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Crise sanitaire

Seine-Saint-Denis. Les plus précaires privés de vaccin avec la complicité du préfet ?

Emmanuel Macron en avait fait le centre de sa communication : faire bénéficier à tous du vaccin lorsqu’il sera disponible. Force est de constater que derrière les discours, la stratégie est toute autre : les centres et les soignants de Seine-Saint-Denis qui ont cherché à rendre la vaccination la plus égalitaire possible se retrouvent menacés par le préfet.

Belkacem Bellaroussi

17 février 2021

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Crédit photo : AFP

Jusqu’à maintenant, cette crise sanitaire aura mis à nu les mécanismes les plus mortifères de notre système et son caractère profondément inégalitaire. Jusqu’aux vaccins qui, depuis qu’ils sont destinés au grand public, se voient administrés inégalement selon les populations.
Ainsi, la Seine-Saint-Denis, département métropolitain le plus touché par la pandémie, est aussi celui qui profite le moins du vaccin contre le Covid-19.

Face à une pénurie de vaccins dû à l’incapacité des entreprises pharmaceutiques de produire en masse et face aux difficultés logistiques liées à l’administration de la deuxième dose, les places pour se faire vacciner en centre de santé se vendent chères. C’est la logique du «  chacun pour soi » qui priment, et celle ci n’est pas à l’avantage des populations qui en ont le plus besoin. Conséquence : lorsque la vaccination contre le Covid-19 a été élargie aux plus de 75 ans, le 18 janvier, les centres de vaccination de Seine-Saint-Denis ont vu arriver un grand nombre de patients venus de Paris ou d’autres départements. Ces personnes, davantage connectées, ont fait le déplacement pour se faire vacciner en raison de l’absence de doses près de chez eux.

La faute au gouvernement, qui a décidé de faire reposer la prise de rendez-vous pour se faire vacciner sur des plate-formes numériques (type Doctolib, Keldoc, ...). Avec la volonté de faire gonfler les chiffres de personnes vaccinés rapidement, le gouvernement a donc voulu s’appuyer sur ces plate-formes faciles d’utilisation pour les habitués du numérique. Or l’un des problèmes, qui ne date pourtant pas d’hier, est bien l’inégalité de maîtrise et d’accès aux outils numériques dans la population française. En effet, 24% de la population française serait touchée par ce que l’on appelle « l’illectronisme », à savoir la maîtrise des outils numériques.

Ainsi, le personnel soignant a constaté que près des deux tiers des créneaux de vaccination mis en ligne sont réservés par des habitants qui n’habitent pas la Seine-Saint-Denis, mais bien plutôt de Paris ou des communes riches aux alentours.

Face à cette situation et cette campagne de vaccination à deux vitesses, des sites de vaccination se sont donc emparé du problème pour tenter de permettre à leur population de profiter de la campagne de vaccination en sanctuarisant un certain nombre de créneaux aux habitants du département. Une méthode qui n’est pas du goût du représentant de l’État dans le département. Vendredi 11 février, les collectivités de Seine-Saint-Denis recevaient donc un mail du Préfet de Seine-Saint-Denis, George-François Leclerc, les sommant de stopper leur tentative d’enrayer « l’effet Doctolib » pour faire vacciner les plus fragiles : « Je tirerai toutes les conséquences dans mes arbitrages ultérieurs, de l’absence de nouveaux rendez-vous. J’attache du prix à ce qu’ils soient ouverts sur Doctolib avant demain midi »

Ces collectivités se sont donc vu menacées de voir les arbitrages futures de la préfecture conditionnées par leur obéissance aux leitmotiv de l’État : faire surtout vacciner en utilisant les plate-formes numériques. Dans la communauté médicale de Seine-Saint-Denis, c’est la stupéfaction : « Ce mail est scandaleux et infantilisant, dénonce-t-elle. On se défonce sur le terrain pour faire marcher les choses et ne pas oublier les habitants vulnérables de nos territoires ? Et voilà comment la Préfecture nous remercie, en menaçant de nous voler des doses » relate Libération. Encore une preuve, s’il en fallait une, du mépris de l’État pour les soignants et les habitants des quartiers populaires.

Finalement, ce lundi, l’Agence Régionale de Santé ouvrira à Bobigny un centre de vaccination destiné aux habitants les plus fragiles de Seine-Saint-Denis pour équilibrer la position de l’État face à cette problématique. Un geste, mais loin d’être suffisant face à la situation urgente à laquelle dont face les populations les plus précaires du département, ni face à la menace que font peser les différents variants circulant dans la population, en particulier dans le département le plus pauvre de France.


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