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Cacophonie ministérielle

Polémique sur l’impôt sur le revenu : cafouillage et dissensions au sein de la majorité présidentielle

Dimanche 24 février, Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires s'est déclarée favorable à l'instauration d'une impôt universel sur le revenu. L'annonce d'un tel projet a provoqué de vifs remous, y compris au sein de l’exécutif et de LREM.

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Photo : © Frédéric LHERPINIERE

Taxer les plus modestes pour renflouer les caisses de l’État... ?

Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires, s’est récemment déclarée favorable à l’instauration d’un impôt universel sur le revenu lors d’une interview accordée au Journal du dimanche.

Pour cette ministre, la France est l’une des sociétés « des plus redistributrices qui soient », « il faut redonner à chacun le sens de l’impôt ». Comment ? En modifiant le système actuel d’impôt sur le revenu « surconcentré sur les classes moyennes, qui n’ont pas à porter sur leurs épaules les efforts de tous » et donc en faisant en sorte que « tout le monde » paie « l’impôt sur le revenu. Y compris les plus modestes, même 1 euro ».

Ainsi, la ministre de la cohésion des territoires, semble oublier l’origine même du mouvement des Gilets jaunes : une politique gouvernementale menée avant tout pour les riches et les grands patrons. La ministre oublie en effet l’une des revendications des Gilets Jaunes : le retour de l’ISF, supprimé par son gouvernement conformément aux demandes du grand patronat français, notamment du CAC40.

Par ailleurs, si la ministre de la cohésion des territoires a déclaré qu’elle ne serait « pas choquée » de taxer davantage les plus hauts revenus elle n’a pas pour autant formulé de réelles propositions allant dans ce sens. Jacqueline Gourault a par ailleurs souligné que « l’objectif et la réalité de l’action du gouvernement, c’est la baisse de la fiscalité ».

Des dissensions au sein de l’exécutif et du parti présidentiel

Ce cafouillage de la majorité a obligé l’entourage du Premier ministre, Édouard Philippe, à réagir en déclarant que : « la piste d’un impôt sur le revenu universel n’est pas à l’étude », plusieurs voix contradictoires se sont élevées au sein de LREM. 

C’est le cas par exemple d’Emilie Cariou (LREM, Meuse) qui a publié sur Twitter : « Notre ambition est de faire en sorte que chacun puisse vivre dignement de son travail et non de prélever 1 euro sur les plus pauvres », et qu’a repris Laurent Saint-Martin (LREM, Val-de-Marne).
Plus marquante encore, la déclaration d’Aurélien Taché (LREM, Val-d’Oise) sur le même réseau social :« Le sentiment d’injustice fiscale se nourrit de l’idée qu’il est toujours plus facile pour l’État de faire payer les petits que les gros. Luttons contre l’évasion fiscale, taxons les rentes et les GAFA. Mais pas de mesure qui accentue cette fracture. »

Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des Comptes publics, avait lui aussi trois jours plus tôt rejeté l’idée d’un impôt sur le revenu pour tous. Il avait en effet déclaré au Sénat : « c’est une très belle idée, mais que je trouve peu utile de mettre en place » et de préciser que cela reviendrait à augmenter l’impôt « pour 55 % de Français qui n’en payent pas et qui sont en dessous de 11 000 euros de revenus par an, c’est-à-dire mettre des impôts à quelqu’un qui touche le RSA ».

Enfin, le député Hugues Renson (LREM, Paris), est allé jusqu’à qualifier la sortie de la ministre de la cohésion des territoires de contribution au « concours Lépine » avant de préciser, comme Gilles Le Gendre, chef de file des députés LREM, ce lundi matin au micro de RTL qu’une « grande réforme fiscale » est ce dont « le pays a besoin ». Tout en se gardant d’en préciser une quelconque ligne, histoire de rester dans le cadre dessiné par l’exécutif avec le grand débat au sein duquel, rappelons-le, la remise en place de l’ISF n’est pas à l’ordre du jour.

L’ombre d’un remaniement plane-t-elle sur le gouvernement ?

Ces réactions au sein de la majorité présidentielle illustrent la situation délicate dans laquelle se situe actuellement le gouvernement Macron.
D’un côté, à l’heure du Grand Débat, les ministres sont encouragés à lancer des idées afin de répondre à l’avidité de l’exécutif en mal de solutions pour sortir de la crise politique dans laquelle il est plongé dans le contexte actuel. D’un autre, toute sortie du cadre imposé par l’exécutif est l’occasion d’un démenti immédiat.
L’engouement des ministres pour les questions fiscales dans le cadre du Grand Débat n’est pas au goût de l’exécutif. En témoigne ce qui se dit dans l’entourage du premier ministre : « Il y a plein d’autres sujets à mettre au débat que celui de la fiscalité ». La raison de cette inquiétude ? Un tel intérêt porté à la question de la fiscalité risquerait de remettre la question de l’ISF au premier plan.

De plus, les voix dissonantes s’élèvent toujours au sein de la majorité présidentielle lorsque s’annonce l’heure du remaniement. Considérant cette nouvelle phase du quinquennat de Macron et l’approche des élections européennes, les volontés des uns et des autres divergent au sein de la majorité et les ministres s’activent dans l’attente de changements qui pourraient survenir prochainement. Ainsi, il n’est pas tant question de faire des propositions pour contribuer à l’avancée du débat que pour s’assurer de sauver sa place ou d’en obtenir une meilleure. Il s’agit pour les ministres, que l’on avait d’ailleurs jamais autant entendu s’exprimer dans les médias, de montrer qu’ils existent et qu’ils sont utiles au projet de Macron.


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