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Jeunesse

Retraites. Le gouvernement veut faire payer la jeunesse : construire le tous ensemble contre Macron

En plein soulèvement populaire au Chili, avec une jeunesse à l'avant-garde pour se confronter à la répression, on peut entendre des slogans comme “Aguante los jóvenes, arriba los viejos” [« Résistez les jeunes, les vieux arrivent ! »]. Une vague de soulèvement de la jeunesse chilienne qui pourrait bien donner le ton à l’échelle internationale. En France, ils sont aussi mis au premier plan des attaques, le plan B de Macron sur la réforme des retraites, s’il était mis à exécution, attaquera en premier lieu la jeunesse.

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Crédits photos : AFP/OLIVIER LABAN-MATTEI

Le gouvernement mis à la défensive : un premier recul ?

Le traumatisme Gilets Jaunes. Près d’un an après l’irruption du mouvement des Gilets Jaunes sur le devant de la scène, le gouvernement n’en a pas fini, bien au contraire : « Mais après la crise des « gilets jaunes », le contexte reste tendu, dans les hôpitaux, les Ehpad, la fonction publique, la police ou encore chez les pompiers » avertit un édito du journal Le Monde sans distinguo entre force de police qui exerce une pression sur la droite de Macron et le mouvement social. Véritable traumatisme pour la bourgeoisie, comme le relate le journal l’Opinion : « Il ne faut pas minimiser le traumatisme réel et personnel pour le Président ; Macron a peur de la rue, confie un visiteur du soir. Souvenez-vous, c’est début décembre que les Gilets jaunes ont saccagé l’arc de Triomphe et que le chef de l’Etat a été contraint de lâcher ses mesures sur le pouvoir d’achat ».

En effet, avec la multiplication des foyers d’incendies qui éclatent çà et là, des urgentistes aux pompiers en passant par l’éducation nationale, l’effet Gilets Jaunes perdure et dans un contexte où le climat social reste hautement inflammable, la réforme des retraites pourrait bien jouer le rôle de catalyser – conscient des risques, le gouvernement s’évertue à ne rien renier de sa réforme sans provoquer un mouvement social d’ampleur.

C’est dans ce contexte général que le gouvernement a été pris à défaut par la journée du 13 septembre à la RATP, avec un taux exceptionnel de gréviste. Dans cette perspective, l’appel à la grève illimitée du 5 décembre contre la réforme des retraites fait office de détonateur potentiel ; l’appel a en effet été rejoint par Sud Rail et d’autres fédérations syndicales comme la CGT services publics, condamnant les « journées d’action isolées », stratégie perdante imposée par les directions syndicales ces dernières années.

Plus encore, ce mercredi, la CGT, FO, la FSU, Solidaires et des organisations de jeunesse se sont calés sur cette même date – sans toutefois mentionner l’appel à partir en illimité des travailleurs de la RATP – pour appeler à une journée de grève interprofessionnelle. Un appel dont l’importante limite est qu’il s’agit d’une journée de « grève carrée », sans que les directions syndicales ne proposent un plan de bataille qui aille au-delà, mais qui reste tout de même le fruit d’une importante pression à la base, d’une volonté d’en découdre face aux attaques du gouvernement.

Comme le résume Stéphane Dupont, éditorialiste aux Echos, le spectre de la grève générale plane et le gouvernement s’efforce de le conjurer, craignant un conflit social très dur : « Après le nouveau coup de semonce de la « grève sauvage » de ces derniers jours à la SNCF, l’exécutif se prépare à un conflit social très dur sur la réforme des retraites. Avec l’espoir de se mettre les Français de son côté. »

Le Plan B du gouvernement : miser sur l’apathie de la jeunesse pour la faire payer.

Mis à la défensive, le gouvernement cherche des pistes pour reculer sans céder sur son ambition réformatrice ; l’équation s’avère compliquée à résoudre : tout en envoyant un message de fermeté à sa base sociale, il s’agit d’éviter de cristalliser les mécontentements dans un mouvement d’ensemble autour de la date du 5. Comme le relate le journal l’Opinion, le risque est pressenti par le gouvernement : « Il y a un risque de convergence des mécontentements », estime un conseiller ministériel, qui craint de voir les enseignants et l’ensemble de la fonction publique entrer dans la danse. « On a déjà les urgentistes, les pompiers, qui sont mobilisés… Pas la peine d’en rajouter ».

Pour autant, cette réforme reste cruciale pour le gouvernement Macron. Outre qu’il s’agit d’une réforme structurelle clé pour le capitalisme français afin de rattraper son « retard » par rapport à ses homologues européens, avec l’ouverture du marché de la retraite par capitalisation pour les fonds de pension, l’enjeu est stratégique pour le gouvernement : en remportant cette bataille, ce serait une avancée décisive pour Macron au regard d’une réforme qui n’a jamais été menée jusqu’à présent. Autrement dit, «  la retraite, c’est le totem de la capacité réformatrice du Président », résume François Patriat, patron du groupe La République en marche au Sénat. Gilles Le Gendre, président du groupe LREM à l’Assemblée Nationale réaffirme la nécessité de cette réforme : « Notre électorat nous attend sur cette réforme. »

Casse-tête, donc, pour le gouvernement, contraint de céder dans un premier temps… pour mieux avancer.

