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Vérité et justice

Mort d’Adama. Les gendarmes donnent une 3ème version où ils n’ont pas fait de plaquage ventral

Une nouvelle expertise indépendante demandée par la famille d'Adama a indiqué que le plaquage ventral était bel et bien à l'origine de son décès. C'est dans ce contexte que les gendarmes ont changé leur version des faits affirmant qu'aucun d'entre eux n'avaient effectué de plaquage ventral.

Sofia Malone

11 juin 2020

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Crédit photo : O Phil des Contrastes

« La nouvelle version des faits livrée par les gendarmes constitue un aveu de culpabilité ». Ce sont les mots de l’avocat de la famille Traoré, Yassine Bouzrou, face à la nouvelle version des faits avancée par les gendarmes ayant participé à l’interpellation d’Adama le jour de son décès. Ce mardi 9 juin, Pascal Rouiller et Sandra Chirac Kollarik, avocats de l’un des trois gendarmes, ont dénoncé des "amalgames" et assurent qu’à « aucun moment les trois gendarmes n’ont fait peser le poids de leurs corps » sur lui.

Cette nouvelle version permet à ces derniers d’affirmer que « La situation est clairement établie, les gendarmes sont injustement accusés ». Seulement, ce qu’ils omettent de dire c’est que cette nouvelle version des faits, qui disculperait les gendarmes, est basée sur des mensonges, et constitue la troisième version donnée par les gendarmes.

Yassine Bouzrou explique en effet : « Dans une première version des faits, les gendarmes indiquent qu’ils sont à trois sur le corps d’Adama Traoré. Concernant la deuxième version, alors que les gendarmes sont entendus par les juges d’instruction, ils indiquent « qu’il n’y a qu’un seul gendarme qui met ses deux genoux sur le dos d’Adama Traoré et que les deux autres se contentent » de tenir « les jambes et les bras ». Aujourd’hui, ces derniers prétendent qu’il n’y aurait eu aucun plaquage ventral, de la part d’aucun gendarme...

Ces changements de versions dévoilent clairement les mensonges des gendarmes, qui font tout pour se disculper de toute responsabilité à l’égard de la mort d’Adama. « Ces gendarmes sont des menteurs parce qu’ils donnent trois versions différentes », a réagit Yassine Bouzrou. Ce changement de version apparaît étrangement quelques jours après la contre expertise médicale faite à la demande de la famille Traoré qui a démontrée que c’était bel et bien un plaquage ventral qui est la cause du décès d’Adama, montrant par là la responsabilité et la culpabilité des gendarmes .

En effet, cette expertise réalisée de manière indépendante par un professeur de médecine, avec des médecins spécialistes en cardiologie, dément les affirmations faites dans les expertises qui disculpent les gendarmes, à savoir qu’Adama serait décédé d’un œdème cardiogénique. Dans cette expertise, le médecin s’est ainsi prononcé : « en faveur du décès faisant suite à un syndrome asphyxique par plaquage ventral ». Pour lui, « aucune autre cause de décès n’est identifiée ». Une expertise qui corrobore dès-lors les accusations portées à l’encontre des gendarmes ainsi que leur responsabilité dans le décès d’Adama.

C’est dans ce contexte et seulement quelques jours après le dévoilement de cette expertise que les gendarmes ont changé pour la troisième fois de version, affirmant n’avoir procédé à aucun plaquage ventral. Un mensonge donc pour tenter de sauver leurs peaux et de nier leur culpabilité. « Les gendarmes ont maladroitement tenté de s’adapter à l’évolution des rapports médicaux transmis par les parties civiles, lesquels ont été réalisés par des professeurs de médecine spécialistes et réputés » dénonce Yassine Bouzrou.

Suite à cette troisième version, l’avocat de la famille a demandé en conséquence à la justice de « de convoquer ces gendarmes en vue d’une mise en examen, conformément à la loi ». Cependant, malgré ces mensonges, la mise en examen des gendarmes par la justice n’est pas gagnée.

Si Yassine Bouzrou déclare que « Dans un dossier classique, lorsqu’un suspect se rétracte et livre une nouvelle version, il est peu fréquent que la justice n’en tire pas des conséquences négatives », force est de constater que lorsqu’il s’agit de gendarmes ou de policiers, l’impunité judiciaire est de mise. Le fait que ces derniers se permettent par ailleurs de changer radicalement et plusieurs fois de versions, comme si cela était anodin et normal, témoignent du sentiment d’impunité qu’ils ont. Une impunité dont ils jouissent en effet réellement.

Ainsi, si les gendarmes étaient déjà revenus une fois sur leur version des faits, la justice n’en a jamais pris compte. Ces mensonges n’ont jamais joué contre eux. Au contraire, depuis le début de l’affaire, la justice se range du côté des gendarmes. Tout est mis en place pour mettre des bâtons dans les roues à la famille et les proches d’Adama dans leur combat pour la vérité et la justice : fausses expertises, répression, acharnement judiciaire et policier, interdiction de manifester...

Ce n’est seulement que par la mobilisation que la famille d’Adama et toutes les personnes qui se battent à leurs côtés pour obtenir vérité et justice ont obtenu des avancées. Ainsi, ce n’est que le lendemain de la mobilisation historique du 2 juin que la justice a enfin accepté d’entendre les deux témoins clés de l’affaire . Jusqu’à présent, et ce depuis 4 ans, la famille et les proches d’Adama avaient reçu jusque là que des fins de non-recevoir de la part de l’institution judiciaire.

Ainsi, si ce nouveau mensonge de la part des gendarmes va dans le sens de pointer leur culpabilité, ce n’est qu’en comptant sur nos propres forces, et en amplifiant la mobilisation en cours que nous arriverons à obtenir Vérité et Justice pour Adama.


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