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Réforme des retraites

Paris 1 : des AG de filières pour lier les revendications étudiantes et la lutte contre les retraites

Depuis le début de la mobilisation contre la réforme des retraites et en parallèle des AG communes à tout Paris 1, plusieurs filières se sont mobilisées indépendamment au travers d’AG d’UFR. Petit panorama.

Arsène Justo

19 avril 2023

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Paris 1 : des AG de filières pour lier les revendications étudiantes et la lutte contre les retraites

Photo : AG des étudiants de cinéma et art-plastiques du centre Saint-Charles

Depuis plusieurs semaines, les étudiant·es mobilisé·es multiplient les AG de département et de centre pour s’organiser localement et mêler leurs revendications spécifiques aux revendications plus générales de la mobilisation. En économie, science politique, géographie, cinéma, philosophie, droit, il s’agit de s’organiser pour mettre les compétences de sa filière au service de la mobilisation. Initialement apparues dans les filières des centres éloignés de Tolbiac, les AG d’UFR se sont généralisées au fur et à mesure de la mobilisation, permettant l’émergence de revendications et méthodes d’action propres.

C’est à Saint-Charles, centre regroupant les étudiants de cinéma et d’art plastique, qu’a eu lieu le 7 mars une des premières AGs d’UFR. Charlie, étudiant en L2 de cinéma, résume ainsi la situation : “Malgré une importante politisation des étudiants de Saint-Charles, il était très dur pour elleux de venir jusqu’à Tolbiac. Nous avons donc pris l’initiative d’organiser une AG au sein même de notre centre. Celle-ci a été un succès, avec près de 120 étudiants. Nous avons directement pris la décision de former un cortège de Saint-Charles pour la manifestation suivante et de nous rendre sur les piquets de grève, notamment celui des éboueurs d’Issy-les-Moulineaux, proche de notre centre. Nous avons également organisé des projections de film en présence de leurs réalisateurs et des petits-déjeuners solidaires, au profit des caisses de grève”. C’est ainsi qu’une vingtaine d’étudiant·es de Saint-Charles se sont rendu·es les jours suivants aux côtés des éboueurs de la TIRU d’Issy, confectionnant avec eux plusieurs banderoles et pancartes. La semaine suivante, lors d’une seconde AG ayant réuni encore plus de personnes, l’occupation du centre a été votée, ce qui n’était encore jamais arrivé à Saint-Charles.

Parallèlement, les étudiant·es en géographie se sont elles et eux aussi rapidement organisé·es au sein de l’Institut de Géographie. Comme nous le raconte Luz, étudiante en L1 de géographie et militante au Poing Levé : “Les étudiants ont cherché à lier les revendications contre la réforme des retraites aux thématiques environnementales, puisque nos enseignements tournent beaucoup autour de ces problématiques mais collent rarement avec nos convictions écologistes”. La mobilisation a ainsi été l’occasion de discuter en profondeur du modèle d’université à construire à rebours du système sélectif et élitiste actuel, et de débattre de la sélection et des partiels, sujet ayant pris une importance centrale vu la pression imposée avec les partiels.

L’UFR de philosophie s’est elle aussi mobilisée. Bénéficiant notamment de l’appui de nombreux professeurs, les étudiants ont pu organiser des AGs au sein de la Sorbonne, un de leurs principaux lieux d’étude, ainsi qu’un centre universitaire extrêmement symbolique du quartier latin. “Les principales discussions tournent autour de la nécessité de faire de la Sorbonne un lieu central du mouvement”, nous expliquait ainsi Gregor, étudiant en master. L’étudiant, militant au Poing Levé, nous rappelle d’ailleurs que c’est à l’issue de la première AG des étudiant·es de philosophie qu’a été créée la Cantine Autogérée de Tolbiac.

En science politique, filière habituellement assez politisée et ayant une tradition d’AG d’UFR antérieure au mouvement, les premières ont eu lieu assez tard mais ont rapidement réuni un grand nombre de personnes : près d’une centaine dès la première, plus de 300 lors de la 2e, notamment suite à l’attaque de bandes fascistes contre les étudiant·es mobilisé·es de Cassin. Carolina, étudiante en L2 double licence science po - éco rapporte qu’il a notamment beaucoup été question des violences policières lors des deux dernières AG, mais aussi de la nécessité pour les professeurs de se mobiliser aux côtés des étudiants. L’AG de la semaine dernière a voté le 10 améliorable, l’UFR 11 se positionnant ainsi comme une des premières filières à défendre ce mot d’ordre de la validation du semestre pour toutes et tous, rapidement repris par de très nombreux étudiant·es.

Dans d’autres filières des AG ont vu le jour plus récemment. C’est par exemple le cas de l’UFR d’économie, où une première AG la semaine dernière et une seconde cette semaine ont rassemblé un nombre important de personnes au vu de la mobilisation traditionnellement faible dans cette filière. C’est ce dont s’est fait l’écho Youri, étudiant en L3 d’économie : “Pour beaucoup d’étudiants présents à ces deux AG, il s’agissait de leur première expérience au sein de cadres d’auto-organisation. Je pense que les AG d’UFR ont l’avantage d’être moins intimidantes pour les étudiants non-organisés, elles permettent d’y retrouver des personnes connues et de discuter en plus petit comité de préoccupations plus proches de leur quotidien scolaire. Elles permettent aussi de converser plus facilement avec les enseignants de notre UFR”. Lors de ces deux AG, les étudiants ont par ailleurs décidé d’imiter ceux de sciences-politiques en soutenant eux aussi les revendications formulées par l’AG de Tolbiac, notamment l’exigence du 10 améliorable.

La situation est similaire en droit, où une première AG a eu lieu mardi dernier, réunissant près de 200 personnes au sein du centre Cassin. Comme nous l’explique Talia, étudiante en master : “Malgré le stress des partiels qui arrivent, beaucoup d’étudiants savent qu’il est nécessaire de se mobiliser. Lors de l’AG, il n’y a pas vraiment eu de clivage sur les questions du 10 améliorable, du refus du distanciel ou de l’aménagement des partiels : même les étudiants peu habitués des mobilisations soutenaient les dispositions qui permettent à ceux qui le veulent de se mobiliser sans crainte”. De plus, l’étudiante nous explique que la santé mentale des étudiants a été au centre des discussions, alors même que la mobilisation contre la réforme des retraites est l’une des premières grandes mobilisations à avoir lieu depuis le confinement.

Enfin, des AG ont récemment eu lieu dans d’autres UFR (sciences sociales, histoire, archéologie). Si elles ont été souvent plus petites par leur taille, elles ont toutes témoigné d’une forte détermination. Tous ces cadres d’auto-organisation, nés au cours de la mobilisation et rassemblant des personnes parfois très différentes par rapport aux AG “traditionnelles” ; semblent surtout montrer que la mobilisation au sein de départements spécifiques a toute sa place dans l’objectif crucial de massifier le mouvement étudiant, étape nécessaire pour remporter la victoire contre Macron et le patronat, comme ça avait été le cas en 2006 contre le CPE.


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