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Homophobie d’Etat

Ouganda. Une loi anti-homosexuels promet des années de prison et la peine de mort aux LGBT+

Mardi dernier, le Parlement Ougandais a adopté une loi criminalisant les LGBT+ du pays, pouvant aller jusqu'à la peine de mort. Appuyé par la propagande de l’Eglise Evangélique, le président Yoweri Museveni, qui considère les homosexuel.le.s comme « déviants » devrait la promulguer dans les trente jours.

Benoit Barnett

24 mars 2023

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Ce mardi, le Parlement ougandais a voté une loi appelant à plus de répression judiciaire contre les homosexuel.le.s du pays. La présidente du Parlement, Annet Anita Among, parle d’une loi adoptée en temps record. Elle a insisté pour rappeler que « cette Chambre n’hésitera pas à restreindre quelque droit que ce soit dans la mesure où elle reconnait, protège et sauvegarde la souveraineté de ce pays et sa morale ». Une morale alimentée par les violences homophobes envers les parties les plus marginalisées de la société ougandaise.

Initialement, le texte de loi comportait des peines allant jusqu’à dix ans de prison pour tout acte homosexuel ou pour toute personne se revendiquant LGBT+. Cette loi a pour conséquence d’étendre les pouvoirs de la répression policière envers les LGBT+ ougandais, déjà soumis aux violences homophobes et transphobes après le passage d’une loi du même acabit en 2013 qui leur promettait alors la prison à vie.

Frank Mugisha, militant pour les droits LGBT+ en Ouganda, dénonce : « Cette loi est extrême et liberticide. Elle criminalise le fait d’être LGBTQ, mais aussi ils [le Parlement] essayent d’efface l’existence même des LGBTQ ougandais ».

La loi actuelle prévoit une peine de mort pour ceux accusés « d’homosexualité aggravé », c’est à dire ceux qui ont commis des actes sexuels avec des mineurs, avec des personnes handicapées ou encore atteinte du VIH. Les personnes ayant eu des relations sexuelles avec le même genre seront condamnées à 20 ans de prison et 10 ans pour toute tentative. Pour les adolescents homosexuels, la loi prévoit des peines allant jusqu’à trois ans de prison.

Ces dernières semaines, plusieurs responsables religieux et politiques, appuyées par la propagande étatique, ont accusé des professeurs de mener des opérations de « recrutement » dans les écoles. Une enseignante du secondaire a ainsi été arrêtée après avoir été accusé de « convertir » des jeunes filles.

Après être passée au Parlement ougandais, la loi doit être approuvée par le Président du pays, Yoweri Museveni. Ce dernier s’était déjà prononcé en 2013 pour le passage de la loi anti-homosexualité. Au pouvoir depuis 1986, il est considéré comme « le principal chantre du capitalisme en Afrique » après avoir passé un accord avec le FMI et la banque mondiale qui a entrainé des privatisations d’entreprises, la dévaluation du shilling ougandais etc… Au sujet de la répression de l’homosexualité, le président marche main dans la main avec les protestants américains de Born Again

Marquées par le rôle de l’impérialisme britannique puis américain, les classes dirigeantes ougandaises ne sont pas à leur première tentative pour criminaliser l’homosexualité. En effet, les arguments utilisés aujourd’hui sur la protection de la morale, des enfants et de la souveraineté du pays font écho au code du Commonwealth en Afrique qui interdisait alors « toute relation charnelle contre-nature ».

Cet héritage colonial est encore très vivace aujourd’hui avec la présence sur le territoire ougandais de pasteurs de l’église évangélique américaine promouvant des thérapies chrétiennes de conversion visant à « guérir de l’homosexualité ». Avec un fort lobby contre les LGBT+, avec par exemple des hommes comme Scott Lively, venu pour la première fois dans le pays en 2002 et qui est passé de congrégation en congrégation pour prêcher sa propagande anti-LGBT+.

L’Ouganda n’est pas le seul pays à criminaliser l’homosexualité en Afrique. C’est le cas de plus de 30 pays qui sont impliquées dans des violences étatiques homophobes. Parmi eux, le Kenya, le Ghana ou encore le Niger.

L’Eglise a été la tête de proue de cette homophobie en construisant un mouvement mettant en avant des figures d’ex-gay, ex-lesbienne et ex-trans qui ont renoncé publiquement à leur orientation sexuelle ou identité de genre pour participer à la propagande religieuse. C’est notamment le cas de Val Kende, ancienne militante LGBT+ qui après un voyage au USA, a participé en 2018 à une prêche chrétienne retransmise à la télévision où elle annonçait renoncer à sa sexualité.

À la lumière de ces informations, il devient extrêmement clair que cette loi fait pleinement partie de l’héritage colonial du Royaume-Uni en Afrique de l’Est, que l’influence des Évangélistes américains participe à maintenir.

À l’international, une vague réactionnaire s’abat contre les femmes et LGBT+. Il est urgent de s’organiser par nos propres forces pour arracher et garantir nos droits. Depuis la France en grève contre la réforme des retraites, nous apportons toute notre solidarité envers les LGBT+ réprimés par l’Etat ougandais ainsi qu’à toutes celles et ceux attaqué.e.s pour leur orientation sexuelle ou identité de genre dans le monde entier.


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