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Rencontre

Réseau pour la grève générale : 150 personnes réunies pour étendre la reconductible dès le 7 mars

Ce jeudi a eu lieu la deuxième réunion du réseau pour la grève générale. Une réunion qui a montré les aspirations au blocage du pays, mais qui a aussi mis en avant de nombreuses initiatives de préparation interpro pour la grève reconductible et sa généralisation.

Arthur Nicola

4 mars 2023

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Ce jeudi, le réseau grève générale, constitué suite à une tribune parue dans le JDD le 28 janvier signée par 300 syndicalistes, militants et personnalités appelant à préparer des grèves reconductibles partout où c’est possible s’est réuni. L’objectif de ce réseau : mettre en contact le maximum de syndicalistes et activistes pour la grève générale, partager les aspirations des grévistes, mais aussi mettre en œuvre une politique pour étendre à un maximum de secteurs les grèves reconductibles qui vont démarrer la semaine prochaine. « Il faut qu’on puisse être informés de tout ce qui se passe, dans le public, le privé, tous les secteurs, de la SNCF à l’automobile » avance Franck Théry, secrétaire de la CGT Stellantis Hordain (Nord).

De nombreux secteurs d’activités étaient représentés : le secteur des transports (RATP, SNCF, Transdev, aéroport de Roissy et d’Orly, EasyJet, Geodis), de la métallurgie (Sidel Le Havre, Stellantis Mulhouse et Hordain, Airbus, CIM Aéro, sous-traitants de l’aéronautique), de la chimie et pétrochimie (Total Normandie, Carling, Grandpuits, Argedis et sous-traitants de la chimie), mais aussi des travailleurs de l’énergie, des centrales nucléaires, de l’agro-alimentaire, du social ou encore de la fonction publique (professeurs, salariés de ministères, hospitaliers et autres). Finalement, des avocats, collectifs antiracistes, artistes et intellectuels étaient aussi présents. Au total, c’est près de 150 syndicalistes, étudiants, et acteurs de la mobilisation en cours, qui se sont retrouvés, en présentiel à Paris, mais aussi en distanciel dans toute la France.

Dans de nombreux secteurs, la volonté de bloquer le pays au-delà du 7 mars

Ce qui ressort, c’est d’abord une forte aspiration, dans de nombreuses entreprises, à bloquer le pays. Frédéric Bichot, cosecrétaire de l’UL d’Harfleur (Seine-Maritime) et syndicaliste chez le sous-traitant SPIE HNO, l’expliquait ainsi en ouverture de la réunion : « l’objectif pour le 7 mars est clair : bloquer le pays en reconductible. On a fait des prises de parole au niveau des sous-traitants toute la semaine. Ce n’est pas toujours facile de mobiliser les sous-traitants, mais c’est en train de prendre, et cela fait longtemps que je n’ai pas vu la sous-traitance aussi unie. On n’a pas le choix d’aller vers autre chose de dur. Si on sort le 7 mars, c’est pour quelque chose de sérieux, et s’il faut reconduire jour et nuit sur des blocages, on le fera ! ». De nombreuses interventions similaires ont détaillé les préparations du 7 mars dans divers secteurs, montrant la volonté non seulement de proposer des actions à l’adresse de tous les grévistes mobilisés, mais aussi de bloquer l’économie
C’est ce qu’a expliqué Thierry Defresnes, de la CGT Total : « d’habitude, dans les boites de la chimie et du pétrole, on a toujours ceux qui sont prêts à la grève, et ceux qui sont plus en retrait parce qu’il y a des difficultés à mobiliser, parce que l’implantation syndicale est trop faible. Aujourd’hui, rien de tout ça : toutes les entreprises sont dans l’action et sont en train de préparer des grèves reconductibles selon différentes modalités. On connaît tous nos outils de travail et on a tous établi des stratégies pour perturber au maximum la production ». De nombreuses actions ont été proposées : rassemblement dans la zone du port de Gennevilliers en région parisienne, manifestation à l’aéroport de Roissy Charles de Gaulle le 7 au matin, blocage de la zone industrielle du Havre ou encore un blocage de la plateforme chimique de Total/Arkéma à Saint-Avold.

« Salaires, conditions de travail, retraites : tout est lié » !

Derrière ces initiatives, c’est non seulement la volonté de durcir le mouvement qui est ressorti, mais aussi d’unir les revendications et d’intégrer la question des salaires. « Les gars ont compris que les salaires, les conditions de travail et les retraites : tout est lié ! C’est aussi sur les augmentations générales qu’il faut qu’on se batte ! » avance Franck Théry. Une position rejointe par Nordine Kebbache, salarié chez Transdev à l’aéroport de Roissy, dont les salariés ont déjà voté 48h de grève, avec possibilité de reconduire : « dans ma boîte, on a voté la nécessité d’une retraite à 60 ans et surtout 300€ d’augmentation pour tous les salariés ». Chez Total, c’est l’indexation des salaires sur l’inflation qui a été mise en avant : « nos collègues belges, qui bénéficient d’une indexation des salaires sur l’inflation, ont eu une augmentation de 12%, quand nous n’avons eu que 5% au prix d’une énorme grève. Il faut revendiquer l’indexation des salaires sur l’inflation » a expliqué un raffineur.

