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Les « travailleurs invités » chez Angela Merkel

Baran Serhad et Yunus Özgür

Pierre Reip

Les « travailleurs invités » chez Angela Merkel

Baran Serhad et Yunus Özgür

Pierre Reip

L’Allemagne, Merkel et les migrants, trois éléments d’une même question qui continue à être au centre des débats européens.

L’Allemagne, Merkel et les migrants, trois éléments d’une même question qui continue à être au centre des débats européens.

Afin de mieux comprendre ce que la presse mainstream a qualifié de « crise des migrants », nous nous sommes entretenus avec Baran Serhad, rédacteur auprès du quotidien Klasse gegen Klasse et Yunus Özgür, étudiant à la Freie Universität Berlin, tous deux militants de l’Organisation Internationaliste Révolutionnaire. Pour RP Dimanche, ils reviennent sur l’histoire de l’immigration en Allemagne et les enjeux contemporains de la question migratoire.

RP Dimanche : L’Allemagne a longtemps été un pays d’émigration, quand est-t-elle est devenue un pays d’immigration ?

Baran Serhad : Je crois que nous devons penser cette question de façon plus complexe. La migration de travail a une longue tradition en Allemagne. Elle remonte aux premiers temps de l’Empire allemand, fondé en 1871, avec l’embauche des travailleurs polonais, dont beaucoup étaient en l’occurrence de confession juive. L’Allemagne a aussi été longtemps un pays d’émigration parce que des millions d’Allemands émigraient vers les Etats-Unis à la même époque. Cela a profondément transformé le pays et entrainé des dynamiques contradictoires au sein de sa classe ouvrière qui est devenue précocement multiethnique, bien que cet aspect soit longtemps resté inhibé.

La deuxième phase d’immigration de travail est celle des « Gastarbeiter » (travailleurs et travailleuses « invité-e-s »), qui va de l’après-guerre jusqu’en 1973, date à laquelle cette politique volontariste d’embauche de travailleurs immigrés a pris fin. L’arrivée des réfugiés ces dernières années s’inscrit ainsi dans une certaine continuité avec les migrations passées. On peut sans risque affirmer que l’Allemagne, depuis qu’elle existe en tant qu’Etat unifié, a toujours eu des travailleurs immigrés qui ont subi de conditions de travail et d’exploitation particulières et qui ont vécu différents conflits d’intégration.

RP dimanche : Peux-tu nous en dire plus sur ces travailleurs immigrés des années 1960-1970 ?

Baran Serhad : Dans la République fédérale allemande des années 1950 et 1960, l’orientation principale des directions syndicales était de rester dans le cadre de la politique de compromis de classe du « partenariat social ». Ils ont tout fait pour éviter d’entrer en conflit avec le gouvernement. L’arrivée des Gastarbeiter a conduit à des prises de position contradictoires au sein des syndicats. A partir des années 1970, la question de l’organisation des travailleurs immigrés dans les syndicats ne pouvait cependant plus être ignorée par les directions syndicales. La volonté des Gastarbeiter d’intégrer les syndicats et d’y porter leurs propres revendications les a contraints à revoir leurs positions. La base a ainsi imposé une forme de pression sur le sommet.

RP dimanche : Y a-t-il eu des mouvements de grève notables dans les années 1970 dans lesquels les travailleurs immigrés ont pu porter leurs revendications ?

Baran Serhad : Oui, et l’exemple le plus connu est celui de la grève des Ford, à Cologne, en 1973. Les travailleurs-ses immigré-e-s turcs y étaient 12000 sur les 24 000 salarié-e-s que comptait l’entreprise. Dans le cadre de cette grève, les Gastarbeiter sont allé au-delà des revendications strictement économiques et ils ont porté des revendications spécifiques aux travailleurs étrangers, qui jusqu’à aujourd’hui n’ont toujours pas été satisfaites.

Lorsque la grève a pris fin sous le coup d’une intervention policière, la presse a titré : « ce ne sont plus des invités / ils ne sont plus les bienvenus (Gäste) ! ». La bureaucratie syndicale avait alors soutenu l’intervention policière et même envoyé des nervis contre les grévistes pour mettre fin au mouvement dans la violence. Les travailleurs allemands et turcs ont été divisés et une tentative importante d’unification des travailleurs sans distinction de leur origine a échoué. Mais cette lutte a été une leçon centrale et elle a une place importante dans la tradition ouvrière en Allemagne.

