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Un gouvernement faussement progressiste

Suppression du terme « race » de la Constitution : de la poudre aux yeux

L'Assemblée nationale est en pleine révision de la Constitution : l'occasion de se donner une image progressiste en supprimant le terme « race » ou en inscrivant l'interdiction de la « distinction de sexe ». Une manière de prétendre que le cœur de la lutte contre l'oppression se situerait dans des mots ou des textes de lois, tout en perpétuant par ailleurs le système qui rend possible ces oppressions.

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Depuis le 10 juillet, l’Assemblée nationale s’est attelée au projet de loi constitutionnelle, qui entend réviser la Constitution. C’est dans ce cadre que les députés présents, au nombre de 119, ont voté à l’unanimité pour la suppression du terme « race » de la Constitution. L’article 1 mentionnait que la France « assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion ». Ce passage est remplacé par « sans distinction de sexe, d’origine ou de religion ».

Les députés – de tous bords politiques – qui défendaient cet amendement le présentent comme un grand progrès. C’est ce qu’exprime Yaël Braun-Pivet, députée La République En Marche (LREM) : « Il faut moderniser notre Constitution. Tout le monde est d’accord pour dire que le mot "race" n’a aucune consistance et qu’il ne recouvre aucune réalité. Il est temps de mettre notre Constitution en conformité avec cette réalité ».

Tout d’abord, il faut souligner l’hypocrisie d’une telle démarche de la part de personnalités politiques intégrées au système de gouvernement. En effet, ce sont ces mêmes partis de gouvernement – LREM, le PS, les Républicains – qui organisent et perpétuent un racisme systémique : lois islamophobes, violences policières dans les banlieues, discours visant à accuser les immigrés et réfugiés de tous les maux, perpétuation d’un système où les critères raciaux sont le vecteur d’une oppression et d’une exploitation plus grande des personnes racisées.

Si les députés cherchent ainsi à se racheter une image progressiste en supprimant le terme « race » de la Constitution, on peut être sûr que ce seront les mêmes qui, demain, continueront à mettre en place des lois et à tenir des discours racistes. À l’image de Manuel Valls, connu pour ses sorties telles que « Les Roms ont vocation à revenir en Roumanie ou en Bulgarie » ou sa fronde anti-voile, son soutien aux arrêtés anti-burkini, sa défense de la déchéance de nationalité, etc. qui twitte sa « fierté » de voter cet amendement, « consécration » de son « combat contre le racisme et l’antisémitisme »...

En parallèle, les députés inscrivaient l’interdiction de la « distinction de sexe » dans la Constitution. Mais cela répond à la même logique : se donner une image progressiste, tandis que subsiste le patriarcat, ses bases économiques et ses multiples manifestations. L’Assemblée a par ailleurs rejeté l’inscription du droit à la contraception et à l’IVG dans la Constitution, sous prétexte que ces droits seraient assurés en France aujourd’hui. Cela leur permet de faire abstraction des difficultés qui pèsent sur les femmes, surtout les plus précaires, à accéder à la contraception et à l’avortement.

Ensuite, l’affirmation de la députée LREM comme quoi « le mot ’’race’’ ne recouvre aucune réalité » est fausse. La « race » n’est certes pas une réalité biologique. Cependant, elle est une réalité sociale. Plus précisément, le racisme est une réalité systémique, un mécanisme d’oppression, qui place les personnes racisées dans une positions subalterne justifiant un ensemble de discriminations et de violences, à l’image des exemples cités précédemment. Cela se matérialise dans une position où les personnes racisées sont bien d’avantage victimes de violences et crimes policiers, ont plus de difficultés à trouver un appartement, un travail, sont sous-payées, sur-exploitées, etc.

Effacer le mot « race » de la Constitution ne permettra pas d’effacer cette réalité, bien au contraire. L’affirmation de l’existence de la discrimination raciale peut être un outil pour protéger les victimes de racisme ; et pour reconnaître l’existence d’une oppression, il faut la nommer, en identifier les contours et les racines. Mais nous ne pensons pas que l’existence du racisme ou sa disparition tiennent dans des mots ni dans une constitution. De la même manière, l’inscription de l’interdiction de la « distinction de sexe » n’est que de la poudre aux yeux. Pour éradiquer des oppressions systémiques, il faut un changement systémique.


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