Alors que de nombreuses grèves éclatent sur la question des salaires, des participants ont cherché à donner des exemples de la façon dont les deux questions sont liées dans certaines grèves, comme celles des aiguilleurs du Bourget, en grève depuis trois mois. Un mouvement où les grévistes ont « gravé dans le marbre le lien entre les salaires, les conditions de travail et les retraites. Il faut combiner toutes les questions » a expliqué Anasse Kazib.

Au-delà de la question des salaires, c’est aussi la nécessité d’étendre les revendications à tous les travailleurs, y compris les sans-papiers qui a été posée : « les immigrés et sans-papiers vivent, travaillent et cotisent ici. Tous les sales travaux qui sont fait en France, ce sont les migrants qui les font. Le 7 aussi on sera dans la rue parce que quand tu n’as pas de papiers tu n’as pas de retraites. Il faut la régularisation de tous les sans-papiers » a asséné Mariama Sidibé, du collectif sans-papiers 75. Dans un contexte où le gouvernement a décidé de mettre en œuvre une nouvelle loi asile et immigration, la nécessité de faire front avec les plus précaires de tous les salariés s’est donc exprimée. Le réseau a appelé dans ce sens à participer aux manifestations du 4 mars et du 25 mars contre cette même loi.

Grève marchante, AG interpros : un réseau pour étendre la grève reconductible

Pour convaincre de ces revendications et de la grève reconductible, le réseau grève générale a tenté, là où il le pouvait, de mettre en place des « grèves marchantes », c’est-à-dire de faire rencontrer les secteurs les plus mobilisés avec les secteurs où la grève est plus difficile, afin de généraliser le mouvement. Ainsi, sur Roissy, des professeurs du Val d’Oise sont venus prêter main forte aux syndicalistes de la zone pour diffuser près de 12 000 tracts en trois jours aux salariés de l’aéroport. « On a fait un pari, parce qu’on appartient à un énorme groupe agroalimentaire : aller rencontrer tous les collègues des autres boites du groupe, et tenter de transmettre la tradition de lutte qu’on a chez nous dans ces entreprises où il n’y a ni grèves ni syndicats » explique de son côté Christian Porta, cégétiste à la boulangerie industrielle Neuhauser en Moselle. Dans le même sens, Jocelyne Clément, membre l’AG interprofessionnelle de lutte GIGM dans le 77, a insisté dans ce sens, en expliquant comment cette AG interpro était allée à la rencontre d’une AG de 400 salariés de Safran, ainsi que d’une AG des salariés de Transdev pour les convaincre de la grève reconductible. Pour l’instant, si le réseau en est encore à un stade de construction, il est voué, pour les participants, à s’élargir, pour toucher de nouveaux secteurs, de nouvelles régions, au travers d’un maillage local via les AG interprofessionnelles ou des AG locales du réseau, mais aussi pour commencer à coordonner, dès le 7, les différents secteurs qui partiront en grève reconductible.

C’est dans ce sens que Mathieu Relin, cheminot syndiqué à Sud Rail à Mulhouse, est intervenu : « si on fait un gros boulot et qu’on s’organise nationalement, on peut avoir un rôle de coordination de toutes ces initiatives sur le terrain. Cela pourra nous permettre d’être une voix pour proposer un plan B quand les directions syndicales nous diront de rentrer. Il faut qu’on puisse dire : on continue, c’est aux grévistes de voter la fin ou la continuité de la grève ». Une logique partagée par d’autres interventions : alors que l’incertitude règne encore sur la position de l’intersyndicale sur l’après 7 mars, de nombreux syndicalistes ont insisté sur la nécessité que les directions syndicales appellent clairement à la grève reconductible, mais aussi qu’elles intègrent dans leurs revendications la question des salaires, question beaucoup trop laissée de côté.

Finalement, le réseau s’est donné une feuille de route pour continuer de construire la reconductible d’ici le 7. Tout d’abord a été décidé le lancement d’une pétition pour interpeller l’intersyndicale sur le fait d’intégrer dans les revendications la question salariale, pour des augmentations de salaires et leur indexation sur l’inflation. Le lancement d’une campagne pour lier les retraites et les salaires à l’initiative du réseau a ainsi été actée, avec des affiches et des tracts. Ensuite, c’est la participation à la marche des solidarités, ce samedi 4 mars, qui a été actée par les participants franciliens de la réunion, ainsi que l’appel à la grève féministe du 8 mars partout dans le pays.


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Arthur Nicola

Journaliste pour Révolution Permanente.
Suivi des grèves, des luttes contre les licenciements et les plans sociaux et des occupations d’usine.
Twitter : @ArthurNicola_

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