RP dimanche : A quel moment les syndicats ont-ils fait leurs les revendications des travailleurs immigrés ?

Baran : Alors que le premier traité d’embauche des Gastarbeiter a été signé en 1955 entre l’Allemagne et l’Italie, il a fallu attendre 1971 pour que le congrès fédéral des syndicats allemands prenne en compte les revendications des travailleurs-ses immigré-e-s. Jusque là les directions syndicales considéraient qu’ils n’avaient pas vocation à rester en Allemagne.
En 1972, 550 000 syndiqué-e-s sont des travailleurs-ses immigré-e-s, mais aucun n’est délégué lors du congrès fédéral de l’union syndicale confédérale DGB. Lors de ce congrès il a été reconnu que les travailleurs allemands et immigrés devaient avoir les mêmes droits, mais cette reconnaissance a surtout été de principe. Elle illustre néanmoins un changement de la donne et s’explique par le fait que la bureaucratie syndicale a été submergée par des nouvelles mobilisations et grèves indépendantes dans les usines.
Il n’est pas inutile de rappeler que les syndicats avaient soutenu les traités d’immigration à la condition que les travailleurs allemands restent prioritaires sur les travailleurs étrangers.

Yunus : Et c’est toujours le cas aujourd’hui. La préférence nationale est encore appliquée dans les Agences pour l’emploi (Pôle emploi). L’immigration pour motif de travail est encore autorisée, mais il faut prouver qu’aucun Allemand ne veut ce poste et fournir un document qui l’atteste.

RP dimanche : Pouvez-vous nous en dire plus sur ces grèves des années 1970 dans la République fédérale allemande ?

Baran : En 1973, 335 grèves ont été recensées, impliquant 270000 travailleurs dont de nombreux Gastarbeiter. Elles sont toutes ou presque parties de la base. Ces grèves sont survenues au moment où le gouvernement fédéral avait décidé de mettre fin à la politique d’embauche de travailleurs étrangers. Elles illustrent le fait que les travailleurs-ses immigré-e-s avaient pris depuis longtemps la décision de rester en Allemagne. Elle sont l’expression qu’ils et elles ne voulaient plus être traités comme des travailleuses et des travailleurs de seconde zone.

RP : Les Gastarbeiter ayant massivement fait le choix de s’installer en Allemagne, à partir de quand se met en place une politique d’intégration et quelle forme prend-t-elle ?

Baran : L’intégration en Allemagne a un caractère nationaliste très prononcé. Les aspects politiques et sociaux restent très sous représentés. Le mécanisme d’intégration exige des étrangers qu’ils se soumettent aux conditions du pays d’accueil. Il y a une « crise de l’immigration » en Allemagne parce que les travailleurs-ses ne sont considéré-e-s que comme une force de travail utile. Les progrès de l’intégration sont plus importants dans le domaine économique que dans le domaine social. Les travailleurs peuvent aujourd’hui prétendre à un salaire convenable et ils peuvent s’organiser syndicalement mais ils n’ont pas les droits sociaux et politiques qui leur permettraient de porter leurs revendications au plan politique.

Yunus : on le voit très bien avec la question de la double nationalité allemande et turque. On ne peut conserver les deux nationalités que si on en fait la demande avant l’âge de 20 ans.
Dans le cas contraire, si nous souhaitons obtenir un passeport allemand, il nous faudrait renoncer à notre passeport turc. De même les étrangers qui ont fini leurs études en Allemagne ne peuvent y rester que s’ils prennent un travail qui correspond à leur niveau de qualification.

RP : Peut-on dire que la politique d’immigration s’est empirée ces dernières années ?

