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On aura tout vu…

Régionales. Quand des « anticapitalistes » font liste commune avec le Medef

Daniela Cobet La saison des fusions de listes pour les régionales au nom du « barrage au FN » est ouverte depuis dimanche dernier, et on pensait avoir déjà tout vu. En particulier en ce qui concerne le rôle lamentable joué par le Front de Gauche dans le sauvetage du Parti Socialiste en voie de naufrage dans plusieurs régions.

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Mais un regard attentif sur la liste conduite par Carole Delga, du Parti Socialiste, dans la grande région Midi-Pyrénées / Languedoc-Roussillon, arrive encore à créer de la perplexité. Dans l’Hérault on retrouve ainsi en neuvième position l’ancienne porte-parole du NPA Myriam Martin… deux places devant Marie-Thérèse Mercier, la présidente du Medef Montpellier / Sète / Centre-Hérault !

De l’anticapitalisme aux listes avec le Medef

Il y a encore quatre ans, elle était une des porte-paroles du Nouveau Parti Anticapitaliste et érigeait l’indépendance à l’égard du Parti Socialiste comme principe absolu. Puis en 2012 elle a, avec d’autres, refusé de faire la campagne de Philippe Poutou et appelé à voter Mélenchon. Constitués en fraction, sous le nom de Gauche Anticapitaliste, cette dissidence a décidé de quitter le NPA en 2013 pour rejoindre le Front de Gauche et former son courant, Ensemble. Oui, le même dont les députés ont voté pour la prolongation de l’état d’urgence à l’Assemblé Nationale…

C’est donc au moment même où le Parti Socialiste atteint le sommet de son virage à droite et prend à son compte des mesures jusque-là défendues seulement par le Front National, telles que la déchéance de nationalité et le contrôle des frontières à l’intérieur de l’espace Schengen, que des « anticapitalistes » d’Ensemble décident d’oublier leur principe d’indépendance, soit-disant pour faire barrage au FN !

Patrons et salariés, même combat ?

Mais bien avant la chute libre du PS version « état d’urgence », cela fait longtemps que les rapports du Parti Socialiste avec le patronat ont fait oublier le moment où il entretenait encore des liens organiques avec le mouvement ouvrier. Pas très étonnant en soi donc, qu’une dirigeante du Medef puisse approuver l’orientation mise en place par le parti de Valls et Hollande au pouvoir et soit candidate sur leur liste. Il ne peut en être de même néanmoins pour des gens qui encore aujourd’hui se réclament « anticapitalistes », et qui s’intègrent sur cette même liste en échange de quelques postes d’élus.

Cela a au moins le mérite de rendre les choses claires, presque graphiques. Sur le fond, le projet du Front de Gauche, comme du réformisme en général, se caractérise par le principe de la conciliation de classes, entre patrons et salariés, entre les classes populaires qui crèvent et les pouvoirs qui les font crever. La capitulation ouverte, et en un temps record, du gouvernement Tsipras, muni de cette même stratégie en Grèce aurait pu au moins laisser quelques enseignements sur la faillite de ce type de projet. Mais définitivement il y en a qui ont l’air de ne vouloir rien apprendre.

Capitulation « technique »

Les militants d’Ensemble expliquent dans des débats sur les réseaux sociaux qu’il s’agirait d’une simple fusion « technique ». Outre le fait que les listes électorales se font sur la base d’un programme politique, le comportement de leurs députés lors du vote sur l’état d’urgence témoigne davantage d’une adhésion de fait à la politique actuelle du gouvernement. La direction d’Ensemble assume dans un communiqué du 6 décembre son souhait d’une alliance durable avec une partie du Parti Socialiste lorsqu’elle affirme que « La gauche anti austérité, que ce soit le Front de Gauche, EELV, Nouvelle Donne ou la gauche du Parti Socialiste... - n’a plus le choix. Elle doit dépasser ses divisions pour s’unir et porter une autre voix de gauche qui soit audible. » Dans la pratique elle va bien au-delà et, loin de tout accord purement technique, efface peu à peu la « ligne rouge » de l’indépendance à l’égard du PS et de son gouvernement.

Où est la trahison ?

Mais comme il y a toujours pire dans la vie et que le ridicule ne tue pas, le spectacle des fusions dites techniques a fait aussi des malheureux. Ainsi, Christian Picquet, ancien dirigeant de la Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR) avant sa dissolution en vue de créer le NPA, aujourd’hui conseiller régional PCF, a été quant à lui évincé de la liste conduite par Carole Delga. Il n’en revient pas et dénonce une trahison : « J’ai, en effet, été victime d’une trahison de la parole qui m’avait été donnée. La constitution finale de la liste Nouveau Monde pour le premier tour avait été accompagnée d’un engagement collectif de placer mon amie Dominique Satgé et moi-même parmi les candidats éligibles, et cet engagement avait été repris par Gérard Onesta (…) Cette trahison a été tout particulièrement l’œuvre de Marie-Pierre Vieu, chef de file des communistes sur la Région Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon. Dans la nuit du 6 au 7 décembre, à l’occasion des discussions entre les représentants de toute la gauche, cette dernière a consacré plus de temps à m’évincer du futur conseil régional qu’à travailler aux meilleurs équilibres possibles pour la représentation des communistes et pour la liste de la gauche unifiée elle-même face à la menace du Front national. »

Au-delà de l’aspect « petits coups entre amis » de l’affaire, on ne peut pas nier que M. Picquet est un spécialiste des trahisons. Militant trotskyste de longue date, il quitte la LCR au moment de la création du NPA pour rejoindre le Front de Gauche, soit-disant pour y constituer une aile révolutionnaire. Il finit seulement quelques années plus tard par rejoindre le parti de Pierre Laurent, qui fut durant des décennies l’ennemi juré des militants trotskystes. Très peu de militants issus de cette mouvance en sont arrivés jusque-là. En guise de parole de réconfort dans ce moment difficile, et au vu de la composition de la liste électorale en question, on pourrait dire que plutôt que de le trahir, ses « amis » lui ont plutôt évité de commettre une trahison… de plus.


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