×

Micro-trottoir

Les étudiants de Paris 8 face aux présidentielles. Entre dégoût, vote par défaut et vote contestataire

A quelques mois des élections présidentielles, quelle est l'ambiance sur l'université ? Les étudiants et étudiantes s'intéressent-ils aux élections, aux programmes des candidats ? Ont-ils déjà choisi leur candidat ? C'est les questions que l'équipe de Révolution Permanente sur Paris 8 a posé, au hasard des rencontres dans le hall de l'université. Sans prétendre à l'exhaustivité, petit aperçu d'une ambiance de présidentielles marquées par les doutes et questionnements face à des élections qui semblent loin de répondre aux préoccupations de la jeunesse étudiante et travailleuse.

Facebook Twitter

« On votera, mais sans illusion »

 
L’université de Paris 8, à Saint-Denis, issue de mai 68, est connue pour être une « fac de gauche ». C’est d’ailleurs ce que disent Camille et Lorraine, étudiantes en L3 InfoCom, que nous avons interrogées : « On est de gauche, on n’est pas à Paris 8 pour rien !  ». La mobilisation contre la loi travail du printemps dernier, à laquelle ont participé certains des étudiants et étudiantes que nous avons interrogés, n’a pu que renforcer cette renommée.

Cette politisation est visible dans le fait que de nombreux étudiants et étudiantes sur Paris 8 ont suivi les primaires de la droite, et disent s’intéresser au sort que leur réservent les élections de 2017. Océane, en licence d’anglais, est même allée voter à la primaire de la droite, pour Alain Juppé, bien qu’elle ne se considère pas de droite. Pour elle, «  on se sent concerné mais ça risque d’être compliqué par rapport à ce qui se présente  ». Pour Antoine, Marie et Fabien, en licence de psychologie, « pour nous, ça ne changera rien à notre situation, il n’y a pas d’enjeux  ».

Christine et Binta, en licence d’AES, vont même plus loin dans leur critique : « ils disent tous la même chose, et au final c’est pas ce qu’ils font vraiment ». Ce dégoût des promesses, Souria, personnel administratif de l’UFR Art l’exprime aussi : « C’est décevant, on est à quelques mois des présidentielles et on a personne en tête. On dirait qu’ils se battent que pour leur pomme. « Moi président », mais derrière rien, rien pour le peuple.  ».

Pour certains, ce dégoût s’accompagne d’une inquiétude : et si l’exemple de Trump était suivi en France ? Khaled, en licence d’AES explique : « Je pense qu’au deuxième tour il y aura Les Républicains et le FN, et ce sera vraiment dommage pour la France. Trump, ça a mis dans la tête des français « si c’est possible là-bas pourquoi pas ici », et c’est dommage. ». Pour lui, c’est dans leurs discours sur l’Islam que les Républicains et le FN posent problème : « ils ont un discours qui divise  ». Sur ce terrain, Fillon, Le Pen, voire même Valls et Macron sont souvent mis dans le même panier. Voter Fillon contre Le Pen ? «  Ce serait contre mes valeurs  », explique Lorraine. « Ni Fillon, ni Valls  », pour Océane, car elle ne partage pas leur politique. De nombreuses discussions, un élément ressort : à Paris 8, on sait pour qui ne pas voter, mais on n’est pas sûr d’avoir trouvé pour qui voter...

« Faire un gros ménage, et mettre des vrais gens, avec des convictions, des vraies »

 
Certains étudiants interrogés ont néanmoins commencé à trancher, et c’est de loin Jean-Luc Mélenchon qui parvient à apparaître comme une possibilité de vote, au moins dans un vote « par défaut », «  pour bloquer les autres  », comme dit Souria.

