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Interview

Licencié pour avoir "volé" un joint, Dominique Danquoins est convoqué par la police. Trop c’est trop !

Dans l’usine PSA de Valenciennes, la solidarité autour deDominiqueDanquoins, accusé d’avoir voléun joint en caoutchouc qui était destiné à la poubelle, s’organise.L’injustice faite àDominique ne passe pas : « Nous sommes en train de collecter des témoignages. La CGT entend contester en justice le licenciement de ce salarié ». Malgré une pétition signée par 934 salariés du site et les soutiens d’organisations politiques, il a été mis à la porte le 16 octobre avec 13 ans d’ancienneté, pour avoir récupéré quelques mètres de joint usagé dans une poubelle. Une collecte a également été lancée : les chèques sont à adresser à l’ordre de la CGT PSA Valenciennes, 22, rue Colliez, 59300 Valenciennes. DominiqueDanquoins a tenu à remercier tous ses soutiens ainsi que... celui qui l’a dénoncé à la direction. « Sans lui, je n’aurais jamais pris conscience d'à quel point j’étais estimé dans ma société », ironise-t-il dans un tract diffusé par la CGT. Un arrêt de travail et un rassemblement devant le commissariat de police sont organisés pour le jour de sa convocation, ce jeudi 5 novembre à 14h30 sur l’avenue des dentellières, à Valenciennes. Nous republions ci-dessous l’interview de DominiqueDanquoins qu'a recueilli Révolution Permanente.

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Depuis combien de temps travaillais-tu à PSA Valenciennes ?

Cela faisait 13 ans que je travaillais chez PSA, et j’ai fait 10 ans de week-end, chargé de l’entretien des traitements thermiques. En travaillant sans mon chef, car lui travaillait en semaine. Le week-end, c’est moi qui étais en charge de tout : les fours ne devaient jamais s’arrêter sinon cela pouvait coûter très cher à PSA.

Pour te donner un exemple, un arrêt de four pour les pièces pendant 40 minutes, cela peut coûter 120.000 euros. Mais il n’était pas rare que j’intervienne en semaine également pour faire des dépannages. Et pendant toute cette période, je n’ai jamais eu de sanction. Au contraire, j’étais très bien vu par ma hiérarchie.

Comment cela se fait-il que tu aies été licencié ?

En fait cela se passe toujours de la même manière quand les techniciens interviennent pour « refaire » un four. Ils mettent en place une benne pour tous les déchets qu’ils vont sortir du four et mettre le four en conformité avec toutes les pièces. Tout ce qui va dans la benne est à jeter. De mon côté, à aucun moment je pensais que de prendre quelques mètres de joint aurait pu m’amener là ou je suis aujourd’hui : à la porte, alors que j’ai un enfant à charge.

Comme plein d’ouvriers, aujourd’hui, je suis très juste financièrement. J’ai vu ces joints qui peuvent encore servir pour ma chaudière en panne. Et une chaudière défectueuse, c’est des risques d’émanations toxiques. J’ai pensé à mon fils. Et comme tout allait être jeté, j’ai pris 3 mètres de joint dans la benne. Mais malheureusement, un collègue m’a vu faire et m’a dénoncé à la direction. Alors c’est vrai qu’aujourd’hui celui qui m’a dénoncé est très mal et n’ose plus se montrer. Mais ce jour-là, à la sortie de l’usine, les gardiens m’ont dit « tu as été dénoncé et filmé. On est obligé de te ramener au local du gardiennage pour une fouille, sinon on risque aussi de se faire licencier en cas de refus ». C’est à ce moment que la direction m’a signifié ma mise à pied conservatoire, le 12 septembre 2015, à 20h20.

Tu as d’abord été convoqué à un entretien disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement. Comment les choses se sont passées avec la direction ?

Eh bien c’était assez fou. Le responsable, je ne le connaissais même pas, puisque étant de week-end je n’ai jamais affaire à eux. Il m’a juste dit qu’il n’aimerait pas être à ma place et que je « vole » un capuchon de stylo ou 400.000 euros, j’avais volé l’entreprise. J’étais effondré devant un tel manque d’humanité. Mon seul crime, c’était d’avoir pris du joint en caoutchouc qui allait être mis à la poubelle, pour faire une petite réparation chez moi. Pour qu’on puisse se chauffer, moi et mon fils. Et le plus dramatique dans cette affaire, c’est que quand je suis en famille ou avec des amis, j’avais pour habitude de dire qu’il y deux choses importantes pour moi, PSA Valenciennes et mon fils. Aujourd’hui je n’ai plus que mon fils. Je n’ai plus de travail. C’est ça la justice dans ce pays.

Et à l’usine, il y a eu de la solidarité ?

Eh bien j’étais très surpris par l’émotion que mon affaire a suscitée dans la boite. J’ai reçu plein de messages de sympathie des ouvriers, bien sûr, mais aussi des chefs qui m’ont appelé à la maison , pour me remonter le moral, me dire qu’ils ne pouvaient pas être solidaires officiellement puisqu’ils subissaient des pressions pour que je me fasse licencier. Mais malgré une vraie campagne menée par la CFTC et de la CFE-CGC, la pétition faite par la CGT de PSA Valenciennes a récolté plus de 900 signatures sur un effectif de 1400. Cela m’a fait chaud au cœur et montre bien que la solidarité, ça existe.

Et le 5 novembre, tu seras convoqué au commissariat puisque non seulement PSA t’a licencié mais a également porté plainte contre toi pour vol de l’entreprise ?

Oui c’est vraiment de l’acharnement de la part de PSA. Et en plus la direction ment ouvertement pour faire passer la pilule auprès de l’opinion publique puisque ce licenciement est une vraie injustice. La direction a été obligée de communiquer et elle veut faire croire que j’aurais volé 46 mètres de joint et qu’il y avait une recrudescence des vols depuis trois mois. Ils veulent me coller tout cela sur le dos. En fait j’ai été en maladie pendant 2 mois pour une opération et je n’ai repris le travail que le 4 septembre. Mais le 5 novembre il y aura une forte mobilisation pour me soutenir. Il n’est pas dit que PSA Valenciennes arrive à produire quoi que ce soit ce jour-là.

Dans Révolution Permanente, on met au centre de nos préoccupations les questions de dictature patronale et de solidarité. Comment vois-tu la situation actuelle, comme ce qui se joue à Air France ?

Maintenant je vois les choses un peu autrement. Quand je pense à tous ces dirigeants qui font des saloperies et partent avec des millions de prime et nous, les ouvriers, qui faisons fonctionner la société toute entière, on nous méprise et on nous met à la porte pour trois fois rien. Je crois qu’il faut tous s’unir contre cette dictature, chez PSA Valenciennes mais aussi à Air France. Nous vivons les mêmes attaques brutales partout et c’est tous ensemble qu’il faudra riposter.

Propos recueillis par Vincent Duse, CGT PSA Mulhouse


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