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Derrière la loi Travail, des millions de femmes précaires et surexploitées

Myriam El Khomri est-elle une femme comme les autres ?

Après le malaise de la Ministre hier, grands médias et membres de la classe politique en ont profité pour faire tourner toutes les discussions autour d'un élément apparement central de la situation, autour d'une révélation magistrale : Madame la Ministre est une femme ! Marah Macna

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Plus précisément, Madame la Ministre est une femme « courageuse qui a des convictions », nous explique François Hollande. « Une femme forte qui est confrontée à un moment difficile », nous précise Jean-Christophe Cambadélis. Myriam El Khomri elle-même explique qu’elle a « plusieurs handicaps » : « je suis jeune, je suis femme et je veux faire bouger les choses pour mon pays ». Enfin, Ségolène Royal a expliqué que la ministre « a été la cible d’une attaque violente venant d’une femme  », faisant référence au fait que la pétition en ligne a été lancé par Caroline de Haas, militante féministe.

Que les femmes soient plus souvent la cible d’attaque « sous la ceinture » lorsqu’elles font de la politique, ceci est une chose évidente et à combattre. Les remarques sur les jupes de Cécile Duflot ou les enfants de Ségolène Royal ont été des symboles de cette situation, où la classe politique dominante se fait le théâtre du sexisme de cette société. Mais pour un gouvernement qui n’a pas hésité à nommer l’un de ses ministères « Ministère des Droits des femmes, de la Famille et de l’enfance », leur nouveau discours anti-sexiste n’est ni plus ni moins que de l’hypocrisie. Par ailleurs, réduire les critiques à la ministre à des expressions sexistes, tout en semblant oublier que celle-ci est en train d’incarner l’un des projets de loi les plus réactionnaires pour les femmes travailleuses, ressemble à une vaste blague...

Loi El Khomri : derrière la « jeune femme ministre », une attaque en règle contre les conditions de travail des femmes

Sur plusieurs aspects, la loi El Khomri vient accentuer les difficultés vécues par les femmes sur leur lieu de travail. Dans le monde du travail, celles-ci sont déjà bien souvent consignées aux emplois les plus précaires et aux salaires de misère. Tous temps de travail confondus, les hommes gagnent encore 35 % de plus que les femmes ! Et quant aux temps de travail « négociés » (entendre : imposés) plus facilement au sein de chaque entreprise, les femmes qui se voient imposer des temps partiels connaissent déjà ça très bien ! Il ne manquait plus qu’une loi du gouvernement pour renforcer cette situation dans le code du travail...

Par ailleurs, lorsque le projet de loi veut faciliter les licenciements abusifs en mettant en place une peine « plafond » pour les employeurs qui seraient condamnés par les prud’hommes, comment ne pas penser aux femmes travailleuses qui subissent déjà de nombreux licenciements pour le simple fait d’être femme, du fait de congés maternités jugés pas assez profitables par l’entreprise ? Comment ne pas penser à tous les cas de harcèlement sexuel au sein de l’entreprise qui sont « gérés » par les patrons en licenciant celle qui parlent trop ? Facile de se débarrasser d’une employée un peu trop « bavarde » sur les agissements sexistes du patron !

Enfin, un aspect de la loi sur le temps de repos semble tout trouvé pour les emplois les plus féminisés. En effet, le projet de loi prévoit que les 11 heures de repos légales, auquel chaque travailleur a droit toutes les 24 heures, pourront désormais être fractionnées, découpées. Les femmes, surreprésentées dans des emplois comme ceux des infirmières, aides-soignantes ou caissières connaissent déjà bien cette méthode patronale, qui vise à découper le plus possible la vie des travailleurs pour que leurs horaires de travail soient les plus profitables, et qu’importe si cela conduit à l’impossibilité d’avoir une vie personnelle de famille ou sociale décentes. Et pour l’ensemble des travailleurs, quand les horaires de repos sont à ce point impossibles et qu’il devient de moins en moins possible de s’occuper des enfants par manque de temps, sur qui retombe la charge familiale ? Les femmes bien entendu ! La boucle est bouclée : pour le gouvernement, lutter contre le chômage, c’est bien renforcer le lien entre « les droits des femmes », la Famille et l’Enfance... Travail, Famille, Patrie.

En définitive, si Madame la Ministre est bel et bien une femme, c’est une femme qui n’a pas grand-chose à voir avec les intérêts des millions de femmes qui travaillent en France et subissent tous les jours le sexisme au travail et dans la rue. Nous n’avons donc rien à attendre de cette « jeune femme ministre », qui ne fait que défendre les intérêts d’un patronat à l’offensive pour nous exploiter toujours plus. Et puisque nous sommes à quelques jours de la Journée Internationale de lutte pour les Droits des femmes, il est bien le moment de le dire haut et fort : ce 8 mars doit être l’occasion de faire entendre la colère des femmes, et leur détermination à lutter contre le projet de loi de Madame la Ministre !


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