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Négociations corporatistes : le gouvernement cherche à isoler les grévistes de la RATP et de la SNCF

Opéra de Paris, EDF, contrôleurs aériens... la liste des secteurs avec lesquels le gouvernement tente de conclure des accords corporatistes ne cesse de s'allonger. Son objectif ? Tenter d’isoler les grévistes de la RATP et de la SNCF qui démontrent une détermination à toute épreuve. Il s’agit de montrer que la « négociation », ça paie pour forger l’opinion publique contre les « jusque-boutistes ». Le problème, c’est que c'est à double tranchant. D’abord, ça ne marche pas tout le temps, comme en témoignent les danseurs de l’Opéra qui lui ont retourné le boomerang. Ensuite, le gouvernement affaiblit son discours sur la pseudo universalité de sa réforme.

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Crédit photo : O Phil des Contrastes

Des négociations au détriment de ses soutiens à droite : Macron risque l’isolement

Après avoir garanti aux militaires, parlementaires et policiers que leur régime ne serait pas modifié par la réforme, le gouvernement est à la recherche d’interlocuteurs pour ouvrir le dialogue. Il avait déjà annoncé que les pompiers seraient exclus de la réforme des retraites. Ensuite, il a négocié des miettes avec les directions syndicales des pilotes de ligne et personnels navigants, ces derniers ont trahi sur tout la ligne, mais aussi les contrôleurs aériens de bénéficier auquel l’Etat a proposé une garantie. Dernier en date, l’Opéra de Paris à qui le gouvernement a proposé - en vain - de restreindre l’application de la réforme aux entrants sur le monde du travail à partir de 2022. 

Cette dynamique de la concertation fragilise l’image de fermeté qu’essayait de se donner Macron pour redorer son image à droite. Malgré le cadeau de l’âge pivot fait en direction des grandes entreprises et du Medef, le gouvernement peine à convaincre sur sa droite tant il cherche à négocier. Tandis qu’Edouard Philippe soulignait que ce dernier restait "ferme mais pas fermé", l’impression donnée pour ses électeurs de droite est davantage celle de tout lâcher, au point que certains éditorialistes en viennent à appeler à la suspension de la réforme, et que des figures à droite comme Xavier Bertrand dénoncent "une méthode catastrophique".
Des difficultés qui fragilisent le gouvernement alors même que les négociations ne parviennent parfois pas à porter leurs fruits, et sont même un moteur de la détermination des secteurs en grève, qui ont entamé aujourd’hui leur deuxième semaine noire. 

Négocier pour isoler les grévistes et retourner l’opinion publique

Tout en jouant le pourrissement du conflit avec les trois principaux secteurs du mouvement, la RATP, la SNCF et dans une moindre mesure les enseignants, le gouvernement veut développer les négociations par corporation pour isoler et stigmatiser les grévistes et construire auprès de l’opinion publique l’image de « jusque boutiste » qui se refuseraient à toute concertation.

Mais alors que la grève commence à se durcir et tient dans la durée, en ayant dépassé la longévité de la grève victorieuse de 95 et en entamant une deuxième semaine d’actions réussies qui discrédite l’opération "trêve de Noël", la stratégie de la négociation corporatiste est une voie risquée pour Macron. 
D’une part, en épargnant les institutions régaliennes comme la police, l’armée, ou le Parlement, le gouvernement peine à convaincre de la justesse de la réforme et exacerbe la colère face à un système, qui est la principale cause pour laquelle les gens sortent dans la rue le 5 décembre, malgré les discours sur le corporatisme des grévistes. 
 
D’autre part, en négociant avec tout ceux qui par leur mobilisation peuvent rompre l’isolement des grévistes, Macron montre une fébrilité qui infirme sa détermination supposée à ne rien lâcher, et témoigne de la force de frappe qu’aurait une généralisation de la grève. 

En faisant un pas vers les contrôleurs aériens tout en discutant avec les pilotes pour qu’ils retirent leurs préavis du 3 janvier, en négociant avec le secteur mobilisé de l’électricité ou en proposant un aménagement pour les danseurs de l’Opéra, le gouvernement donne le signe qu’il peut reculer : "A partir du moment où il commence à lâcher pour certaines professions, il montre qu’il peut lâcher. Quelque part, il donne confiance à ceux qui sont mobilisés"

Et avec le succès des actions de la semaine de Noël, premières dates posées par les grévistes eux-mêmes en dehors du calendrier syndical par la coordination RATP-SNCF, les grévistes lancent un signal fort au gouvernement et aux directions syndicales. Si les travailleurs des secteurs mobilisés parviennent à durcir le mouvement en pleine période de Noël malgré le cheminot-bashing et la bataille de l’opinion, il est clair que la détermination alliée à l’organisation et la coordination peuvent permettre l’extension de la grève et sa radicalisation. Un cocktail explosif qui pourrait une bonne fois pour toute plier le gouvernement.


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