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Le 2 juin exigeons Justice pour George, Adama, et toutes les victimes de violences policières

Le meurtre de George Floyd à Minneapolis aux États-Unis est l'élément déclencheur d'un mouvement massif, dénonçant les violences d’État, qui ne s'arrête pas aux frontières américaines. Le rassemblement du 2 juin appelé contre les violences policières et le racisme par le Comité Adama doit se faire l'écho de ce mouvement désormais international.

Ariane Anemoyannis

1er juin 2020

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Crédit photo : LP/Arnaud Dumontier

De Minneapolis à New-York City en passant par Los Angeles, les manifestations se sont multipliées, de plus en plus massives. Depuis lundi 25, jour de la mort de George Floyd, elles prennent la forme d’émeutes à la nuit tombée.

Les 10 minutes de la vidéo dans laquelle on voit quatre policiers arrêter George Floyd et le maintenir à terre jusqu’à l’évanouissement qui provoquera sa mort à l’hôpital sont la goutte d’eau qui a fait déborder le vase des violences racistes aux Etats-Unis. George Floyd incarne par son décès entre les mains de la police le quotidien des violences policières que subissent les Africains-américains de l’autre côté de l’Atlantique.

"I can’t breathe", "je ne peux pas respirer". Ce sont les mots prononcés par George Floyd avant de s’évanouir sous le poids de Derek Chauvin. Ce sont ces mots qu’avaient prononcés Eric Garner en 2014 avant de mourir lui aussi, un des décès à l’origine du mouvement Black Lives Matter, né de la mort de Trayvon Martin. Et la colère ne s’arrête pas alors qu’a été pris la décision d’inculper le principal auteur des faits tout en limogeant les trois autres. Mais le mouvement ne se satisfait pas : "we want all four", "on veut les quatre".

Face à la vague de colère, la classe politique semble déstabilisée. D’un côté, les démocrates tentent de calmer le jeu alors que les Africains-américains représentent une partie non négligeable de leur électorat. Le gouverneur de l’Etat du Minnesota, membre du Parti démocrate, a décidé de mobiliser l’entièreté de la garde nationale de cet Etat, une décision répressive inédite depuis les "164 ans d’histoire de la Garde nationale du Minnesota". Ilhan Omar, figure racisée du Parti démocrate de la gauche de l’organisation, a quant à elle appelé à la fin des émeutes dans le pays lors d’une allocution télévisée.

De l’autre côté, c’est la peur qui domine à La Maison Blanche, alors que Trump s’est terré dans le bunker de l’établissement présidentiel par peur des manifestants qui encerclaient ce dernier. Pour masquer la fébrilité d’un exécutif américain qui incarne la décadence des gouvernements bourgeois face à la crise sanitaire qui a ravagé le monde entier et en particulier les Etats-Unis, le Président a opté pour la stratégie de la coercition. Garde nationale dans les rues, couvres-feu inédits depuis la mort de Martin Luther King en 1969, et dispersion des manifestants par les balles de paintball et les arrestations par milliers y compris de nombreux journalistes.

Egalement, Trump cherche à mobiliser sa propre base sociale, qui manifestait armé il y a quelques semaines contre le confinement, pour organiser une contre-offensive réactionnaire. L’un tirant à l’arc dans la foule, l’autre blessant les passants avec une épée ou encore un dernier fonçant sur les manifestants avec un poids lourd : autant de supporters du Président, chauffés à blanc par les propos de ce dernier. De fait, les déclarations visant à inscrire les groupes antifas parmi les organisations terroristes et la criminalisation de l’extrême-gauche s’inscrivent dans une même logique de polarisation sociale maximale de la population.

En parallèle, le Président incite les gouverneurs à réprimer durement le mouvement, sans quoi ces derniers passeraient pour des "jerks" (cons). "Vous devez arrêter des gens, vous devez condamner des gens, et ils doivent purger une longue peine en prison" disait-il ainsi lors d’un appel privé auquel a eu accès le New York Times.

