×

Déconfinement

La réouverture du Puy-du-Fou, le cadeau de Macron à la droite conservatrice.

Philipe de Villiers, le fondateur du Puy-du-Fou, a réussi à faire craquer Macron. Après un gros caprice pour la réouverture rapide de son parc à thème, le président lui accorde une réouverture prévue le 11 juin.

Tyshka Rostov

22 mai 2020

Facebook Twitter

Emmanuel Macron, ce mercredi 20 mai, plaide au conseil de défense en faveur de la réouverture rapide du parc à thème le Puy-du-Fou. Officiellement, la réouverture du parc sera donc bien effective le 11 juin.

On assiste encore une fois à une discorde gênante entre le président et Edouard Philippe, qui affirmait quelques jours avant, ne pas vouloir se prononcer trop rapidement sur une date. Depuis le début de la crise du coronavirus les deux hommes semblent avoir du mal à s’entendre et révèlent de temps à autre leurs désaccords.

Alors que l’ensemble du monde de la culture est sur le qui-vive et attend les fameuses annonces « de la semaine du 25 mai » quant à leur sort de déconfinement, pourquoi le Puy-du-Fou obtient-t-il un traitement de faveur ? Entre Macron et la droite identitaire et souverainiste de Philippe de Villiers il n’y apparemment qu’un pas. Macron sait se trouver des alliés chez la droite conservatrice. Pendant sa campagne présidentielle, fin 2016, il s’était d’ailleurs rendu au Puy-du-Fou pour affirmer avec fierté ne pas être « socialiste ». Un lien d’amitié s’était crée entre les deux hommes et le président avait alors promis de ne jamais laisser tomber ce parc à thème soi-disant essentiel pour la France. Au téléphone, le président de la République promet à son interlocuteur d’œuvrer en faveur de l’industrie touristique en général et du Puy-du-Fou en particulier. Mais les pertes d’argent engrangées par le confinement -estimées à 1 million par jour, ne plaisent pas à de Villiers. Aujourd’hui, il reste accroché à cette promesse présidentielle plus que jamais et Macron a cédé.

Un cadeau à la droite conservatrice

Le confinement a beaucoup inquiété Nicolas de Villiers, directeur du parc, ainsi que son père comme en témoignent ses nombreux tweets. La date du 2 juin pour rouvrir bars et restaurants ne touche pas un mot du tourisme : coup dur. Philippe invoque alors sur Twitter, la promesse de Macron qu’il n’a pas tenu.

En parallèle des prises de paroles publiques dramatiques de Nicolas de Villiers, les pleurs se refont entendre sur Twitter, après qu’il a réussi à joindre au téléphone Edouard Philippe. Celui-ci pensait lui annoncer une « bonne nouvelle » en lui disant qu’un « plan massif pour le tourisme » était prévu à hauteur de 18 millions d’euros, mais qu’aucune date ne pouvait être décidée pour le moment. Visiblement, ce n’était pas suffisant pour les De Villiers qui voulaient une ouverture ici et maintenant. Avec l’appui de plusieurs élus, une pétition est lancée en ligne en faveur de la réouverture du parc, avec plus de 23 000 signatures, pour faire pression sur l’exécutif. Finalement, c’est Macron qui cède au caprice, en plaidant cette cause à Matignon.

Philipe de Villiers, après avoir craché son venin et versé des larmes, a obtenu gain de cause et rédige un tweet satisfait, où il remercie Macron de veiller sur lui. Quand les intérêts du patronat et du gouvernement se rencontrent…

A qui va profiter ce « relancement économique »

La réouverture du Puy-du-Fou ne se fait alors pas du tout sur des bases sanitaires, mais bien sur la pression exercée par le patronat sur le gouvernement. Évidemment, l’argument brandi par De Villiers est que le parc fait vivre l’économie de la Vendée et qu’il est nécessaire de relancer le tourisme. Mais en vérité, le tourisme ne va de toute façon pas reprendre à la normale, même si la règle des 100 km tombe. La réussite du parc dépend aussi des hôtels, restaurants et activités aux alentours. La réouverture du parc ne peut s’accompagner que d’une logique touristique qui favoriserait sa relance économique -ce qui serait dramatique d’un point de vue sanitaire.

Le parc, qui aurait initialement du rouvrir le 4 avril, a fait environ un million de perte par jour, et 42 millions d’euros en tout. Mais ce qu’ils ne disent pas c’est qu’ils n’auront aucun problème à rattraper tout cet argent perdu. Déjà parce que depuis quarante ans, le Puy-du-Fou est une véritable machine à cash, qui brasse énormément d’argent. Même s’ils devaient perdre des millions, quid des milliards accumulés ces dernières décennies ? Mais aussi, le système économique du parc est énormément controversé, avec un système d’embauche très particulier. Des milliers de travailleurs, d’artistes, et de comédiens travaillent au Puy-du-Fou… bénévolement. Les saisonniers aux contrats précaires sont rémunérés, mais les artistes répètent et travaillent bénévolement d’une année à l’autre. Voilà comment tourne le parc : sur du travail gratuit. Pas étonnant qu’ils soient pressés de rouvrir, gagner de l’argent à l’air tellement simple. Les bénéfices engrangés ne payent ni les dettes du parc, ni le travail des bénévoles, mais va directement dans les poches du patron et dans l’investissement de la saison d’après.

Donc, à qui profite réellement cette réouverture forcée ? En tout cas pas aux plus de 3 000 bénévoles (enfants compris) et aux milliers de travailleurs (enfants compris) qui vont devoir retourner travailler presque gratuitement dans le contexte d’une crise sanitaire historique. Peut-être déjà plus à l’association anti-IVG à laquelle beaucoup de bénéfices sont reversés…

Voilà le déconfinement à la carte en France. Celui où certains secteurs ouvrent parce que les patrons sont amis avec Macron. Celui où les mesures sanitaires passent au second plan, en même temps que la santé des travailleurs. Celui où l’ouverture d’un parc qui relate une histoire de France conservatrice et souverainiste passe devant une campagne de dépistage massif, ou des masques gratuits pour toutes et tous.


Facebook Twitter
 « Dette » et « guerre » : double matraquage et attaques en préparation

« Dette » et « guerre » : double matraquage et attaques en préparation

Lidl : comment l'entreprise soutient la colonisation en Cisjordanie

Lidl : comment l’entreprise soutient la colonisation en Cisjordanie

Solidarité : SUD Rail & la CGT Energie 75 apportent leur soutien à Anasse Kazib, convoqué par la police

Solidarité : SUD Rail & la CGT Energie 75 apportent leur soutien à Anasse Kazib, convoqué par la police

Formation des enseignants : Macron cherche à renforcer le contrôle des futurs profs

Formation des enseignants : Macron cherche à renforcer le contrôle des futurs profs

Mort de Shemseddine : non aux mesures répressives, il faut des moyens pour la jeunesse !

Mort de Shemseddine : non aux mesures répressives, il faut des moyens pour la jeunesse !

« Economie de guerre » : à Bergerac, Macron inaugure une usine militaire pour faire parler la poudre

« Economie de guerre » : à Bergerac, Macron inaugure une usine militaire pour faire parler la poudre

Limitation du droit d'asile, enfermement aux frontières : le Parlement européen adopte le pacte migratoire

Limitation du droit d’asile, enfermement aux frontières : le Parlement européen adopte le pacte migratoire

Périmètre « antiterroriste », QR code, surveillance généralisée : Darmanin dévoile son plan pour les JO

Périmètre « antiterroriste », QR code, surveillance généralisée : Darmanin dévoile son plan pour les JO