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Impunité policière

Les policiers qui ont tué Cédric Chouviat protégés par Darmanin et maintenus à leur poste

Dans un courrier adressé à la famille de Cédric Chouviat, suite à leur demande de suspension des fonctions des policiers mis en examen pour homicide, Darmanin affirme ne pas trouver de raison suffisante pour le faire. Une preuve de plus de l'impunité policière.

Lucia Nedme

9 août 2021

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Crédits photo : Bertrand Guay / AFP

Le 5 janvier 2020, Cédric Chouviat, livreur de 42 ans, meurt à la suite d’une asphyxie lors de son interpellation par quatre policiers. Un an et demi plus tard, ces policiers mis en examen continuent d’exercer leurs fonctions en toute impunité, sous protection de Gérald Darmanin.

Mis en examen par l’IGPN pour “homicide involontaire” pour trois des policiers et le dernier pour “témoin assisté”, les documents, dont Mediapart et Le Monde ont eu accès, se montrent assez révélateurs sur leur responsabilité dans les circonstances de la mort de Cédric Chouviat. C’est avec ses premiers éléments que la famille de Cédric, demandent le 10 décembre 2020, à Gérald Darmanin, la suspension des policiers qui font l’objet d’une enquête.

Un article de Médiapart dévoile le courrier que Darmanin a adressé le 21 juin, à la famille en réponse, afin de justifier la non suspension de ces policiers.

D’une part, il affirme que « les premiers éléments de l’enquête n’ont pu permettre d’établir que les fonctionnaires avaient commis, lors de l’interpellation de Monsieur Chouviat, un manquement à leurs obligations tel qu’il soit susceptible de justifier d’une mise à l’écart de leur service », en ne manquant pas de rappeler au tout début de son courrier que la mise en place d’une telle suspension se fait afin « protéger le service des conséquences du comportement de l’un de ses agents.
Elle a même précisément pour but “d’éviter le scandale ou la gêne que peut causer la présence effective dans un emploi public d’un agent soupçonné d’une faute grave”
 ». Dans d’autres mots, le fait qu’une personne soit décédée lors d’un contrôle routier, ne justifie pas leur suspension de ces fonctions aux yeux du Ministre de l’Intérieur. Des affirmations qui d’ailleurs s’avèrent être mensongères car comme le soulève Médiapart, car “les premiers éléments de l’enquête accablent les policiers.” 

Même si dans un premier temps, juste après le décès, la police avait pris la peine de bien maquiller les faits en faisant un compte rendu qui “justifierai”, pour eux, l’interpellation - et donc l’utilisation de la clé d’étranglement et le plaquage ventrale qui auraient causé l’asphyxie de Cédric - les fait enregistrées par la caméra portée par Chouviat sont d’autant plus révélateurs.

Ces derniers montrent donc que ce qui avait commencé par un simple contrôle routier, qui s’avérait déjà assez tendu, les policiers auraient décidé procéder ensuite à une interpellation violente, en utilisant une clé d’étranglement pour après le plaquer au sol. Ce qu’a encore révélé l’enregistrement c’est que Cédric Chouviat, en détresse respiratoire, aurait crié sept fois "j’étouffe". Et alors que les policiers allèguent ne pas l’avoir entendu, les vidéos montrent qu’un des policiers aurait dit juste après “C’est bon, c’est bon, lâche”, mais qu’il ne sera pas suivi par les trois autres policiers qui se tenaient sur lui. Une fois avoir perdu connaissance, les policiers auraient pris trois minutes pour commencer le massage cardiaque, mais il était trop tard. Cédric transporté à l’hôpital avec des signes d’atteinte cérébrale très grave causée par le manque d’oxygène au cerveau, mourra deux jours plus tard.

Ces preuves affligeantes prouvent toute l’impunité dont bénéficient les policiers et que Darmanin tente de cacher. Les propos du ministre démontrent, que les actes des policiers, ayant eu comme aboutissement la mort de quelqu’un ne sont pas considérés comme “un manquement à leur obligations”. Ces propos sont révélateurs d’un mépris pour les violences policières et la mort de Cédric Chouviat et mettent en lumière la véritable nature de cette institution.

D’autre part, en continuant les justifications, une d’autant plus fausse que les autres, Darmanin a également affirmé que « ces fonctionnaires n’ont jamais dans leur carrière été impliqués dans des faits de violence illégitime ». Un fait démenti encore une fois par Médiapart : Le principal policier mis en cause dans le décès de Cédric Chouviat, Michaël P., a fait l’objet d’un signalement auprès de l’IGPN conduisant à une enquête judiciaire pour violences, en avril 2018.
La famille de Cédric, le dénonce en affirmant que c’est une “volonté de protection des policiers en cause” et une façon de plus “de les absoudre en niant jusqu’à l’existence des fautes commises », pour enfin ajouter : « Que faut-il de plus que le décès d’un homme ? ».

Suppression de la clé d’étranglement… ou plutôt remplacée ?

Quelques jours après la mort de Cédric Chouviat et sous pression des mobilisations en cours contre le racisme d’Etat et les violences policières, Christophe Castaner, Ministre de l’Intérieur à l’époque, s’était vu contraint d’annoncer l’interdiction de la méthode connue comme la clé d’étranglement utilisée lors des interpellations et qui avait causé plusieurs décès. Une mesure mise en place officiellement ce 30 juillet… ou presque.

En effet, alors que la clé d’étranglement est une des méthodes qui a fait plus polémique, ce qui n’est pas dit est qu’il existe une méthode similaire qui est “la prise arrière”, par ailleurs conseillée depuis juin 2020. Une technique qui, selon le directeur central du recrutement et de la formation de la police nationale, Philippe Lutz, “peut représenter des similitudes visuelles avec l’étranglement.” et que la seule différence est en réalité “l’absence de pression exercée sur la trachée et le temps d’exécution limité”, c’est-à-dire que la méthode est seulement modifiée par son intensité et sa durée. La réalité montre que ces méthodes, outre le fait d’être d’une extrême violence, ne sont pas suivies et que donc cette méthode n’a pas été interdite mais juste modifiée, en papier. 

Si cela n’était pas suffisant, et pour que les policiers ne soient pas mécontents de cette nouvelle mesure, un courrier envoyé le 30 juillet à propos de cette interdiction, introduit également trois autres techniques qui pourraient la remplacer soit, “l’amener au sol par pivot”, “l’amener au sol par contrôle de demie épaule” et de la “maîtrise par contrôle de la tête”. Ce même courrier affirme également que les policiers seront formés “à l’identification des signes d’une détresse respiratoire”, parce que apparemment pour les policiers le fait de crier 7 fois "j’étouffe" n’est pas suffisant pour savoir si la personne est en train d’être asphyxié. 

Dans ce sens, le gouvernement en cherchant à éteindre les mobilisations en cours, essayerait de faire croire que le cas comme celui de Cédric Chouviat est un cas isolé et qu’il s’agirait des policiers pas assez formés, réglable avec des simples réformes, car “deux d’entre eux n’étaient encore stagiaires” et les deux autres “n’avaient pas eu de stage d’alternance”, selon les commissions de leurs promotion. Néanmoins les nombreux cas quotidiens de violences policières montrent qu’il ne s’agit pas de brebis galeuses mais de la nature propre de cette institution. 

Face au mépris de Darmanin, meilleur défenseur de l’impunité de la police : il faut continuer à exiger, dans la rue justice pour Cédric Chouviat et tous les victimes de violences policières !


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