Le niveau de détermination du mouvement semble donc effrayer gravement le pouvoir. En effet, celui-ci advient au sortir d’une crise sanitaire sans précédent, qui a montré toutes les limites du système de santé américain. Une pandémie qui a également été l’élément déclencheur d’une crise économique inédite et qui a déjà fait 40 millions de chômeurs aux Etats-Unis. Cela se combine donc avec des violences systémiques sur les populations les plus exposées au coronavirus, à savoir les latino-américaines et les populations africaines-américaines. Parmi les 100 000 décès confirmés par le gouvernement depuis le début de l’épidémie, et alors que elles représentent 13,4 % de la population (pour 60 % de Blancs et 18 % d’Hispaniques), elles constituent plus d’un quart (26,1 %) des cas de Covid-19 recensé selon Les Echos.

Des secteurs en première ligne de la crise car ils occupent les professions les plus précaires et exposées au virus et sont aussi ceux qui ont le moins accès aux soins aux Etats-Unis. "A Chicago, par exemple, il existe un écart de neuf ans entre l’espérance de vie des résidents noirs et blancs, avec plus de 3 000 décès en excès parmi des Noirs chaque année" expliquait ainsi la représentante de représentante de l’American Medical Association, Aletha Maybank. "Je fais de l’asthme et je suis prédiabétique. J’illustre ce que c’est de grandir pauvre et noir en Amérique", témoignait dans le même sens Jerome Adams, l’administrateur de la santé publique des Etats-Unis. Et il y a quelques semaines, c’était la mort d’un chauffeur de bus africain-américain qui avait incarné les inégalités sociales et l’exposition à deux vitesses face au coronavirus, alors que les secteurs précaires et en première ligne de la crise sont majoritairement racisés. Se mêlent ainsi aux tags anti-racistes les tags anticapitalistes : "Make the rich pay", "faites payer les riches" !

"A tous les niveaux, les officiels semblent avoir des difficultés à appréhender la réalité d’une rébellion multiraciale, qui rassemble la jeunesse afro-américaine, les immigrants d’origine somalienne, les Latinos et enfin les habitants, majoritairement blancs, des banlieues résidentielles. Entre le chômage et la fermeture des universités liés au confinement dû à l’épidémie de coronavirus, tous sont disponibles, simultanément, de manière inédite" explique le journaliste du Monde Laurent Borredon . Le caractère effrayant du mouvement réside donc aussi dans son extreme popularité, et sa capacité à entrainer massivement pour une remise en question profonde des inégalités systémiques. Les populations blanches des quartiers résidentiels, les jeunes, ainsi que certaines franges du mouvement ouvrier comme l’ont incarnés les chauffeurs de bus ayant refusé de coopérer avec la police ou encore les déclarations de soutien au mouvement des organisations syndicales : un potentiel hégémonique et de masse, qui fait le lien avec le contexte de crise sanitaire et économique sans précédent.

Et si en France la presse est plutôt unanime pour dénoncer le racisme systémique aux Etats-Unis, la colère qu’expriment les plusieurs centaines de milliers de manifestants de l’autre côté de l’Atlantique fait écho à celle dévoilée par les émeutes dans les quartiers populaires français. Ici aussi, l’Etat utilise la coercition comme méthode pour confiner et contenir les populations précaires et issues de l’immigration, aujourd’hui en première ligne de la crise économique et sanitaire. Ce sont 12 personnes qui ont trouvé la mort en deux mois de confinement autoritaire, et des centaines d’autres qui ont été victimes de violences policières à l’instar des scènes brutales de l’Ile Saint Denis. Ici aussi, la classe politique tente de décrédibiliser la violence des populations qui n’est qu’une réponse à la violence sociale et policière qu’elles subissent au quotidien. Cette semaine, une nouvelle expertise médicale concernant la mort d’Adama Traoré a ainsi écarté "l’asphyxie positionnelle subie pendant l’interpellation comme cause du décès". Une énième déclaration qui concorde avec la tentative des autorités américaines d’écarter l’asphyxie comme cause de la mort de George Floyd , et que le Comité Vérité et Justice pour Adama a choisi de dénoncer par un rassemblement le mardi 2 juin devant le Tribunal de Paris.

Une date qu’il s’agit de saisir alors qu’à l’international la question des violences d’Etat est dénoncée par des manifestations de plus en plus massives, à l’aune d’une crise économique sans précédent qui viendra encore une fois frapper les classes populaires et issues de l’immigration. Pour exiger Justice pour George Floyd, Adama Traoré et toutes les victimes de violence de la part de l’Etat raciste et impérialiste, rendez-vous sur le parvis du Tribunal de Paris à 19h Place de Clichy. Pas de Justice, pas de paix !


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