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« Thawra », « Révolution » !

Les Soudanaises en première ligne contre le régime, « Révolution » !

L’image a fait le tour du monde : cette femme vêtue de blanc le doigt tendu vers le ciel haranguant la foule de manifestants au cri de « Thawra », révolution ! Un symbole qui en dit long sur ce soulèvement populaire où les Soudanaises sont en première ligne.

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Si la gronde dans le pays résonne depuis plus de 4 mois, c’est depuis le 6 avril que le Soudan est secoué d’une vague massive de contestation contre le régime autoritaire d’Omar el-Béchir, qui la réprime dans le sang. Ce sont 9 manifestants qui ont été tués depuis le 6 avril. Une situation de précarité et de misère extrême dévore le pays, et c’est à l’annonce d’une hausse de trois fois le prix du pain, à côté d’une hausse de 30 % des prix du carburant, avec une inflation délirante, que la population a commencé les manifestations. Les manifestations ont connu un immense regain de mobilisation le 6 avril, date anniversaire du 6 avril 1985 qui avait marqué le renversement du régime du président Jaafar Nimeyri.

Pour donner un aperçu de la situation dramatique pour les classes populaires, comme le précise Mediapart : « Un Soudanais sur cinq vit au-dessous du seuil de pauvreté et le Soudan est, selon l’ONU l’un des huit pays les plus touchés par la malnutrition. Alors que 7 % seulement du budget national sont consacrés à la santé, et 75 % à la défense, à la sécurité et à la rémunération des principaux dirigeants, la crédibilité du chef de l’État est au plus bas et sa marge de manœuvre paraît dérisoire. Avec la division du pays, le Soudan a perdu 75 % de ses ressources en pétrole, c’est-à-dire 90 % de ses exportations et la moitié de ses recettes budgétaires. »

Dans ce contexte, ce sont encore les femmes qui sont les plus touchées par la misère sociale et l’autoritarisme du régime islamique. D’un côté, elles subissent le chômage, en plus de devoir supporter le travail domestique et l’entretien de la famille dans des conditions d’extrême précarité. De l’autre, ce sont des lois discriminantes et sexistes qui président. Ayant pris le pouvoir par un coup d’État en 1989, le président islamique el-Béchir n’a fait que pérenniser la charia (loi islamique) qui avait été instaurée en 1983, en plus de lois gouvernementales tentant de restreindre le plus possible l’accès du marché du travail aux femmes, les contraignant à rester au foyer.

Une professeure à l’université de Bahri déclarait à l’AFP : « Car depuis le premier jour, ce gouvernement a fait des lois contre les femmes. Ne portez pas de pantalon, couvrez vos cheveux, ne parlez pas fort... ». Une loi qui se matérialise par la condamnation à la flagellation de 15.000 femmes en 2016, par la multiplication des viols et violences sexuelles, pour lesquels, jusqu’en 2015, elles pouvaient être jugées pour adultères. En 2017, Noura Hussein, figure tragique des lois misogynes était condamnée à mort pour s’être défendue face à son violeur, en l’occurrence l’homme auquel, selon la loi soudanaise, son père avait pu la marier de force.

Des conditions de vie effroyables pour les femmes rompues par le chômage, la surexploitation, et l’oppression systématique dont elles sont victimes. Mais ce sont elles qui aujourd’hui, sont sur le devant de la scène du combat contre ce régime mortifère, à l’image de cette femme dont la vidéo est devenue virale appelant la foule de manifestants à reprendre le mot d’ordre « Thawra », révolution.

France 24 relate : « D’après Hind Makki […] la femme "porte une robe blanche comme en portaient nos mères et grand-mères dans les années 60, 70 et 80, lors des grandes manifestations contre les précédentes dictatures militaires". Cet habit de coton blanc était en effet porté par les femmes lors des mouvements populaires de 1964 et 1985, au Soudan. »

La répression qui s’abat sur les femmes est tout aussi violente. Lors du 8 mars ayant été une date de mobilisation importante dans ce contexte, Eilman, une jeune manifestante déclarait à Rfi Afrique concernant les arrestations arbitraires du régime : « Je pense qu’il y a une volonté d’humilier les femmes. Certaines étudiantes ont eu leur foulard qu’elles portent sur la tête arraché par les forces de l’ordre ; on a également coupé les cheveux de certaines qui étaient en détention. Tout ça c’est une façon d’humilier les femmes de ce pays, de leur faire peur et de dire aux hommes, on a violenté vos femmes »

La moitié des manifestants sont des manifestantes, faisant suite à cette histoire de lutte et de combat, et dans un moment où les femmes, internationalement sont à l’avant-garde des luttes contre les régimes autoritaires.

La situation ne devient que plus explosive avec, en ce début de semaine, la division de l’armée. Loin d’être du côté de la population, les forces militaires se posent néanmoins en opposition au régime d’El-Béchir, faisant office d’arbitre du conflit qu’elle cherche avant tout à canaliser pour reprendre la main. Nul doute que le projet politique qu’elle porte ne soit pas beaucoup plus progressiste que celui d’El Bechir.


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