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Ça chauffe devant les taules

Prisons. Du côté des matons ou des détenu.e.s et de leurs familles ?

Le « conflit » dure depuis treize jours entre les organisations « syndicales » de matons et l’administration pénitentiaire. Bloquant l’entrée des maisons d’arrêt et des maisons centrales, les gardiens de prison protestent contre leurs conditions de « travail » sur lesquelles s’attardent, la larme à l’œil, les médias et les politiques…

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Le mouvement a débuté le 11 janvier à la prison de Vendin-le-Vieil, dans le Calaisis, à la suite de l’agression de quatre surveillants de prison par un détenu condamné pour terrorisme islamiste. Depuis, la grogne a gagné les autres établissements pénitentiaires de France. A la quatorzième journée de mobilisation, la Garde-des-Sceaux, dont dépendent les prisons, fait état d’une soixantaine d’établissements bloqués. En "off", ses proches déclarent que c’est plus d’une centaine de centres qui sont touchés : une grosse moitié des 187 taules que compte le pays, dans lesquelles sont entassés un peu plus de 70.000 détenus. Le taux de surpopulation carcérale, en France, est donc de 120%.

Des bagnes modernes

Mais les principales victimes, à entendre les médias, ce serait les surveillants de prison. Les gardiens et gardiennes de l’administration pénitentiaire, les matons, pour le dire d’une autre façon, en auraient assez de salaires jugés trop bas et de conditions de « travail » jugées mauvaises. Un beau travail, en effet…

Les trois organisations « syndicales », l’Ufap (majoritaire), FO et la CGT Pénitentiaire, jouent, chacune de leur côté, à la surenchère et ne veulent rien lâcher, ni sur les bonifications demandées, ni sur les augmentations, ni sur la création de nouveaux postes et, maintenant, l’armement : l’Ufap demande à ce que les gardiens de prison soient équipés de taser. Compte-tenu des pratiques des matons (viol sur détenu, comme à la prison de Meaux, humiliations et violences, comme à Nancy), et des conditions de détention dans des centres où « on bouffe des rats et on mange des coups », la France étant systématiquement épinglée par les instances internationales pour non-respect des droits élémentaires dans les centres de privation de liberté, l’idée d’avoir des matons armés fait froid dans le dos.

Une ministre bloquée

La ministre de la « Justice », Nicole Belloubet, hérite d’une situation absolument explosive du point de vue de la surpopulation carcérale, mais également d’un directeur de l’administration pénitentiaire que lui a légué son prédécesseur, Jean-Jacques Urvoas (actuellement soupçonné d’avoir aidé le député macroniste Thierry Solère dans ses problèmes de fraude fiscale). Stéphane Bredin, droit dans ses bottes, ne veut rien lâcher, alors que sa ministre serait prête à faire des concessions pour mettre fin à cette grogne réactionnaire sans précédent qui mobilise, en parallèle, plus de 1500 policiers et gendarmes.

La plupart des détenus n’ont rien à faire en prison

Les médias focalisent l’attention sur les « individus ultra-violents condamnés pour terrorisme », comme s’il s’agissait de l’écrasante majorité des 70.000 détenus en France, alors que la plupart n’ont rien à y faire : ce sont des condamnés pour des petits délits, des infractions minimes et des vols, à savoir des atteintes à la propriété, sans circonstances aggravantes, c’est-à-dire sans violence, voire de simples prévenus dans des affaires similaires et qui n’ont pas été jugés. Le taux de prévenus incarcérés en attente de procès est ainsi passé, en France, de 16.000 à 20.000 sous le quinquennat de François Hollande.

En attendant des conditions de détention qui n’auront rien changé, pour eux, à la fin du mouvement des matons, voire qui seront pires encore, si leurs gardiens sont armés, les prisonniers sont les premiers impactés par le mouvement : plus d’heure de sortie à l’air libre, ou presque, des conditions d’alimentation pires que d’habitude et les quelques activités qui peuvent leur être concédées restent fermées. Au niveau des parloirs, c’est encore plus terrible, non seulement pour les détenus mais également pour les familles : après avoir attendu des semaines voire, parfois, des mois pour obtenir un moment de parloir, les familles restent parquées à l’extérieur des centres bloqués par les matons, des heures, forcées souvent de rebrousser chemin sans avoir eu la possibilité de voir le proche.

Ni tasers, ni primes, ni solidarité d’aucune sorte. Quand les matons sont « en grève », le mouvement ouvrier et la jeunesse devraient être, naturellement, du côté des détenus et de leurs familles, car c’est avant nous les nôtres, notre camp social, que l’on met en cage et que l’on réprime, le plus souvent pour rien, ou pour si peu. Dernier scandale en date, et il y en a tous les jours, ce sans-abri condamné à six mois pour avoir volé une cannette, cet été. En attendant, nous n’avons rien à faire du côté des matons, et les matons comme les flics n’ont rien à faire dans nos organisations syndicales.

[Crédits photo : L’Ardennais]


  
  
      
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