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« la liberté du renard dans un poulailler »

Mexique : « libéralisation » des hydrocarbures, nouveau coup dur au pouvoir d’achat des travailleurs

Farid Reyes Au Mexique ont été annoncées des mesures de libéralisation du marché de l’énergie et la privatisation de l’entreprise publique PEMEX pour 2017. D’emblée, une augmentation de 20% du prix de l’essence a été annoncée. Face à la contestation populaire, la pression politique et médiatique est de plus en plus forte : les économistes et les politiques défendent l’idée que, dans l’intérêt général, il faudrait mieux laisser le libre marché dicter le prix des combustibles et de l’énergie. Les bons principes libéraux sont de sorties pour justifier ce qui, à l’évidence, est la meilleure solution pour les entreprises et parmi les pires pour l’immense majorité de la population mexicaine. D’ores et déjà, la contestation se fait entendre, avec des manifestations pour protester contre cette mesure qui va aggraver la tendance inflationniste de l’économie mexicaine et la fonte du pouvoir d’achat des travailleurs, déjà bien entamé par des salaires parmi les plus faibles au monde.

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L’idée de « laissez faire le marché » n’est pas nouvelle. C’est un des premiers postulats de l’économie bourgeoise : Adam Smith, économiste classique et fondateur du libéralisme économique au 18ème siècle conseillait de laissez faire la « main invisible du marché » pour réguler l’économie. Avec le temps, cette « main invisible » s’est révélée profiter et donner un pouvoir croissant aux secteurs de la bourgeoisie qui ont progressivement transformé le « libre marché » en monopoles, directement liés au pouvoir politique.

Selon ces postulats (qui clairement obéissent aux intérêts des grandes entreprises), il est plus préjudiciable de maintenir des subventions, notamment sur l’énergie, que de laisser les prix s’envoler selon les bons vouloirs du marché et des aléas internationaux. Les subventions, dans cette perspective, alourdissent les dépenses publiques, accroissent les déficits, et le poids des impôts.

Cependant, cette perspective masque le fait que le prix de l’énergie et des combustibles pourraient être bien en deçà de ce qu’ils sont. D’une part, en sortant de la logique de profit des entreprises, et de l’autre, en imposant à l’Etat capitaliste son financement à partir d’impôt prélevés sur les entreprises par exemple. Cependant, la caste politique fait tout pour pousser à l’investissement privée et donner le change à la population ensuite en signalant que seul l’investissement privé permet de créer de l’emploi, de la croissance et du bien-être. En d’autres termes, que ce serait seulement en favorisant les intérêts des grandes entreprises que tout le monde pourrait aller mieux. Rien de plus faux.

Le prix de l’essence augmente et continuera à augmenter…

Nous ne vivons pas sous le capitalisme de la libre concurrence du XIXème siècle avec des centaines de producteurs qui se concurrencent les unes les autres. Nous vivons une époque où les marchés sont dominés par de forts monopoles et oligopoles. Il est erroné de croire que les consommateurs peuvent pénaliser les entreprises qui augmentent trop fortement leurs prix. En réalité, ce sont les oligopoles qui s’entendent pour établir les prix et les normes. Ils se font concurrence mais pas pour offrir au prix le plus bas les biens et les services, mais pour maximiser leurs profits. A l’image des banques qui s’entendent pour appliquer des taux d’intérêt élevés auprès des usagers, un marché dominé par une poignée de grandes entreprises peut facilement contrôler les paramètres du marché qui convienne le mieux à la bourgeoisie du secteur. Et c’est ce qui se passe sur le marché de l’essence et des hydrocarbures au Mexique.

La seule chose que va apporter un prix de l’essence « libéralisé » est l’augmentation du coût de l’énergie. Les multinationales fixent les prix en fonction de leurs intérêts, des prix fixés par ceux qui spéculent en bourse, et du taux de change peso-dollar. Ils anticipent une hausse des prix en février, pour, en mars, laisser le prix se fixer « librement » sur le marché.

Cela va avoir pour corolaire l’augmentation du coût de la vie et la baisse du pouvoir d’achat pour les masses travailleuses du Mexique, dans un contexte où les salaires y sont parmi les plus bas au monde. Les prix des aliments de bases, des médicaments et des soins, du transport, ne cessent d’augmenter, provoquant une spirale inflationniste, causé par la dépréciation du peso par rapport au dollar en augmentation et l’arrivée de Donald Trump.

L’autre solution, ouvrière et populaire

Le président Peña Nieto a cherché à expliquer du projet de libéralisation des carburants sur une chaîne nationale : il a centré son message sur le fait que la mesure était nécessaire pour compenser la hausse du prix du pétrole sur le marché international. Un autre mensonge.

Au cours des dernières années, les prix du pétrole ont augmenté. Mais voilà bientôt deux ans que ces derniers ont connu une baisse constante, sans que cela ne ce soit traduit par une baisse à la pompe. L’argument du gouvernement, qui prétend ne pouvoir continuer à subventionner les combustibles faute de ressources, n’est pas non plus recevable. Après avoir privatisé PEMEX, entreprise publique chargée de l’exploitation du pétrole, offert les ressources naturelles à l’impérialisme – en l’occurrence, rien de plus logique que de se retrouver avec des difficultés financières. Encore plus quand on regarde ce que coûte le gouvernement.

Pour maintenir les subventions, il faut, tout d’abord, imposer fortement les entreprises et les banques qui n’en payent pas ou pratiquement pas, faire des coupes dans les salaires des députés et des fonctionnaires de l’Etat, notamment pour les ministres de la court suprême, afin qu’ils touchent la même chose qu’un travailleur du rang. Mais il faut faire encore plus.

Il est nécessaire de re-nationaliser toute l’industrie énergétique et la mettre au service des besoins des travailleurs, de la majorité de la population. PEMEX ne doit pas être laissé dans les mains des bureaucrates corrompus de l’Etat capitaliste mexicain, mais sous le contrôle démocratique de ses propres travailleurs : ouvriers, techniciens, ingénieurs avec l’appui des spécialistes et chercheurs des universités publiques. Ce serait une manière de faire participer la science et la technologie pour trouver des combustibles et des modes de production énergétiques non polluants et de développer des systèmes de transports publics efficaces.

L’affrontement avec le pouvoir capitaliste est le seul moyen de trouver une solution favorable aux intérêts de la majorité des travailleurs alors que la crise traverse le pays. Une entreprise publique fonctionne pour offrir un service à la population, elle doit uniquement couvrir ses coûts et investir dans des innovations, là où une entreprise privée ne cherche qu’à s’attirer plus de profit. Il y a là la contradiction fondamentale de la société capitaliste, entre les riches et les travailleurs, la bourgeoisie et le peuple, eux et nous.


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