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VICTOIRE DU « OXI » EN GRECE

Marine Le Pen : un détournement scandaleux du referendum grec

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Claire Manor

Le propre d’un référendum est de concentrer dans des termes extrêmement brefs « Oui » ou « Non » des convictions et des choix politiques qui peuvent être nuancés, voire diamétralement opposés. Pain béni pour des manœuvriers qui, comme une Marine Le Pen, un Florian Philippot ou un Dupont-Aignan, sont capables de récupérer l’expression populaire à leur profit et de travestir la victoire du « non » en Grèce, en triomphe de leurs propres idées.

Tirer les bénéfices d’une victoire qui n’est pas celle de son camp

Deux forces politiques principales ont mené campagne pour le « Non ». Alexis Tsipras à la tête de Syriza, qui a fait ouvertement appel à un soutien populaire pour retrouver un meilleur rapport de force dans ses négociations avec la Troïka, et Aube Dorée, parti néo-nazi qui a fait campagne pour le « non » sur une base nationaliste et souverainiste de sortie de l’Euro et de l’UE.

Pourtant, la présidente du FN qui a fait campagne en faveur du « Non » conformément à ses positions déjà anciennes sur la question européenne, n’a pas hésité une nouvelle fois à user de tous les artifices du discours populiste en exprimant haut et fort sa reconnaissance envers Tsipras pour avoir engagé un rapport de force avec la Troika qui incarne à ses yeux le « mondialisme ». Elle lui a même fait l’honneur de le ranger parmi les « patriotes ». Quant à Florian Filippot, il achève l’annexion de Syriza dans le camp du FN et de la sortie de la zone euro en déclarant que le résultat du référendum marque « le début de la fin de la zone euro et a démontré que l’Union européenne n’est pas irréversible ».

Transformés en laudateurs de Tsipras et du succès obtenu par le « Non », les deux ténors du FN, déguisent à leur profit les positions d’Alexis Tsípras qui n’exprime aucun souhait de sortie de la Grèce de la monnaie unique, et encore moins de sa dissolution générale.

La seule formation politique qui ait porté, durant la campagne du référendum, les couleurs du souverainisme et exprimé des positions proches de celles du FN, c’est Aube Dorée emmenée par son chef néo-nazi Nikos Michaloliakos. Or, Aube Dorée avait obtenu 7% des voix aux dernières législatives de 2012, ce qui est beaucoup pour un parti néo-nazi mais peu au regard des 61,3 % de voix en faveur du « NON ».

On ne peut évidemment en aucun cas assimiler la victoire du NON à une volonté nationaliste et souverainiste. Il s’agit d’une mobilisation de l’ensemble des travailleurs et des couches surexploitées contre une austérité confinant à une mort programmée des forces vives de la Grèce ; la simple réalité des chiffres aurait dû interdire à Marine Le Pen de s’emparer de ce score historique au profit de son camp.

Flatter le « peuple » dans le sens du poil pour vendre sa marchandise nationaliste et xénophobe.

Marine Le Pen n’est évidemment pas dupe de ses propres mensonges mais elle saisit toutes les opportunités pour donner de la voix en faveur de son programme d’extrême droite.

Flatterie et indignation d’abord. Elle déclare : « La victoire du « Non » au référendum grec ce soir est la victoire du peuple contre l’oligarchie de l’Union Européenne ! C’est un Non de liberté, de rébellion face aux diktats européens… [et à] l’austérité la plus inhumaine et la plus contre-productive. C’est un Non de liberté face à la propagande abjecte. »

Une bonne dose de xénophobie ensuite. Elle ajoute : « Ce Non ….c’est aussi l’espérance pour le contribuable français de ne plus avoir à sortir une nouvelle fois le chéquier pour verser quelques milliards supplémentaires dans le trou sans fond de la dette grecque…

Une récupération finale de la signification du vote. Elle termine sur son registre favori : « Ce Non du peuple grec doit permettre un changement d’approche salutaire. Les pays européens doivent profiter de cet événement pour se mettre autour d’une table, constater l’échec radical de l’euro et de l’austérité, et organiser la dissolution concertée de la monnaie unique ».

Les ennemis des travailleurs grecs ne sont pas les autres pays mais la bourgeoisie capitaliste

Quoi qu’il en soit des incantations de Marine Le Pen, le sort de la Grèce n’est pas tranché à ce jour et la question du « Grexit » reste en suspens. Mais il est clair que les ennemis des travailleurs et de la population grecque ne se trouvent pas seulement au sein de la Troika. Le repli « nationaliste » ne serait pas plus en Grèce qu’ailleurs la solution pour sortir de l’impasse de l’austérité. La notion de « peuple » telle que Marine Le Pen se plaît à la mettre en avant sert à gommer les oppositions entre les classes, entre les travailleurs et leurs exploiteurs.

Quand bien même la Grèce se retrouverait indépendante de l’UE et frappant monnaie, il resterait aux travailleuses et travailleurs grecs trois grandes questions à résoudre pour prendre en main leur avenir : nationaliser les banques sous leur propre contrôle ; s’affronter à leur propre bourgeoisie et à ses privilèges, aux armateurs, au clergé, aux propriétaires étrangers des infrastructures touristiques ; nouer des liens avec les travailleurs des autres pays. C’est de cette façon seulement qu’ils pourraient développer leur capacité à assurer la satisfaction de leurs besoins qui leur fait actuellement si cruellement défaut.


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