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Régionales

La banqueroute politique des réformistes. Le Front de Gauche, fin de partie ?

Yano Lesage Les résultats des élections régionales l’ont confirmé. Le Front National avance, lentement mais sûrement, sur fond de remise en cause des partis de gouvernement traditionnels. Que ce soit du côté du PS, qui fait face au retour de bâton de sa politique, ou de la droite traditionnelle, malgré un discours largement inspiré de son principal rival politique, l’échec est cuisant. Rien d’étonnant, et rien de plus prévisible que la déconfiture des deux grands partis traditionnels de gouvernement qui font les frais de près de trente ans de politique pro-patronale et réactionnaire.

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Alors qu’ailleurs en Europe, la gauche réformiste a su profiter dans un premier temps d’une situation de crise du bipartisme et tirer la couverture à elle — on songera à Syriza en Grèce —, les élections régionales de 2015 en France marquent l’échec de cette « gauche de la gauche » à incarner une alternative crédible aux yeux de l’électorat et de larges couches de la population.

Créé en 2009, à l’occasion des élections européennes, le Front de Gauche est composé d’une coalition de partis de gauche — le Parti Communiste Français, le Parti de Gauche, la gauche unitaire — dont l’élément fondateur a été l’opposition au Traité Constitutionnel européen de 2005, ainsi que la lutte contre le Traité de Lisbonne. Avec l’agrégation en 2014 de la formation « Ensemble » dans laquelle ont fusionné plusieurs organisations de gauche, le Front de Gauche avait pour projet d’incarner une opposition sur la gauche à la politique du parti socialiste.

Anti-néolibéral, social-démocrate, se présentant comme une sorte de palimpseste de « l’esprit socialiste » dénaturé par l’évolution social-libérale du Parti Socialiste, le Front de Gauche avait, en définitive, tout à gagner de la situation d’un gouvernement Hollande et de sa politique, tout en continuité dans son caractère pro-patronal de celle de son prédécesseur, Nicolas Sarkozy. Achevant le tournant libéral du PS, y ajoutant le caractère belliciste, le gouvernement Hollande n’a fait que révéler au grand jour le vrai visage du parti socialiste, sa nature profondément bourgeoise et réactionnaire.

Pourtant, et malgré tous les avantages de cette situation, le Front de Gauche n’a fait que reculer dans les urnes depuis sa création. Après avoir récolté 11,1% des voix en faveur de Jean-Luc Mélenchon en 2012 au premier tour des présidentielles, le Front de Gauche arrive divisé en 2014 sur la question des élections municipales — le PCF préférant réaliser des alliances avec le PS en vue de conserver ses postes — tandis qu’aux élections européennes, il ne parvient à amasser que 6,34% des voix.

Avec les régionales, le Front de Gauche n’obtient que 2,49% des voix quand il se présente seul, et parvient tout juste à dépasser les 4% en alliance avec Europe-Ecologie Les Verts et d’autres formations de gauche. Des résultats plus qu’insuffisants qui marquent son incapacité à refonder la gauche à l’extérieur du PS. C’est essentiellement le FN qui a capté, depuis tant d’années, l’élément de contestation et de détresse qui s’exprime dans la population.

Rien d’étonnant, à y regarder de plus près, quand on analyse la politique du Front de Gauche depuis sa création. L’illusion qui conduit à croire au changement par le recours aux institutions l’a amené à adopter des positions totalement suivistes par rapport au Parti Socialiste et au gouvernement plus généralement.

D’abord par ses stratégies électorales, qui en dernier recours consistent à s’allier ou à soutenir le PS. On l’a vu lors des dernières élections municipales avec l’alliance dans de nombreuses circonscriptions du Parti Communiste Français avec les listes du PS dès le premier tour. La logique de survie et de maintien des postes de l’appareil du PCF montre le total consentement de la ligne politique du Front de Gauche à la logique bureaucratique. Dans les cas où le Parti de Gauche de Mélenchon a refusé de s’allier au premier tour avec le PS, ce n’était que pour mieux s’y rallier au second.

On le voit actuellement, lors de ces régionales, avec le retrait des listes du Front de Gauche et le report des voix vers le Parti Socialiste là où le PS est incapable de gagner seul, alors même que ce dernier n’a rien voulu entendre, ni rien concéder de son programme dans la région de la Bretagne et refuse de fait toute fusion des listes avec le Front de Gauche et EELV.

Mais c’est surtout dans les moments de crise que le Front de Gauche montre le vrai visage de sa politique : celui d’être toujours à la remorque du Parti Socialiste dont il soutient les grandes lignes de la politique. Dernièrement, ce sont les députés liés au Front de Gauche qui ont soutenu la mise en place de l’état d’urgence, cette politique liberticide et réactionnaire qui permet le déchaînement de la répression policière et l’état de surveillance et de suspicion généralisées contre les manifestants, les militants et les populations musulmanes et racisées.

En dernière instance, le Front de Gauche s’aligne parfaitement sur la politique va-t-en-guerre de Hollande, depuis le soutien à l’offensive impérialiste au Mali en passant plus récemment par son abstention, sans s’y opposer vraiment, quant à l’envoi d’avions militaires et aux bombardements en Syrie.

Une politique suiviste qui ne permet pas de se distinguer du Parti Socialiste au sein des institutions, ni même sur le terrain en ne donnant pas d’autres voix possibles à la contestation sociale que celle d’une « insurrection par les urnes ». Ce que le Front National se charge de faire pour lui.

On l’aura compris, 2015 n’incarne pas seulement la percée électorale et la banalisation des idées réactionnaires du FN, conséquence et continuité dans sa version plus brutale de la politique gouvernementale. Les élections régionales sonnent aussi le glas du projet de refondation d’une gauche réformiste qui n’a rien d’autre à offrir qu’une version édulcorée de la politique impérialiste, réactionnaire et liberticide du gouvernement Hollande. Reste à la rue et à tous ceux qui la rejettent de le revendiquer.


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