Yunus : Le Ministère de l’immigration a lancé une campagne en faveur d’un « droit au retour volontaire », qui vaut aussi pour des Etats qualifiés de « sûrs » comme l’Afghanistan.
Le mot d’ordre de cette campagne est : « vous pouvez rentrer chez vous avec honneur », comme s’il était déshonorant de rester en Allemagne. Des affiches ont été placardées en ce sens dans tous les quartiers où habitent des immigrés.
Le droit d’asile a également a été considérablement restreint en 2015. Le millionnaire Friedrich Merz qui a candidaté sans succès à la direction du parti d’Angela Merkel (la CDU) s’est montré prêt à remettre en cause le droit d’asile, « si les frontières de l’Europe ne s’avèreraient pas sûres ».

Baran : Une nouvelle loi d’immigration est en ce moment en projet. Le gouvernement fédéral veut faire appel à de nouveaux travailleurs immigrés, principalement issus des Balkans, du fait du manque de main d’œuvre, notamment dans les hôpitaux, dans l’industrie lourde et le service public.
Les associations de soutien aux migrants, les syndicats, die Linke et les Verts ont porté la revendication que les réfugiés puissent être pris en compte comme option, comme force de travail dans le cadre de cette nouvelle loi d’immigration, ce qui permettrait de donner une deuxième chance pour les déboutés du droit d’asile, en l’occurrence des emplois très précaires.
L’idée serait ainsi de permettre aux migrants de venir en travailler en Allemagne en acceptant des conditions de travail dégradées. C’est assez cynique et le patronat et les chambres de commerce et de l’industrie s’activent en ce sens en direction des partis politiques pour que cette loi passe rapidement.

RP : Cette loi a-t-elle des chances de passer ?

Yunus : Oui, elle aurait la majorité au Bundestag et devrait être votée dans les prochains mois. Le patronat allemand n’a de cesse de répéter qu’il manque 440 000 travailleurs qualifiés sur le marché du travail en Allemagne. Ce point a également été discuté au sein de la CDU dans le cadre du processus de succession à Angela Merkel à la tête du parti.

RP dimanche : Angela Merkel est souvent présentée comme plus accueillante et généreuse à l’égard des migrants que les autres chefs d’État européens. Partagez-vous cette vision ?

Yunus : Je dirais qu’elle est surtout généreuse à l’égard du capital allemand. Et il faut préciser que cette représentation de la chancelière n’est venue qu’après 2015. Merkel ne s’est certes jamais adressée de façon irrespectueuse à l’égard des migrants, mais elle a toujours pris en considération les craintes des électeurs de droite (CDU, AFD), c’est pour cela que l’on a autant d’expulsions et de restrictions du droit d’asile aujourd’hui.

Baran : Merkel avait affirmé en 2010 que le multiculturalisme avait échoué, ce qui avait fait polémique. Sa phrase de 2015 à propos de la crise des migrants – « Wir schaffen das » (« on va y arriver ») – a été interprétée faussement. Elle ne voulait pas dire « nous allons intégrer tout le monde et créer une société plurielle » mais plutôt « nous avons la possibilité de tenir cette épreuve ».
On a vu ce que signifiait ce « Wir schaffen das », quand a été signé l’accord avec Erdogan et avec d’autres Etats sûrs comme la Libye et l’Afghanistan pour contenir et renvoyer dans leur pays d’origine les réfugiés.

Yunus : C’est particulièrement cynique parce que la bourgeoisie allemande a sa part de responsabilité dans la situation de ces réfugiés, qui ont dû quitter leur pays du fait de guerres qui sont autant de débouchés pour les exportations d’armes allemandes.

RP dimanche : Y a t il une rupture entre la vague migratoire actuelle et celle des Gastarbeiter ?

Baran : En 1955 lors de la signature du premier traité d’immigration, la situation économique était bien différente. La République fédérale allemande connaissait un boom économique reposant sur le modèle fordiste. Les cadences devenaient insoutenables pour les travailleurs allemands et le patronat a cherché une main d’œuvre peu chère pour faire ce travail.
Les Gastarbeiter et leurs enfants font aujourd’hui partie de la société allemande, comme les travailleurs immigrés vietnamiens qui avaient émigrés en Allemagne de l’Est.
La situation actuelle est plus complexe et inégale. Même au sein des travailleurs issus de l’immigration, il existe une certaine distance à l’égard des réfugiés.
De plus, aujourd’hui, les valeurs traditionnelles allemandes sont réaffirmées dans la loi, c’est le cas notamment dans la loi d’immigration votée en 2016 en Bavière. L’adhésion à la culture allemande est imposée de façon beaucoup plus répressive, tandis que les migrants sont criminalisés. Alors qu’on fait encore appel à des travailleurs immigrés pour pallier au manque de main d’oeuvre, il y a des expulsions tous les jours.