Parmi les plans B proposés, certains commencent à se dessiner. Parmi ceux-ci, décaler la réforme après 2025. Problème : cette hypothèse reviendrait à renvoyer une certaine image de faiblesse du gouvernement. Difficile d’envisager une telle hypothèse dans un climat social aussi tendu ; comme le rapport un cadre du macronisme dans le journal l’Opinion : « Mais voter avant 2022 une réforme qui ne serait totalement mise en œuvre que quinze, vingt ou trente ans plus tard, « attesterait d’un manque de courage politique, ou à tout le moins d’une forme de lâcheté », met en garde un macroniste de la première heure. »

La seconde option, consisterait à jouer la division du mouvement social en faisant porter aux générations postérieures le poids de la réforme. Selon le journal l’Opinion, cette option semble d’ailleurs privilégiée tant pour des raisons économiques que politiques : « Un scénario préconisé dès le 29 août par François Ecalle, ancien magistrat de la Cour des comptes, fondateur du site fipeco.fr. « Pour qu’une réforme aussi importante et aussi complexe soit acceptée par une partie suffisante de la population, il faudrait appliquer les nouvelles règles de liquidation des pensions seulement à ceux qui entreront sur le marché du travail à partir de 2020 », écrit le haut fonctionnaire, démonstration à l’appui. »

Misant sur la relative apathie de la jeunesse, qui est restée globalement à l’écart de la radicalisation portée par les Gilets Jaunes, et espérant que la convergence entre la question des retraites et la jeunesse, qui s’est mobilisée autour des enjeux d’écologie, ne se fera pas ; le gouvernement cherche donc à faire payer ses réformes anti-sociales à la jeunesse pour mieux diviser et remporter la bataille de l’opinion. Comme le rapporte le journal RTL : « Tous ceux qui sont concernés sont ceux qui seront sur le marché du travail dans les années à venir et qui paieront les retraites de papy et mamy. Ils sont encore au lycée à cette heure, on aura donc du mal à trouver une Greta Thunberg des retraites pour mettre les jeunes à la rue. »

Faire mentir le gouvernement et construire le tous-ensemble

C’est cette même hypothèse qu’il faut démentir dans les faits, et construire le tous-ensemble qui fera de la date du 5 décembre le catalyseur d’un mouvement de luttes sociales portées la jeunesse et le mouvement ouvrier, non seulement pour notre futur, pour lutter contre les réformes anti-sociales du gouvernement, mais aussi contre la propagande pseudo-écologique du gouvernement qui cherche à faire payer la crise écologique aux classes populaires (on se souvient que les Gilets Jaunes avaient éclaté suite à l’instauration d’une taxe carbone). La jeunesse inquiète de son avenir, écologique et sociale, doit comprendre que dans le monde que réserve Macron à la jeunesse et aux classes populaires, fin du monde rime avec fin du mois. Et c’est dans l’optique de faire du 5 décembre une bataille victorieuse pour l’ensemble de notre camp social que la jeunesse doit construire ce tous-ensemble contre Macron et repousser sa tentative de faire payer la crise écologique, sociale et politique à la jeunesse, aux classes populaires et à l’ensemble du monde du travail.

A ce titre, le gouvernement pourrait bien être surpris par un réveil de la jeunesse. Après une semaine de mobilisation prônée par Extinction Rebellion au cœur de Paris, et malgré les limites stratégiques et programmatiques que nous avons discutées, cette jeunesse convaincue qu’il faut renverser le capitalisme, et qui s’est manifestée dans la rue par de grandes grèves sur le climat, est consciente que la crise écologique et sociale ne peut plus durer peut et doit ainsi trouver un allié dans la classe ouvrière : par sa capacité à paralyser l’économie, comme l’a illustrée la grève du 13 septembre, celle-ci est capable d’imposer un rapports de force et faire plier le gouvernement.

Mais la force qui peut être déployée par la classe ouvrière dans la grève, par ses secteurs les plus concentrés, notamment les transports, si elle est capable d’instaurer un rapport de forces décisif, ne peut espérer l’emporter seul. La jeunesse peut – et joue déjà dans de nombreux pays – un rôle d’étincelle et de caisse de résonance des contradictions et des luttes sociales. A l’international, la jeunesse est à l’avant-garde des soulèvements spontanés qui touchent le Chili, suite à l’augmentation du prix des tickets de métro ;des étudiants du secondaire y affrontant la répression et les tirs à balles réelles de la police et de l’armée au cours de véritables journées révolutionnaires ; et, parmi les slogans, on peut ainsi entendre “Aguante los jóvenes, arriba los viejos” [« Résistez les jeunes, les vieux arrivent ! »].

Aux jeunes, maintenant, de résister !


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