Ils n’auront pas attendu longtemps après la fin des premières épreuves du baccalauréat. Très tôt ce matin, avant 7H, les lycéens d’Hélène Boucher se sont retrouvés pour bloquer leur établissement contre la réforme des retraites. Comme ils l’avaient déjà fait à plusieurs reprises lors des deux mois précédents. Jean, élève en classe de première, explique : « On bloque contre la réforme et le projet de société qui se cache derrière. Mais aussi la loi LOPMI, la fermeture des lycées, la casse des services publics et en général contre le capitalisme ».

Sur le blocus, les lycéens promettent : le 49.3 n’a fait que renforcer leur détermination. Jean poursuit : « Ils nous prennent pour des bouffons et l’état ne tient qu’avec sa police. On voit l’énorme répression depuis quelques jours. On dénonce tout ça, et si le gouvernement et les flics sont fatigués, nous on n’est pas fatigués et on va gagner. Il faut que tous les lycéens bloquent : plus on est nombreux, mieux on répond à la répression. La peur est en train de changer de camp ».

Pas loin de la cinquantaine, les élèves mobilisés sont soutenus par des parents d’élèves de l’établissement, venus s’assurer que la police ne réprime pas leurs enfants. Chose devenue quasiment systématique sur les blocus lycéens. Une maman explique : « On ne peut pas laisser nos enfants vivre dans un état policier. On veut que nos jeunes s’émancipent, mais dès que la police est là, ça finit mal. Moi je suis aussi en grève, et je pourrai parler des heures tellement il y a des choses qui ne vont pas ».

A raison. Un important dispositif policier est (une nouvelle fois) convoqué devant l’établissement. En matière de répression, la direction du lycée n’est d’ailleurs pas en reste. En effet, comme on peut le voir sur cette vidéo, le proviseur adjoint de l’établissement a violemment bousculé une élève, avant de lui de crier : « tu finiras en garde-à-vue ! Tu mouilles hein ? tu mouilles ! ».

La police, elle, pour une fois n’est pas intervenue. La présence des parents, mais aussi le soutien important des élèves non impliqués dans le blocus ont sans doute joué un rôle en ce sens. Une élève de première confie : « De les voir bloquer l’établissement contre la réforme des retraites, ça fait plaisir. On est tous contre la réforme des retraites. Alors même si pour moi, c’est un peu trop radical, je les soutiens. ». Un autre, élève de terminale, abonde en ce sens : « Je les soutiens clairement aussi. Cette réforme est injuste, notamment pour les travailleurs avec un métier pénible. Alors, même si je ne suis pas convaincu de l’utilité du blocus, je sais que des lois ont été retirées à cause de la pression de la rue ». Parmi eux, certains comptent bien aller en manifestation demain, parfois pour la première fois.

Alors que de nombreux secteurs du monde du travail, des raffineurs aux énergéticiens en passant par les éboueurs ou les dockers, ont décidé de durcir le mouvement, dans la jeunesse aussi les choses sont en train de bouger. Dans les universités, depuis le début de la semaine, des assemblées générales massives ont vu le jour dans de nombreuses villes, avec jusqu’à un millier d’étudiants à Paris 1, mais aussi dans les lycées. Le blocus du lycée Hélène Boucher est de ce point de vue une expression de plus d’une colère large qui pourrait éclater dans de nombreux lycées durant les prochaines journées, à commencer par demain, journée de grève nationale.