RP dimanche : C’est aussi le discours qui a changé. Dans les années 1950 on ne cachait pas le fait que la République fédérale avait besoin de recourir à des travailleurs immigrés. Dans la formule « Wir schaffen das » il y a aussi l’idée que les migrants sont un poids, un fardeau pour la société allemande. Alors que ce sont plutôt les travailleurs immigrés qui portent l’économie du pays. Le capital allemand se met en avant comme un sauveur vertueux, ce qui laisse un espace pour le parti d’extrême droite AFD qui pourra dire : « nous ne voulons pas sauver les migrants ».

Baran : L’AFD dit : « nous ne sommes pas les assistants sociaux du monde ». Cette rhétorique du fardeau est clairement raciste et elle laisse un boulevard à l’AFD. La petite bourgeoisie a l’impression de ne pas profiter de la croissance économique en Allemagne et elle se positionne comme victime. Je ne sais pas ce que l’État allemand pourrait faire de plus pour exprimer son caractère impérialiste mais la petite bourgeoisie allemande se présente toujours comme une victime des migrants et de la mondialisation.

RP dimanche : Le fait que les migrants soient criminalisés et rendus coupables de tous les maux de la société allemande, c’est particulièrement inquiétant quand on connaît l’histoire du pays, non ?

Baran : Oui, et notamment dans le contexte du racisme anti musulman.
Il y a deux catégories du racisme anti-migrants : ils sont présentés soit comme un fardeau, soit comme une menace terroriste.
Les migrants qui viennent d’Europe de l’Est ont des meilleures conditions d’intégration que ceux venus des pays arabes et musulmans. On considérera que toute personne venue d’un pays musulman est sous l’influence de l’islam et qu’elle peut potentiellement détruire la société allemande de l’intérieur.

RP dimanche : Peut-on dire que l’Allemagne est aujourd’hui une société multiculturelle ou est-ce que l’idéal d’une société plurielle entre en contradiction avec le récit national allemand ?

Yunus : La population allemande est multiethnique, mais la société n’est pas multiculturelle. La pluralité n’est tolérée que si elle accepte de ce soumettre à la culture dominante comme le disait Baran tout à l’heure. On peut dire aujourd’hui que cette définition ethnique d’un peuple allemand issu des tribus germaniques n’existe plus. Même si l’AFD et l’extrême droite la revendiquent.
Pour les réfugiés, la gauche allemande s’est limitée au slogan « refugees welcome » et à l’exigence d’une ouverture des frontières, mais du point de vue de leurs droits et de leur organisation ici, c’est resté très limité. Le but est toujours qu’ils s’intègrent au marché du travail mais pas qu’ils entrent de plein pied dans la lutte des classes avec leurs propres revendications.
Il y a eu aussi un mouvement des réfugiés balbutiant qui s’est porté en direction des syndicats. Mais ce que je constate c’est que certains réfugiés ont réussi par ce biais à s’émanciper et à sortir de la misère, mais que pour la plupart c’est resté impossible.
Les Verts sont représentés par un turc, Cem Özdemir, mais ils ne défendent aucune revendication spécifique, ils ne remettent pas en cause le fait que 9 millions de personnes en Allemagne n’ont pas de droit de vote et que leurs droits démocratiques sont attaqués. En ce qui concerne la question de la double nationalité, le fait de garder sa nationalité d’origine et l’impossibilité qu’elle implique de voter en Allemagne est présenté comme un choix personnel.
C’est pourquoi il est important de défendre le fait que la classe ouvrière est multiethnique et que les revendications des migrants et des personnes issues de l’immigration doivent être prises en compte par les organisations de la classe ouvrière.

