éparses ou les journées de manifestation saute mouton se sont démontrées insuffisantes pour lutter contre la privatisation et la précarisation des travailleurs de La Poste. Ces plans des directions syndicales nationales, sont loin des nécessités d’organisation démocratique par la base, comme le propose parfois certains syndicats, qui nous permettra de discuter d’un véritable plan de lutte qui réclame l’embauche en CDI de tous les travailleurs en CDD, intérimaires ou CDI associations et en finir avec l’externalisation des métiers et des services, mettant fin au travail précaire. Par ailleurs, seulement l’ensemble des travailleurs unis (précaires et titulaires) pourront discuter des mesures à mettre en place pour améliorer la qualité du service aux usagers, car ce sont les travailleurs les premiers en contact avec eux tous les jours et qui connaissent au mieux leurs besoins.


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