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« Rendez-vous pris dans les luttes à venir »

La droite gagne en Argentine. Lettre ouverte de Nicolás Del Caño

Au second tour des élections présidentielles argentines, c’est le candidat de droite, Mauricio Macri, qui l’a emporté, avec 52% des voix, contre Daniel Scioli, soutenu par Cristina Kirchner, la présidente sortante. C’est la fin d’un cycle, la chronique d’une rigueur redoublée et annoncée. C’est tout l’enjeu de l’appel à voter en blanc lancé par le Nicolás Del Caño, du Front de Gauche et des Travailleurs, qui revient, à chaud, dans les colonnes de La Izquierda Diario, sur cette victoire de la droite. {{}} Nicolás Del Caño, candidat du FIT, député, membre de la direction du Parti des Travailleurs Socialistes (PTS)

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Parmi les plus de 600.000 bulletins blancs ou nuls [le vote étant obligatoire en Argentine], une bonne partie sont les voix les plus conscientes de celles et ceux qui se sont prononcés contre la rigueur que va appliquer Mauricio Macri, [candidat de droite victorieux et issu du monde de l’entreprise]. Nous nous attendions à plus [le FIT ayant recueilli 812.000 voix au premier tour]. Il est certain que le virage démagogique de Scioli, au cours des derniers jours de campagne, a eu un certain impact au sein d’un secteur important du monde du travail.

Mais il n’y a que le FIT qui a dénoncé au cours de la campagne le programme de rigueur qui se profile et qui va frapper les classes populaires. Scioli n’y a jamais fait allusion avant le premier tour, et pour cause. Ses conseillers économiques affirmaient que eux aussi, en cas de victoire, auraient eu à mettre en œuvre un programme de rigueur pour nous faire payer la crise, à nous autres, du monde du travail. Ils assuraient de même qu’ils n’allaient pas déroger au remboursement des « fonds vautours » [qui ont refusé le rééchelonnement de la dette Argentine post-2001], ce qui revenait à placer le pays dans un nouveau cycle d’endettement, funeste. Mais parallèlement, Scioli ne faisait pas mystère qu’il allait confirmer Sergio Berni, connu pour son goût de la répression policière, à la tête du ministère de l’Intérieur (…).

Paniquant face à ce qui s’annonçait comme une défaite annoncée, Scioli a commencé à dire quelques vérités au cours des deux dernières semaines. La dévaluation du pesos que propose Macri impliquera, en effet, un énorme transfert de revenus des secteurs ouvriers et populaires en direction des segments les plus concentrés du grand capital, les banquiers et les agro-exportateurs. Mais en ne défendant aucun programme alternatif permettant de faire payer précisément ceux qui veulent nous faire payer la crise, Scioli ne s’annonçait pas comme une « solution » bien différente de Macri en cas de victoire. En réalité, comme je l’ai tweeté ce soir, à l’annonce des résultats, à force de faire le jeu de la droite, c’est la droite qui a fini par gagner [« muchos años haciéndole el juego a la derecha terminaron en Macri »]

Comme je le disais, cependant, de nombreux travailleurs ont cru, et c’est vrai, que Macri a pour programme de revenir sur nos acquis. Mais que Scioli pouvait être une façon de le contrer au second tour. En réalité, c’est le piège du « moindre mal » qui a fini par primer.

Les mois à venir vont être difficiles pour les travailleurs et pour le peuple. Une bonne partie des directions syndicales vont essayer de se relocaliser, de façon à ne pas perdre leurs privilèges, en laissant les travailleurs livrés à eux-mêmes.

Le FIT est la seule force politique nationale qui a clairement affirmé, sans langue de bois, et ce dès nos premières interventions dans les médias et dans nos spots, que nous devions nous préparer à la rigueur qui se profile. Qui plus est, nous avons réaffirmé que personne ne devait toucher en dessous d’un salaire permettant de faire vivre dignement une famille (…), pour l’abolition de l’impôt sur le revenus pour les salariés ainsi que de la TVA sur les produits de consommation courante, pour l’interdiction des licenciements et des mises-à-pied. Pour ce faire, pour défendre nos acquis, il est nécessaire de toucher au portefeuille les intérêts des grands capitalistes qui ont fait de juteux bénéfices tout au long des dernières années. Il faut un système d’impôts fortement progressif sur les grandes fortunes et utiliser l’argent dégagé pour un vaste programme de logements sociaux ; il nous faut une banque unique qui permette de mettre un terme à la fuite des capitaux et qui empêche les banquiers de fourrer leur nez dans l’épargne des Argentins pour la mettre au service d’un système de crédit bon-marché pour les petits commerçants et producteurs ; il nous faut un monopole étatique du commerce extérieur de façon à ce qu’une poignée de grands capitalistes liés aux multinationales n’ait pas la haute main sur les douanes et les ports au détriment de petits producteurs ; il nous faut interdire les projets des grandes multinationales du secteur minier qui sont polluants pour tout le pays.

Nous sommes aujourd’hui conscients que la majorité du monde du travail qui, pourtant, est contre l’austérité, ne nous a pas suivi dans notre appel à voter blanc ou nul et a, à l’inverse, voté pour l’un des deux candidats du patronat. Mais nous avons rendez-vous, à nouveau, dans les luttes à venir, contre les hausses des tarifs des biens et des services, contre les licenciements et contre la perte de pouvoir d’achat que va tenter d’imposer Macri, de même que pour expulser la bureaucratie de nos syndicats. Parallèlement, nous continuerons à insister sur la nécessité de construire un instrument politique propre des travailleurs, la seule garantie réelle pour dépasser la logique du « moindre mal » et lutter pour la seule perspective qui vaille pour l’ensemble du peuple, celle d’un gouvernement du monde du travail.


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