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Rémi Fraisse : Vers un autre non-lieu ?

Plus de deux ans après les faits, la famille de Rémi Fraisse, militant de 21 ans tué d’une grenade de désencerclement par un gendarme sur la ZAD de Sivens, porte plainte contre le préfet du Tarn. Cette plainte suit le dépôt du 11 janvier du dossier des juges chargés de l’enquête au procureur de la République. La famille lutte depuis deux ans et pas une seule mise en examen n’a été effectuée. Pourtant ce 17 janvier a eu lieu la mise en examen d’un gendarme pour avoir lancé une grenade ayant explosé la main d’une opposante au barrage de 25 ans, trois semaines avant la mort de Rémi Fraisse. Quant à la justice elle a, bien tardivement, donné tort au gouvernement sur le projet. Cette affaire ne fait par contre pas « tache » dans le quinquennat de François Hollande et ses gouvernements et donne plutôt une continuité au débat sur la présomption de légitime défense pour les policiers et au meurtre impuni d’Adama Traoré. PAR L.P.

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LA FAMILLE FRAISSE NE LÂCHE RIEN

Face à un usage de grenades à outrance qui va peut-être conduire la justice à conjuguer cadavre avec non-lieu (23 grenades lancées le soir de la mort de Rémi), la famille Fraisse ne compte pas laisser l’affaire être enterrée. Celle-ci porte deux nouvelles plaintes devant les tribunaux ce 18 janvier. La première contre le préfet du Tarn, M.Gentilhomme et son chef de cabinet pour «  homicide involontaire  » ainsi qu’un gendarme pour «  subornation de témoins  ». Ce dernier, chef de l’enquête, aurait ignoré, voire intimidé, des témoins. La seconde est portée contre trois gendarmes, parmi lesquels l’auteur du tir mortel, pour «  faux témoignages  ».

La plainte contre le préfet pourrait relancer l’affaire, lui qui n’a pas été mis en cause malgré son rôle clé dans la gestion répressive des Zones à Défendre. Dans un avis publié le 1er décembre, le défenseur des droits considérait ainsi que «  le manque de clarté des instructions données aux militaires déployés sur la zone  » et «  l’absence de toute autorité civile au moment du drame  » avaient «  conduit les forces de l’ordre à privilégier (…) la défense de la zone, sur toute autre considération, sans qu’il soit envisagé à aucun moment de se retirer  ». La plainte contre le préfet se base sur un enregistrement audio du 20 octobre 2014, cinq jours avant la mort de Rémi, que la famille Fraisse a pu écouter. Le préfet, son chef de cabinet et plusieurs élus discutent de la situation. Cécile Duflot y insiste auprès du préfet  : «  On risque le dérapage à tout instant. Je pense que la grenade qui a été lancée dans la caravane, ça peut être très grave (…). Monsieur le Préfet (…) il faut que ça s’arrête (…) même au pire moment, à Notre-Dame-des-Landes, ça n’est jamais arrivé.  ». Au cours de la conversation, le préfet dit vouloir «  faire baisser la pression  ».

Concernant les faux témoignages, Me Alimi, qui défend la famille Fraisse, clame une «  altération volontaire de la vérité  » et dénonce des «  contradictions et omissions lors des auditions  ». Un des gendarmes a d’abord affirmé avoir donné l’ordre de lancer la grenade avant de revenir sur ses déclarations. L’auteur du tir de grenade a également varié dans ses déclarations, au sujet des précautions employées lors de l’utilisation de l’arme en question.

FAIRE FRONT

Le refus quasi-systématique de la justice à condamner les auteurs de violences policières n’est évidemment pas sans rappeler la récente affaire Adama Traoré, ni les victimes des violences policières répertoriées par le collectif Urgence, notre police assassine. Dans ces affaires, on assiste systématiquement à des meurtres confirmés par les expertises sans que jamais la justice ne décide d’inquiéter les forces de répression, reléguant ces nombreux cas de meurtres policiers à des affaires classées sans suite. Trois ans après l’assassinat de Rémi Fraisse, l’État nous propose toujours plus d’impunité et de répression (mortelle) : est actuellement en discussion l’extension du principe de la légitime défense pour les policiers. La répression se fait de plus en plus violente, touchant en premier lieu des militants, – comme ces cas de militants écologistes assignés à résidence sur simple suspicion de désobéissance civile ou encore les militants contre la loi travail qui sont encore nombreux à passer devant la justice ces prochains mois – et les couches les plus précaires et racisées de la population – comme l’a montré une fois de plus le meurtre d’Adama Traoré, mort étouffé en juillet dernier, puis l’enfermement, motivé par des raisons hautement politiques, de ses deux frères pour « rétablir l’autorité des forces de l’ordre ».. Face à l’impunité policière et au racisme d’État, il est question de faire front. Faire front c’est surtout notre seule possibilité d’instaurer un rapport de force et de porter des revendications face à un État bourgeois dont la fonction est de faire taire tous ceux qui osent élever la voix et de garantir les intérêts de la propriété privée, à coup de grenades s’il le faut.


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