Baran : le nationalisme allemand se recentre sur son noyau raciste. Est allemand pour les conservateurs et les identaires celui qui a du sang allemand. C’est pourquoi c’est un défi de revendiquer la multiethnicité de la population allemande et de ne pas capituler face à la démagogie irrationnelle de la droite, à laquelle succombent les populistes de gauche comme Sahra Wagenknecht avec le mouvement Aufstehen (Debout), inspiré de la France Insoumise. Figure historique de Die Linke, Sahra Wagenknecht rend l’Etat allemand responsable de la fuite des migrants, mais elle se concentre sur les revendications des « travailleurs allemands de souche ».
La conscience d’une société plurielle et la défense de ses revendications propres sont encore très embryonnaires mais j’ai beaucoup d’espoir dans la jeunesse. On ne compte plus en effet les grèves dans les lycées contre les expulsions et les manifs organisées en soutien aux réfugiés. La grande manifestation « Unteilbar » (inséparable) qui a suivi les événements de [Chemnitz–>http://www.revolutionpermanente.fr/Pogroms-a-Chemnitz-l-Allemagne-sous-la-menace-fasciste] témoigne de l’émergence d’une conscience antiraciste.
On essaye de notre côté à Munich de nous mobiliser aux côtés des réfugiés tout en défendant le fait qu’ils puissent avoir leur propre organisation.

RP dimanche : Les partis « sociaux démocrates » ou « sociaux libéraux » se sont fait un peu partout des défenseurs d’un antiracisme abstrait tout en maintenant une politique répressive et discriminatoire à l’égard des immigrés. Qu’en est-il du SPD (Parti Social-Démocrate) qui a longtemps été le parti de choix des travailleurs immigrés ?

Baran : Il existe une forme de xénophobie particulière à l’égard des réfugiés. Les réformistes et les conservateurs partagent l’idée qu’il doit y avoir des mécanismes de contrôle, c’est également ce que dit Bernie Sanders ou le Labour Party. En Allemagne, les Gastarbeiter turcs ont longtemps voté pour le SPD dans l’espoir de voir leurs droits salariaux reconnus, le parti étant très implanté dans la bureaucratie syndicale. Le SPD a des députés issus de l’immigration, mais il a aussi dans ses rangs un pseudo-intellectuel nommé « Sarrazin » qui écrit des livres racistes comparables à ceux de Zemmour en France. Le SPD est totalement dissous dans les organes de la bourgeoisie et il ne reprend pas les revendications des migrants parce qu’elles impliquent un programme d’action.
On a aussi des immigrés chez les Verts et Die Linke qui défendent le point de vue qu’il est possible de construire une société plurielle et égalitaire au sein du capitalisme. Dans la phase actuelle de l’impérialisme, marquée par la crise de l’ordre multilatéral et la défaite du néolibéralisme, c’est une illusion totale de vouloir construire sans réel combat une société plurielle et égalitaire dans le cadre du capitalisme. Même les objectifs réformistes ne peuvent être obtenus que par la lutte, alors si l’on veut la fin des centres de rétention…
Il faut également fermement s’opposer aux campagnes anti-migrants et considérer que la globalisation et la multiethnicité de la classe ouvrière n’est pas à son désavantage. Cette discussion a déjà eu lieu au sein de la Seconde internationale. Lénine défendait alors la thèse selon laquelle l’internationalisation du prolétariat aidait à répondre aux objectifs et aux perspectives internationalistes de l’ensemble des travailleurs. La crise actuelle, décrite comme « crise des migrants » vient aussi du fait que la classe ouvrière est très fragmentée. Cette crise de l’unité de la classe ouvrière à l’international laisse la place à une rhétorique artificielle et xénophobe. Certains intellectuels affirment que qu’il s’agit d’une crise du « vivre ensemble », je pense que c’est une crise des frontières de l’État-nation capitaliste. L’impérialisme génère des fuites de millions de personnes en direction des pays impérialistes centraux qui espèrent y trouver de meilleures conditions de vie. Ce processus ne peut pas être stoppé par des centres de rétention, une politique raciste et des interventions policières. Il est amené à s’étendre et il y aura toujours plus de réfugiés.

Propos recueillis par Pierre Reip

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