×

« Outre-mer »

Mayotte : le Département exclut les sans-papiers des centres de protection maternelle et infantile

A une semaine de la date prévu pour le lancement de l’opération d’expulsion massive « Wuambushu », le conseil départemental de Mayotte a décidé de limiter l’accès aux soins des étrangers, poursuivant la politique xénophobe et anti-immigrés de l’État français.

Raji Samuthiram

15 avril 2023

Facebook Twitter

Jeudi, dans le cadre du vote du budget de la collectivité, le conseil départemental de Mayotte a décidé de ne plus accueillir les personnes sans papiers ou sans assurances dans les centres de protection maternelle et infantile (PMI), dont dépendent beaucoup d’immigrés venus des Comores et qui seront visés par l’opération d’expulsion massive prévue fin avril par Darmanin.

A Mayotte, les centre PMI sont un premier recours pour l’accès aux soins car l’aide médicale aux étrangers (AME) n’existe pas du fait du statut d’exception imposé à l’île. Ce dispositif qui existe en métropole, permet l’accès aux soins pour les personnes en situation irrégulière. Alors que le discours xénophobe et anti-comorien des élus mahorais reprend dans le cadre de l’opération « Wuambushu », les centres PMI font l’objet d’un sous-financement depuis un certain temps. Ces centres s’adressent notamment aux femmes enceintes sans-papiers qui sont souvent présentées comme des menaces migratoires par la propagande xénophobe.

Cette exclusion va davantage limiter l’accès aux soins des étrangers et empirer une situation sanitaire déjà catastrophique dans les bidonvilles où beaucoup d’immigrés sont contraints de vivre. Début avril, plus de 170 professionnels de santé s’étaient exprimés dans une tribune pour dénoncer les « conséquences dramatiques » que l’opération « Wuambushu », pilotée par le ministre de l’intérieur et des Outre-Mer Gérald Darmanin, pourrait avoir sur la santé publique.

La xénophobie pour justifier la casse des services publics

Les PMI étant financés par la collectivité, le conseil départemental a justifié sa décision en invoquant la nécessité de restreindre le budget des PMI alors qu’une hausse de dépenses de fonctionnement de 9% et une sécheresse aiguë sont prévues cette année. A l’annonce de l’exclusion des sans-papiers et des non-assurés des PMI, les élus mahorais ont cherché à justifier leur décision en pointant la responsabilité de l’État français : Madi Moussa Velou, vice-président du Conseil Départemental, a ainsi déclaré sur Mayotte la 1ère que « l’aide médicale d’État est une nécessité ». Désormais, les étrangers qui dépendent de la PMI seront priés de se rendre au Centre hospitalier de Mayotte (CHM), financé par l’État.

Cette décision ne devrait pourtant qu’aggraver une situation sociale alarmante à Mayotte, avec 77% des habitants vivant sous le seuil de pauvreté. Dans ce contexte, l’État français et les élus locaux mahorais instrumentalisent l’immigration comorienne comme bouc émissaire pour justifier une restriction des droits sociaux. Pourtant, l’opération de Darmanin et la chasse aux comoriens, complétées par leur exclusion de l’accès aux aides publiques dont les soins de santé, ne viennent en rien résoudre la crise sociale à Mayotte.

En hexagone et à Mayotte, l’accès aux soins menacée pour les étrangers

Si cette attaque contre l’accès aux soins des immigrés se joue à Mayotte, elle est également en cours dans l’hexagone, où la commission des lois au sénat avait acté la suppression de l’AME dans le cadre du projet de loi Darmanin, reporté pour l’instant mais que Macron prévoit de « découper ». La proposition était de remplacer l’AME par une aide médicale d’urgence, qui soumettrait à des conditions encore plus strictes l’accès aux soins pour les personnes en situation irrégulières. Une démarche qui cherche à agiter encore une fois la menace migratoire pour justifier une politique austéritaire, alors que l’AME représente moins de 0,5% des dépenses de santé.

La non-existence de l’AME à Mayotte jusqu’ici témoigne du traitement d’exception et du statut néo-colonial de l’île. En effet, il existe déjà de nombreuses mesures dérogatoires qui viennent restreindre le droit à la circulation des personnes et le droit à une protection de santé, par exemple. Ainsi, les expulsions et les reconductions à la frontière y sont largement facilitées par rapport à l’hexagone, avec une omniprésence policière dans les écoles, les centres de soins, et les locaux associatifs.

L’opération « Wuambushu » prévue pour fin avril est une dernière expression extrêmement violente de la politique xénophobe de l’État français. Cette opération viserait à expulser jusqu’à 24 000 personnes d’ici le mois de juin, dans une clandestinité alarmante. Dans ce sens, alors que le gouvernement a été contraint de reculer sur le projet de loi immigration face au mouvement contre la réforme des retraites, il est urgent de la dénoncer, et de faire front face à la répression afin d’exiger le retrait définitif de tous les projets racistes et colonialistes du gouvernement.


Facebook Twitter
Mumia Abu Jamal, plus vieux prisonnier politique du monde, fête ses 70 ans dans les prisons américaines

Mumia Abu Jamal, plus vieux prisonnier politique du monde, fête ses 70 ans dans les prisons américaines

La manifestation antiraciste du 21 avril autorisée : tous dans la rue ce dimanche à Paris !

La manifestation antiraciste du 21 avril autorisée : tous dans la rue ce dimanche à Paris !

Répression coloniale. A Pointe-à-Pitre, Darmanin instaure un couvre-feu pour les mineurs

Répression coloniale. A Pointe-à-Pitre, Darmanin instaure un couvre-feu pour les mineurs

Des AED condamnés à de la prison avec sursis pour avoir dénoncé la répression syndicale et le racisme

Des AED condamnés à de la prison avec sursis pour avoir dénoncé la répression syndicale et le racisme

Marche antiraciste du 21 avril interdite à Paris. Face à la répression, faisons front !

Marche antiraciste du 21 avril interdite à Paris. Face à la répression, faisons front !

Peines contre les parents, internats : Attal s'en prend encore aux jeunes de quartiers populaires

Peines contre les parents, internats : Attal s’en prend encore aux jeunes de quartiers populaires

« Place Nette » à Mayotte : le gouvernement relance l'opération Wuambushu pour des expulsions de masse

« Place Nette » à Mayotte : le gouvernement relance l’opération Wuambushu pour des expulsions de masse

Solidarité avec les sans-papiers et les mineurs isolés : tous dans la rue ce vendredi 12 avril !

Solidarité avec les sans-papiers et les mineurs isolés : tous dans la rue ce vendredi 12 avril !