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Répression

Pass sanitaire ou licenciement ? Borne veut lancer une nouvelle offensive contre le monde du travail

Après avoir annoncé le passe vaccinal, le gouvernement envisage une nouvelle mesure autoritaire contre l'ensemble du monde du travail : le passe en entreprises. Présenté aux « partenaires sociaux » ce lundi par Elisabeth Borne, il obligerait les salariés à présenter un passe sanitaire sous peine de suspension.

Hélène Angelou

20 décembre 2021

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Crédits photo : AFP

Alors que l’Europe traverse une nouvelle vague dans l’épidémie de Covid, marquée par la propagation du variant delta et la menace du variant omicron, le gouvernement compte bien poursuivre sa gestion autoritaire et répressive de la crise sanitaire. Le passe vaccinal annoncé par Jean Castex vendredi dernier à l’issue d’un énième conseil de défense, constituait déjà une nouvelle offensive contre les non-vaccinés, renforçant l’autoritarisme sanitaire du gouvernement. Depuis, Olivier Véran a mis sur la table une nouvelle mesure envisagée par le gouvernement, un passe sanitaire en entreprises. Ce lundi matin, la Ministre du travail Élisabeth Borne convoquait dans la foulée les organisations syndicales et patronales à une réunion en visioconférence pour en discuter.

Ce passe sanitaire en entreprises constitue une véritable attaque contre l’ensemble du monde du travail puisque la mesure consiste à menacer de sanctions, notamment de suspension, les salariés qui n’auraient pas de passe sanitaire à jour : « On ne peut pas empêcher les gens de travailler s’ils ne sont pas vaccinés, mais on peut exiger d’eux qu’ils fassent un test », a précisé le ministre de la Santé. Une façon donc d’étendre à l’ensemble des salariés l’obligation de présenter un passe sanitaire à laquelle sont déjà soumis quelques « 2 millions d’employés travaillant dans les hôtels, bars et restaurants », et donc en contact avec du public, précise Libération. Une façon aussi d’imposer, sous peine de sanctions, la vaccination, puisqu’il la durée de validité des tests a été réduite à 24h et qu’ils constituent un coût plus que conséquent pour les non-vaccinés.

Ce lundi, l’ensemble des organisations syndicales s’est opposée à cette mesure répressive. « Nous y sommes opposés parce que ça correspond à une obligation vaccinale » déclarait Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT sur France Info ce matin. Même son de cloche du côté de Yves Veyrier de Force ouvrière : « Il faut convaincre les derniers réfractaires [à la vacccination], parmi lesquels ici ou là des salariés […]. Mais plutôt que de sanctionner, il faut faire du positif » a-t-il déclaré.

Or, cette mesure semblait bien répondre aux attentes du patronat. « La priorité des priorités est d’assurer la continuité de l’activité. […] S’il faut en passer par là, oui. Ce qu’on veut absolument éviter ce sont les fermetures obligatoires », indiquait Dominique Métayer, président de l’Union des entreprises de proximité, en ce sens. Néanmoins, depuis la rencontre avec la ministre, les craintes et réserves du patronat se sont renforcées et les organisations patronales sont désormais elles-mêmes plus que réservées sur cette mesure.

Les principaux points de tension se cristallisent autour de la responsabilité pénale des employeurs dans le contrôle des passes sanitaires, « il faut une obligation de moyens et non de résultats » revendiquait en ce sens Geoffroy Roux de Bézieux, président du Medef. Au point où le Medef semble franchement hostile à en croire l’un de ses porte-parole cité par Le Monde qui a dénoncé « une manière d’imposer la vaccination par l’intermédiaire des entreprises, or c’est au gouvernement d’assumer cette responsabilité ».

En réalité, loin de refuser d’endosser cette responsabilité, ce qui intéresse en premier lieu le MEDEF, c’est non seulement d’entraver le moins possible la reprise économique, et donc ses profits, mais aussi plus généralement, d’éviter que ce type de mesure n’ouvre la voie à des tensions sociales dans les entreprises, voire à des mobilisations. Et pour cause, dans le contexte actuel, où la question des salaires est le moteur d’un certain nombre de luttes, il s’agit d’éviter d’attiser une colère qui pourrait s’y lier.

Face à cette offensive, l’opposition des syndicats est nécessaire, mais elle est en tant que telle insuffisante et les organisations du monde du travail auraient un rôle à jouer dans cette crise sanitaire pour opposer à la gestion criminelle et répressive du gouvernement une campagne de vaccination par en bas. Philippe Martinez évoquait sur France Info ce matin, à l’opposé du passe en entreprises, une série de revendications visant à renforcer les gestes barrières et à inciter davantage à la vaccination. Parmi elles, la question de la médecine du travail et son rôle dans la vaccination dans les grandes entreprises « où bon nombre de sous-traitants et de prestataires pourraient se faire vacciner », la possibilité de se faire vacciner sur le temps de travail, qui alors qu’elle figure dans les décrets, est loin d’être une réalité, mais aussi l’augmentation du télétravail car comme le rappelait le secrétaire général de la CGT les transports sont un important foyer de contamination.

Si ces mesures paraissent correctes, force est de constater qu’on les entend peu ces derniers mois. A l’inverse, il est urgent de lancer une véritable campagne par en bas pour dénoncer la stratégie du gouvernement qui laisse circuler le virus et mène une gestion autoritaire et répressive, multipliant les contraintes contre les non-vaccinés. S’accompagnant d’une campagne pour la vaccination de toutes et tous, notre camp social doit également exiger la gratuité des tests, des mesures de prévention conséquentes, et imposer des protocoles sanitaires à la hauteur dans les écoles, les transports et les lieux de travail, et des investissements massifs dans les hôpitaux. Ce programme d’urgence ne pourra être imposé que par nos luttes et l’auto-organisation des travailleurs et travailleuses, loin du dialogue social.


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