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Imperialisme

Total et les plateforme offshore, le prolongement de la domination française dans les océans

Les plateformes offshore qui ont connu un saut dans leur utilisation depuis les années 2000 et les évolutions du forage sous-marin deviennent un enjeu central pour le géant Total, leur sécurité et leur développement un enjeu pour l'ensemble de l'Etat français qui répond toujours présent pour préserver les profits de celui-ci.

Asha Aless

13 janvier 2021

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Depuis que Total a pris la forme qu’on lui connaît en 2003, en s’imposant comme la quatrième firme pétrolière mondiale et la plus grande entreprise française, la lune de miel entre l’État français, avec son appareil militaro-politique, et Total ne s’arrête plus.

Un réseau tentaculaire

Les plateformes offshore représentent plus de 30 % de la production mondiale de pétrole en 2010 avec les 17 000 plateformes en mer mise en place à travers le globe, notamment en Mer du Nord, dans le golfe du Mexique, tout autour de la péninsule arabique et au large des côtes africaines. Ces plateformes de différents types en fonction des profondeurs de la zone de forage peuvent aller jusqu’à 3000 mètres de profondeur pour le "offshore profond" qui se fait sur des énormes unités de production maritime avec des unités de forages sous-marines et un transport des hydrocarbures par des pétroliers qui vont chercher le pétrole et le gaz directement en mer. Ces méthodes de productions plus coûteuse que le forage classique subit un saut dans les investissements de la part des grandes firmes pétrolières si bien que Total le place comme "l’avenir des énergies" notamment par le nombre de zones pétrolifères dans les océans mondiaux, mais aussi la facilité des accords administratifs et industriels avec les autorités nationales pour ce type d’exploitation par rapport aux champs de pétrole. 

Total veut apparaître comme le leader sur le marché des énergies offshore et a donc décidé d’augmenter l’ensemble de ses investissements vers ce modèle de production où il représente déjà 15% de la production mondiale dans le "offshore profond", cette activité représente par ailleurs 44% de sa production. L’enjeu pour Total est de découvrir de nouveaux "blocs" c’est-à-dire de nouvelles zones de forage sous-marin qui lui seraient accessibles, ce qui représente aujourd’hui 70% de ses "enjeux d’exploration" bien devant le pétrole terrestre qui est trop prisé et sous hégémonie des firmes anglo-saxonnes. Pour cela, il investit énormément de ses profits en recherche et développement du forage maritime et en installation et développement de ses plateformes. Total qui vise à détrôner les géants anglo-saxons Shell (Pays-Bas et Grande-Bretagne), BP(Grande-Bretagne) et Exxon (Etats-Unis) qui font chacun presque le double des profits de Total qui cherche alors à être le premier producteur mondial sur ce type de forage en investissant bien plus que ses concurrents.

Le réseau offshore de Total est tentaculaire, ayant des unités de production sur l’ensemble des mers et océans du monde, mais notamment sur le continent africain. Que ce soient les plateformes offshore classiques à l’Est ou le développement rapide des plateformes en eaux profondes à l’Ouest du continent qui représente plus de 50 % du forage maritime. En effet pour exemple la plateforme "Kaombo Norte" au large de l’Angola inauguré en 2019 extrait 230 000 barils par jour, soit 13.5 % de la demande nationale française ; dans la même zone maritime, on y trouve 5 plateformes forant à plus de 1000 mètres de fond qui appartiennent à Total.

Total n’est pas écologiste, mais écocide

Total qui a annoncé la conversion du site de Grandpuits derrière un emballage écolo n’a en vérité que faire de la transition écologique et se moque de la crise climatique où ils sont dans les principaux responsables. Leur volonté de développer leur forage maritime en est une illustration. En effet les plateformes offshores sont bien plus polluantes que le forage classique, même si ces chiffres sont bien sûr cachés par les grandes firmes pétrolières. L’énergie nécessaire pour aller forer à 3000 mètres de fond, la production de plateformes longues comme 3 stades de football et l’acheminement des hydrocarbures sur les côtes par des pétroliers pour sa transformation ne sonne pas très écologique. 

De plus, les recherches d’hydrocarbure au large des océans et l’installation des outils de forage sous-marins détruisent l’écosystème maritime jusqu’au risque de défaillance dans la sécurité du site qui peut emmener à des catastrophes pour l’ensemble de la biodiversité de la région tel que les nombreuses marées noires provoquées par les plateformes offshore dans la mer du Nord et dans le Golfe du Mexique, condamnant les écosystèmes et les populations locales à une pollution constante des eaux et des sols. Car en effet l’ensemble de la biodiversité est attaqué à chaque développement de ces zones de production maritime pétrolière. Et Total ira jusqu’a annoncer que la Fondation Total soutient « la santé et la biodiversité marines » alors qu’au contraire elle en est un de ses plus grands fossoyeurs à l’échelle mondiale.

