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Mayonnaise et dentifrice, jusqu’au retrait

La jeunesse emmerde François Hollande

Jean-Patrick Clech {} Les métaphores politiques sont parfois peu ragoutantes. On connaît celle de la jeunesse, qui, à l’instar du dentifrice, ne saurait rentrer dans son tube une fois qu’on a appuyé dessus. Il y a également celle de la mayonnaise, qui parfois prend, et parfois ne prend pas. Cette fois-ci, le dentifrice est sorti, la mayonnaise prend, et, de surcroît, la jeunesse emmerde François Hollande (et au passage son Premier ministre et sa ministre du Travail).

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L’Hexagone est un pays de traditions et ceux qui savent le mieux les respecter (tout en les modifiant légèrement), ce sont les étudiants et les lycéens, n’en déplaise à certains. La première de ces traditions, c’est le caractère explosif et massif de la jeunesse quand elle entre en mouvement et sa capacité à entraîner derrière elle les salariés. Alors certes, les travailleurs du public comme du privé ont été moins nombreux, hier, que le 9, mais ce n’est que partie remise, en vue du 24 et du 31. Nul esprit de reflux, dans les cortèges de jeudi. Bien au contraire.

Pour ce qui est du côté massif et explosif, cela a été confirmé dans les chiffres. Tous les médias à la botte du gouvernement (ou aux ordres du patronat, ce qui relève peu ou prou de la même entité…) ont scruté à la loupe « les chiffres de la préfecture et de la police » et ceux des « organisations ». En général on met au compte de la CGT le fait d’exagérer. Ce coup-ci, c’est la faute des jeunes qui, on le sait bien, ne savent pas compter. Mais les images sont là pour en témoigner. Ce sont 150.000 étudiants et lycéens qui ont manifesté, jeudi, dans les rues de dizaines de villes, des petites comme des grosses, dans la capitale comme en région : Le Puy-en-Velay, Clermont, Poitiers, Saint-Nazaire, Brest, autant de villes où les cortèges, de plusieurs milliers parfois, reflètent la profondeur de la colère qu’exprime la jeunesse. En banlieue parisienne, dans la région lyonnaise et à Marseille, les flics avaient ordre de disperser les rassemblements de lycéens-bloqueurs aux abords des établissements de périphérie dès le petit matin. Le spectre des blousons noirs et des racailles est toujours présent et le gouvernement cherche, là encore, à éviter par tous les moyens que la radicalité banlieusarde puisse servir de « mauvais exemple ».

L’autre tradition respectée hier relève du fait que les réformes, la jeunesse les renvoie « sans aucune hésitation » là où elles doivent finir : aux chiottes. On nous dira, dans les colonnes du Figaro, de l’Opinion ou de Valeurs Actuelles, que le slogan est galvaudé et que, généralement, les réformes passent. Cette fois-ci, il se pourrait bien que non, tant le niveau de ras-le-bol est grand.

Dernier slogan (ou tradition) respecté(e) mais écorné(e), cette fois-ci, le fait que la « jeunesse emmerde… » non plus le Front National, Devaquet, Juppé ou Villepin mais bien François Hollande, son flic de Premier ministre et la ministre du Travail. La forme reste la même, mais la différence, en terme de contenu, est de taille. Car c’est bien d’une rupture complète dont il faut parler aujourd’hui entre ces secteurs qui, lorsqu’ils pouvaient voter, s’étaient massivement exprimés contre Nicolas Sarkozy en 2012 et qui, aujourd’hui, manifestent bruyamment et avec intransigeance leur rejet complet de ce gouvernement et des socialistes. La jeunesse, encore une fois, agit en caisse de résonance de tendances plus profondes qui, si elles venaient à s’exprimer dans la rue, seraient catastrophiques pour Hollande et sa clique.

Il existe, en France, un haut degré de ras-le-bol, habituellement contenu, parfois exprimé, souvent canalisé par des courants ou des partis qui n’ont rien à voir avec les colères populaires légitimes. Les médias, d’ailleurs, en parlent à longueur de journée, qui publiant un papier sur « les ouvriers qui votent FN », qui en sortant un reportage sur « les jeunes et le djihad ». Par-delà le degré de réalité et d’exagération de ce genre « d’enquêtes » qui font la part belle au sensationnalisme, ce que montre le mouvement actuel c’est que la colère, lorsqu’elle s’exprime de façon collective, permet de redonner espoir et confiance dans nos propres forces. Plus on a confiance, plus le camp d’en face est nerveux, qu’il s’agisse de Gattaz ou de Hollande. Leur faire peur, pour de bon, c’est possible.

Il suffit juste de respecter quelques bonnes vieilles traditions, à commencer par l’unité étudiants-lycéens-travailleurs, et s’en approprier de très anciennes, autour des questions de coordination et de comités de grève. Voilà ce qui pourra à nouveau nous permettre de dire « tout est possible ». Hollande en est certainement encore plus conscient que les manifestants. A nous de concrétiser cette perspective les 24 et le 31, en imposant à nos organisations un appel reconductible à un mouvement intercatégoriel, interprofessionnel et intergénérationnel jusqu’au retrait pur et simple de la loi. {}


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