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Le ridicule ne tue pas…

Pour avoir demandé un CDI après 5 ans d’intérim, sa direction la taxe "d’opportuniste" !

Julie P., jeune travailleuse de Saint-Étienne-du-Rouvray, a enchaîné les missions d'intérim au sein d’une même entreprise, au même poste, sur une période de 5 ans. Jetée comme un kleenex, elle demande une requalification en CDI devant les prud’hommes. Une attitude qui n'a pas plu à son patron qui, par la voix de son avocate, taxe son ex-employée « d'opportuniste ». Un comble. Karel Venuvitch

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18 mois renouvelables deux fois, voici la durée maximale légale du recours à des missions d’intérim par un employeur afin d’endiguer un « accroissement temporaire d’activité ». Mais cette législation, l’ex-patron de Julie P. – à la tête d’une société chargée de réparer les terminaux de jeux PMU et de la Française des Jeux, qui emploie près de 200 travailleurs à Saint-Étienne-du-Rouvray (Seine Maritime) – la trouvait certainement trop contraignante. Préférant maintenir son employée dans la précarité, afin de disposer de sa force de travail à souhait, avec une épée de Damoclès au-dessus de sa tête afin de prévenir toute velléité revendicative, le patron de cette entreprise a préféré multiplier les contrats intérim durant… 5 ans ! Et toujours au même poste, ce qui en dit long sur l’aspect « pic d’activité exceptionnel » justifiant le recours à l’intérim.

Pour ne pas se retrouver épinglé pour cette pratique illégale, la combine a ainsi consisté à opérer de très courtes coupures entre les missions, afin de remettre les compteurs à zéro et ainsi poursuivre sur un mode de fonctionnement qui convient au patron.

Et voici qu’au bout de 5 ans, Julie P. fut littéralement jetée comme un kleenex, son contrat n’ayant plus été renouvelé. La goutte d’eau pour cette jeune travailleuse, qui a décidé de saisir les prud’hommes pour être requalifiée en CDI et ainsi pouvoir toucher des indemnités de licenciement.

Une attitude pour le moins légitime, mais contre laquelle son ex-employeur s’est insurgé. « Elle n’a pas été de façon continue dans l’entreprise entre 2008 et 2013, elle n’était pas à la disposition de l’employeur tout le temps et a pu travailler chez d’autres employeurs », a ainsi déclaré Me Dugardier, l’avocate de la société, devant le juge. Avant de poursuivre, dans une attitude de mépris total qui en dit long sur la considération de ce patron envers ses employés. « Cette salariée a saisi les prud’hommes par pure opportunité. Son conseil détaille que les intervalles entre les missions d’intérim n’ont pas respecté un délai de carence, mais contrairement aux CDD, ce non-respect n’emporte pas la requalification des missions en CDI. La jurisprudence admet aussi qu’une société peut faire face à des pics répétés d’activité sans que cela n’entraîne la création d’un emploi permanent ».

Julie P., qui a sans rechigner accepté 5 ans d’intérim à la suite, à la limite de la légalité afin de survivre, se trouve donc être une opportuniste sans scrupule, voulant spolier l’honnête patron ayant connu un pic d’activité 5 années durant. « Une mission d’intérim, c’est répondre à un pic d’activité de l’entreprise. Mais un pic qui dure cinq ans, ce n’est plus un pic, et cela mérite un emploi permanent », a ainsi rappelé Me Bressot, avocat de la salariée. Une déclaration qui semble suivre la plus grande logique.

Julie P. connaîtra la réponse des prud’hommes en décembre prochain. Mais cette affaire illustre d’ores et déjà à quel point les travailleurs sont considérés comme de la « chair à patron » par leurs employeurs, bien décidés à utiliser leur force de travail avec la plus grande marge de manœuvre possible, les jetant par la suite sans scrupule ni remord. Une attitude scandaleuse, suintant le mépris de classe, et qui dévoile à quel point le système en place permet implicitement toutes les magouilles possibles dans l’intérêt du patronat.


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