Les plateformes offshore sont le prolongement de la Françafrique dans les océans

La Compagnie française des pétroles qui va fusionner avec Elf Aquitaine et Petrofina pour former le conglomérat Total a une longue histoire coloniale et néocoloniale avec le continent africain par ses nombreux trafics d’influences, de manipulation et de corruption avec les Etats africains. Total a profité de la domination politique, financière, monétaire et économique de la France sur le continent africain pour développer son activité dans les zones maritimes. Disposant de l’immense majorité des réserves au large du Mozambique, de l’Angola, de la Corne de l’Afrique et de la République démocratique du Congo, avec un monopole de la production d’hydrocarbure sur le continent notamment par la transformation de la ressource brute. 

Les plateformes offshore ne peuvent pas se faire sans l’autorisation et la participation des États souverains sur les zones maritimes. En effet chaque partie de mer appartient à un État et l’extraction de ressources d’hydrocarbure doit faire preuve de l’accord de celui-ci. Les agences pétrolières nationales ou semi-nationales perçoivent alors une part du bénéfice de la production. Cependant ces gains ne vont jamais à la population mais aux élites nationales et de la firme transnationale. Comme c’est le cas pour l’Angola où Sonangol qui représente 40 % du PIB national et 95 % des exportations du pays baigne depuis des décennies dans des affaires de corruption main dans la main avec Total. En effet 70 % du "profit oil" c’est-à-dire du profit sur un baril de pétrole après soustraction des coûts de production est reversé à l’agence nationale ce qui correspond en fonction de l’évolution du prix du pétrole à 10 $ par baril. Sur le site de "Kaombo Norte" qui produit 230 000 barils par jour cela correspondrait à plus de 2 millions de dollars par jour pour une seule plateforme offshore. Avec les 5 plateformes au large de l’Angola, on imagine bien les milliards que cela représente par an pourtant. La pauvreté n’a pas reculé en Angola et un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté mondiale avec moins de 3 $ par jour. Car les gouvernements sont soumis aux firmes transnationales comme Total et la corruption de ceux-ci pousse à ne jamais attaquer les géants impérialistes, ni mener aucune politique qui serait en contradiction avec les profits de Total.

« Représentant du pays à lui-même »

Total, première entreprise française, fonctionne main dans la main avec les gouvernements successifs pour décrocher des contrats dans le monde, protéger ses investissements nationaux et à l’étranger mais aussi influencer voire créer des politiques publiques par elle même. L’ensemble de la classe dominante est derrière le champion national qui a un statut de monopole du pétrole à l’échelle nationale et profite de tous les assouplissements du code de travail, des politiques anti-écologiques des gouvernements et des politiques de soutien financier aux grandes entreprises. Si bien que les intérêts de Total et les intérêts français se confondent sur certains points, que ce soit sur la question du maintien de la françafrique, de l’ouverture aux capitaux étrangers en Iran et l’ensemble de la politique énergétique et écologique nationale parfois dictée par le géant lui-même. Le PDG de Total M. Pouyanné décrit lui-même : "Même si Total est une société privée, c’est la plus grande entreprise française, et elle représente d’une certaine manière le pays lui-même".

L’ensemble de l’appareil politique se met derrière Total, mais aussi l’ensemble de l’appareil militaire français. Les interventions maritimes militaires au large des côtes africaines se font notamment dans les zones avec les plateformes offshores de Total comme l’opération "Jeanne d’Arc" lancé en 2012 qui permet un déploiement de la marine française d’une zone allant des côtes de l’Angola aux côtes brésiliennes. De plus, les bases maritimes de Mayotte au large des côtes d’Afrique de l’Est ainsi que celle de la Réunion permettent à la France de protéger les intérêts de son champion sur l’ensemble du territoire maritime africain pour évacuer les différentes plateformes pétrolières ou intervenir militairement à la moindre menace de piraterie. Bien sûr ces opérations maritimes ne sont pas déliées des opérations au sol sur les différents théâtres de déploiement français comme c’était le cas pour l’Afghanistan où la France cherche à placer Total dans la liste des propriétaires des hydrocarbure du sol afghan, projet volé en éclats par la défaite étasunienne qui n’a pas réussi à imposer un Etat stable soumis aux intérêts transatlantiques.

L’appareil militaro-politique français et les grandes firmes internationales comme Total sont les deux faces d’une même pièce, celle de l’impérialisme français utilisant l’ensemble des positions internationales de la France ainsi que l’appareil militaire français qui se place à la 7ème place mondiale selon le GlobalFirePower avec son budget de 37.5 milliards d’euros pour préserver et augmenter des grands groupes hexagonaux. Total quant à lui maintient la domination de la France par son statut de monopole sur une grande partie du monde et permet de ravitailler en pétrole l’ensemble de l’appareil productif national. Quand le PDG de Total indique qu’elle représente d’une certaine manière le pays lui-même c’est qu’elle représente avant tout les intérêts du patronat français aux travers le monde, des intérêts basé sur l’exploitation toujours plus violente et écocide de la nature mais aussi sur la domination de dizaines de pays et des millions d’humains pour ses profits et sa place sur l’échiquier international. À l’heure où Total attaque ses propres travailleurs comme on peut le voir à Grandpuits, il ne faut pas oublier de quoi Total est le nom, celui de l’impérialisme français destructeur écologique et social.


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