Pour Gaëlle, étudiante en AES et Romain, en musicologie, c’est tranché : «  Jean-Luc Mélenchon, j’adhère à son programme, ce sera un bon président, pour le partage des richesses », explique-t-elle, tandis qu’il argumente : «  J’aime beaucoup ce qu’il dit et je suis confiant qu’il peut réussir. (…) Je suis pour la VIe Republique, pour mettre fin à la vieille Ve République  ». Khaled, quant à lui, reconnaît une chose : « [sur l’Islam], Mélenchon a plus un discours apaisant. Il va vers les problèmes réels, c’est-à-dire le chômage, pas les arabes ou les noirs.  » D’autres semblent moins confiants : « A gauche c’est un peu déprimant, mais je pourrais voter Jean-Luc Mélenchon, pour le vote contestataire  », nous explique Lorraine.

Pour d’autres, le vote contestataire s’exprimera autrement. Yanis, Pablo et Luca, en licence d’Histoire-Science po, qui ont participé à la mobilisation contre la loi travail à Paris 8, sont catégoriques : « L’idéologie que je défends n’est défendue par personne  ». «  On ne veut plus de président, on veut l’inverse de Fillon et Macron, l’inverse du libéralisme » ; «  Que l’argent n’existe plus, qu’on partage les ressources » ; «  la baisse du temps de travail, et l’augmentation du SMIC »... Ils sont pourtant moins unanimes sur le choix à faire pour 2017 : Yanis ne votera pas, tandis que Pablo votera « NPA au premier tour, rien au deuxième  », et Luca hésite encore, « entre le NPA, LO ou Mélenchon... sur un coup de folie !  ».

Pour Jenny, qui a elle aussi participé à la mobilisation contre la loi travail, le choix est fait : elle votera blanc : «  Le système politique dans lequel on vit ne m’intéresse pas vraiment, je suis en science politique pour mieux connaître le système et pouvoir le combattre. Du coup les présidentielles ça m’intéresse pas énormément parce qu’en France j’ai l’impression que c’est le choix entre la peste et le choléra.  ». Une impression que l’on retrouve dans beaucoup de discussions, et qui pour Souria doit conduire à ce que l’on fasse « un gros ménage, pour mettre de vrais gens, avec des convictions ».

Si pour l’instant le nom du bulletin de vote final semble difficile à déterminer, ce qui est clair les présidentielles de 2017 se font sans illusion quant aux possibilités d’améliorer des conditions de vie toujours plus dégradées. Si quelques rares parviennent à trouver chaussure à leur pied, nombreux sont ceux et celles pour qui s’il y a vote, ce sera par défaut. Il faudra pourtant bien penser le programme en positif qui donnera un bon coup de balais dans tous ces discours que plus personne ne croit, de ceux qui ont tout et se gardent bien de le redistribuer.


Facebook Twitter
Les Beaux-Arts de Strasbourg occupés et en grève contre le renforcement de la sélection

Les Beaux-Arts de Strasbourg occupés et en grève contre le renforcement de la sélection

Bordeaux Montaigne : la mobilisation obtient une cellule de gestion des VSS indépendante de la présidence

Bordeaux Montaigne : la mobilisation obtient une cellule de gestion des VSS indépendante de la présidence

Etats-Unis. Solidarité avec les étudiants de l'université de Columbia réprimés !

Etats-Unis. Solidarité avec les étudiants de l’université de Columbia réprimés !

« On demande le retrait total de la réforme », 300 étudiants en AG à Tolbiac contre le tri social

« On demande le retrait total de la réforme », 300 étudiants en AG à Tolbiac contre le tri social


Paris 8. L'IED menace d'augmenter de 15% les frais pédagogiques

Paris 8. L’IED menace d’augmenter de 15% les frais pédagogiques


Etats-Unis. A l'université de Columbia, la répression du soutien à la Palestine s'intensifie

Etats-Unis. A l’université de Columbia, la répression du soutien à la Palestine s’intensifie

1 étudiant sur 10 s'est déjà retrouvé sans logement pendant ses études, révèle l'enquête du Poing Levé !

1 étudiant sur 10 s’est déjà retrouvé sans logement pendant ses études, révèle l’enquête du Poing Levé !

Bordeaux Montaigne : la mobilisation proche de la victoire sur la gestion des VSS après 7 mois ?

Bordeaux Montaigne : la mobilisation proche de la victoire sur la gestion des VSS après 7 mois ?