×

Feuille de soins ou billets de banque ?

La Santé selon Fillon, ça reste du business

Après sa bombe sur la Sécu, Fillon et son équipe de campagne essayent de reculer sans trop perdre la face. Sur le fond, néanmoins, rien ne change par rapport à la philosophie du projet. L. Karczinsky

Facebook Twitter

Le financement de notre système de santé ne serait plus assuré dans l’avenir. Il faudrait le réformer selon le représentant de la droite. Pensez donc ! Cela fait des dizaines d’années que l’on nous dit que l’allongement de la durée de vie et le coût de la technicité croissante mettent en péril les finances de l’État. Et personne pour nous rappeler que les cotisations sociales rentrent mal en raison du chômage, des exonérations de charges sociales accordées à certaines entreprises et aux retards de paiement de cotisations dues par beaucoup de grandes entreprises et particulièrement par l’État.

La Sécu : un budget propre qui n’appartient pas à l’État, mais qui est piloté par lui.


Le budget de la Sécu repose sur les cotisations des salariés et des entreprises (348,6 Milliards d’Euros de dépenses et 338,1 Milliards d’Euros de recettes en 2015. En comparaison le budget de l’État est de 395,6 Milliards d’Euros de dépense et 378,6 Milliards d’Euros de recettes.). Il reçoit en outre le produit de diverses taxes qui ont été créées afin d’éponger « la dette » ou de mettre en œuvre une nouvelle dépense. Par exemple, l’État prélève la CSG notamment et doit la reverser à la Sécu. Or, l’irrégularité des versements provoque des dettes supplémentaires. Certains parlementaires et la Cour des Comptes constatent l’opacité des relations financières entre l’État et la Sécu. L’argent de la Sécu, c’est du salaire différé des travailleurs, mais son utilisation est décidée par l’État bourgeois. Ce budget est équivalent à celui de l’État qui ne se prive pas de faire payer à la Sécu des charges qui lui reviendraient…

Quarante ans de dettes et de solutions miracles.

Tous les plans destinés à résorber la dette de la Sécu ont abouti à des prélèvements plus importants, à des taxes supplémentaires (CSG, CRDS) et à des diminutions de remboursements. La stratégie développée par les pouvoirs a été de diminuer l’offre médicale afin de diminuer la quantité de soins. « Moins de médecins » devait entraîner « moins de dépenses médicales ». Les conséquences ont été multiples : numerus clausus en fac de médecine, surcharges aux urgences, développement des déserts médicaux, renoncements aux soins pour certains, diminution de la prévention. Du coup, il a fallu penser à rationaliser l’offre de soins : à la fois supprimer les services hospitaliers trop peu fréquentés ou trop peu performants, et en même temps mettre en place un maillage territorial suffisant pour donner accès aux soins à tous. Les moyens financiers ont été mis à disposition des grands centres hospitaliers afin de les doter des outils les plus performants. Derrière cette idée, s’est toujours cachée une autre : permettre aux médecins du public d’exercer plus facilement dans le privé et permettre aux centres hospitaliers privés de recevoir comme l’hôpital public les mêmes dotations de l’État. Actuellement, il s’agit de mettre en avant l’intérêt du patient pour lancer un partenariat fonctionnel entre privé et public de plus en plus poussé. Et pourquoi pas d’ouvrir le marché du soin à la concurrence totale. De multiples instances existent où les patrons du privé côtoient ceux du public. Ils agissent de la même manière, en bons gestionnaires.

Ce ne sont pas les hommes politiques de « gauche » ou de droite qui décident, c’est le plan de technocrates qui, lentement, se met à l’œuvre.

La modernisation, un prétexte pour ouvrir le marché de la santé.

Pour Fillon, « une bonne articulation » entre le public et le privé est indispensable et il déplore que les hôpitaux privés ne soient pas traités équitablement. Mais, de fait, les hôpitaux et structures de soins publics font déjà appel à des prestataires privés (ambulances, cabinets comptables, médecins et spécialistes). Le dépeçage devrait continuer au profit des grands groupes privés. D’ailleurs le secteur des personnes âgées est déjà en partie aux mains de groupes privés. Ainsi l’hôpital public continuera à prendre en charge les problèmes médicaux les plus coûteux ou ceux qui concernent les plus pauvres, et le secteur privé tirera profit des cas médicaux qui rapportent sans avoir besoin d’investissements excessifs.

Le programme de Fillon dénonce la cherté de notre système de santé. Ce serait la faute à l’organisation des soins très complexe qui « se traduit par une offre de soins déséquilibrée et inflationniste ». Et les dépassements d’honoraires seraient dus à cela. Celui qui n’a jamais travaillé pour un salaire minable peut seul prétendre que la santé coûte trop cher.

Les propositions de Fillon

La mise en place des parcours de soins basée sur le renforcement de la coordination entre médecine libérale et hospitalière, le dossier médical personnel informatisé, le développement de l’hospitalisation à domicile, tout cela est déjà dans les tuyaux. Ce qui est nouveau c’est la « juste rémunération des médecins traitants ». Fillon écoute les revendications des médecins et leur annonce leur d’ores et déjà une augmentation.
Et en même temps, il rétablira les 39 heures à l’hôpital, supprimera la généralisation du tiers payant. On voit quelle partie de la population il veut favoriser. Il veut mettre fin au déficit chronique de la Sécu en responsabilisant les patients.

Promouvoir le système hospitalier français à l’étranger, faire de l’université le fer de lance de l’innovation et … favoriser l’émergence de sociétés innovantes en France dans le secteur de la santé dont il imagine déjà le financement.

On le voit, tout est tourné vers la possibilité pour les groupes capitalistes de la santé de développer leur profit sur le dos de la Sécu et des travailleurs. Ce programme montre pour qui Fillon gouvernera. Même s’il a déjà décidé de retravailler son programme qui annonçait le pire cyniquement, nous savons qu’il est notre ennemi déclaré.


Facebook Twitter
Anasse Kazib convoqué par la police : « une procédure politique contre des dizaines de soutiens de Gaza »

Anasse Kazib convoqué par la police : « une procédure politique contre des dizaines de soutiens de Gaza »

Jeux Olympiques : le budget explose pendant que le gouvernement prépare l'austérité

Jeux Olympiques : le budget explose pendant que le gouvernement prépare l’austérité

Conférence de LFI interdite par l'Etat : une censure politique en pleine campagne des européennes

Conférence de LFI interdite par l’Etat : une censure politique en pleine campagne des européennes

Un an de prison avec sursis pour avoir soutenu la Palestine : exigeons la relaxe pour Jean-Paul Delescaut !

Un an de prison avec sursis pour avoir soutenu la Palestine : exigeons la relaxe pour Jean-Paul Delescaut !

Répression coloniale. A Pointe-à-Pitre, Darmanin instaure un couvre-feu pour les mineurs

Répression coloniale. A Pointe-à-Pitre, Darmanin instaure un couvre-feu pour les mineurs

100 jours d'Attal : la dette et les européennes réactivent le spectre de la crise politique

100 jours d’Attal : la dette et les européennes réactivent le spectre de la crise politique

Jeux olympiques : l'État jette à la rue 450 migrants hébergés à Vitry

Jeux olympiques : l’État jette à la rue 450 migrants hébergés à Vitry

L'université de Lille annule la conférence de LFI sur la Palestine après une campagne autoritaire

L’université de Lille annule la conférence de LFI sur la Palestine après une campagne autoritaire