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Crise sanitaire et gestion coloniale

Reconfinement dur en Guadeloupe : la situation sanitaire continue de se dégrader aux Antilles

Traités comme des citoyens de seconde zone, la population des territoires d’outre-mer paie la gestion coloniale de la crise sanitaire avec une augmentation des cas importante et une saturation des hôpitaux.

11 août 2021

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Crédits photo : LARA BALAIS / AFP

La situation sanitaire se dégrade en Guadeloupe, Martinique, Guyane et Polynésie

Ce mercredi 11 aout, après la tenue d’un nouveau conseil de défense, Gabriel Attal, le porte-parole du gouvernement est revenu sur la situation en Guadeloupe. « La situation est critique, jamais sur le territoire français nous n’avons atteint un tel taux d’incidence » a-t-il expliqué, annonçant un nouveau « confinement strict » pour la Guadeloupe afin de « stopper au plus vite la circulation du virus ». Alors que le taux d’incidence a atteint plus de 1800 et que les services de réanimation sont occupés à 145%, le confinement va impliquer à nouveau la fermeture des commerces, bars, restaurants et musées ainsi que le retour de l’attestation pour justifier des déplacements à plus d’un kilomètre. Les autorités réimposent par ailleurs un couvre-feu et l’interdiction des déplacements de personnes non-vaccinées entre l’île et la France à partir du 2 août.

Le cas de la Guadeloupe n’est pas isolé. La quatrième vague est en effet en train de toucher durement les territoires d’outre-mer. Une situation favorisée par la faiblesse et le manque de moyens des systèmes de santé ainsi que le retard de la vaccination, entretenus par la domination de la métropole sur ces territoires, face à laquelle le gouvernement multiplie les mesures autoritaires.

En Guyane, où le taux d’incidence est en hausse avec 259 cas pour 100 000 habitants, contre 213 cas la semaine précédente comme le reporte Le Monde, le couvre-feu va être aussi remis en place du samedi 20h au lundi 5h dans les communes les plus toucheés.

A la Martinique où un nouveau confinement strict a été mis en place le 30 juillet, le taux d’incidence a atteint plus de 1200 cas pour 100 000 habitants et 100% des lits de réanimation sont occupés par des patients Covid. De son côté la Polynésie va connaitre le rétablissement du couvre-feu de 21h à 4h sur tout le territoire et le haut-commissaire de Polynésie, Dominique Sorain n’exclut pas de mettre en place un confinement. « Le 16 juillet, nous avions un taux d’incidence inférieur à 10, aujourd’hui on est à plus de 1 000 », a expliqué le haut-comissaire. Comme le rapporte Le Monde « plus aucun Polynésien n’était hospitalisé pour cause de Covid-19 à la mi-juillet ; ils sont désormais 159 à l’être, dont 27 en réanimation. ».

La situation catastrophique qui touche ces endroits n’est pas cependant un hasard. Elle découle de la gestion coloniale de ces territoires, dont les habitants sont toujours considérés comme des citoyens de seconde voire de troisième zone.

Manque de moyens, faible taux de vaccination et flambé des cas : les conséquences de la gestion coloniale

En effet si Guadeloupe est l’un des départements le plus touchés par cette quatrième vague, c’est parce qu’il est un des plus mal dotés en ressources hospitalières. Les médecins de villes et d’hôpitaux sont débordés et les lits en réanimations surchargés. Le sous-investissement dans la santé organisé par l’État français se paye aujourd’hui au prix fort. En moyenne, pour 10.000 habitants, l’île dispose de 20 % de lits en moins qu’en métropole et, à l’image des autres territoires coloniaux de la France, souffre de graves carences dans le système sanitaire en termes de personnel, matériel médical, oxygène etc.

Le faible taux de vaccination pèse aussi dans l’aggravation de la situation sanitaire. En Martinique seulement 16% de la population de plus de 12 ans a été totalement vaccinée et en Guadeloupe, seulement 17%. Ces chiffres contrastent avec celles de la métropole où plus de 55% de la population a été vaccinée. Si la presse et le gouvernement, comme Sébastien Lecornu, ministre des Outre-Mer n’hésitent pas à avancer des arguments racistes comme les « réticences culturelles et religieuses », pour expliquer ce retard dans la vaccination et se dédouaner de toute responsabilité, la réalité est toute autre.

D’abord s’il existe, comme en métropole, une défiance vis-à-vis de l’État, celle-ci est nécessairement redoublée par le rapport impérialiste entre l’Etat français et les Antilles. Celles-ci ont été notamment marquées par les scandales sanitaires qui ont touché comme celui de la chlordécone, où l’État a délibérément mis en danger la vie de centaines de milliers d’antillais pendant des décennies pour préserver les intérêts des grands groupes exploitants de bananes.

La réalité socio-économique de ces territoires coloniaux détermine également l’accès au vaccin de la population. Comme on peut le lire dans un article d’avril dernier du Figaro : « les ARS doivent surtout composer avec un territoire qui n’est pas toujours accessible. Les départements d’Outre-mer ont suivi les recommandations du gouvernement et installé au moins un centre de vaccination pour 100.000 habitants. Ce qui ne signifie pas que toute la population puisse y accéder. En Guyane, par exemple, « il existe des zones où il n’y a pas de routes et il faut parfois faire deux jours de pirogue pour accéder à certaines zones, précise Clara de Bort [directrice de l’ARS Guyane]. C’est un territoire immense et peu dense donc faire de grands centres de vaccination n’est pas forcément adapté » ».

A cela il faut encore ajouter le retard et le manque de doses au démarrage de la campagne vaccinale. En effet, en Martinique la première dose a été administrée le 7 janvier et en Mayotte le 28 janvier, alors qu’en France la campagne de vaccination commençait le 26 décembre. Cependant, toujours selon l’article déjà cité du Figaro, « ce démarrage plus lent ne suffit toutefois pas à expliquer pourquoi, encore aujourd’hui, les territoires ultramarins demeurent loin derrière. En plus d’une logistique encore plus difficile à mettre en place que dans l’Hexagone, certaines régions indiquent avoir reçu peu de doses au démarrage de leur campagne (…) Mayotte, par exemple, n’a obtenu que 975 doses lors de sa première livraison. »

Il est évident que si le taux de vaccination avait été plus élevé en Martinique et en Guadeloupe la situation sanitaire actuelle ne serait pas aussi catastrophique. Et cela d’autant plus que ces îles sont touchées par le variant Alpha, celui d’origine. Devant cette situation, l’unique réponse gouvernementale est autoritaire et répressive : non seulement le système de vaccination et de prévention n’est pas repensé mais, à la place, sont à nouveau déployées des mesures ultra-coercitives pour tenter de répondre en urgence à une quatrième vague pourtant aisément anticipable.

Pour faire face à la crise et aux conséquences de la gestion sanitaire du gouvernement, les travailleurs des hôpitaux des métropoles et des territoires d’outre-mer doivent s’unir pour imposer un investissement massif dans la santé financé par les grandes fortunes et batailler pour la levée des brevets sur les vaccins, seule mesure qui pourra garantir une campagne de vaccination massive et transparente.


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