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« J’appelle les travailleurs à se sentir concernés et à se révolter ! » Thou, salarié à Latécoère

Toulouse. Un grand rassemblement devant l’usine Latécoère et un appel à ne pas reprendre le travail !

Ce mercredi 21 septembre, et sous le soleil cette fois-ci, environ 250 personnes se sont réunies devant le site Latécoère de la rue Périole à Toulouse, dont environ 200 salariés de l'usine, ainsi que des collègues du site de Gimont (Gers). La presse était également présente, ainsi que de nombreux soutiens extérieurs qui ont témoigné de leur solidarité, comme une représentante de l’UD CGT 31, des travailleuses du CHU de Toulouse, des travailleurs d’Airbus, mais aussi des jeunes et des étudiants, preuve que la situation à Latécoère est l’affaire de tous. Une seconde action réussie après le rassemblement de la semaine dernière auquel Révolution Permanente avait déjà répondu présent. Nous avons souhaité donner la parole aux salariés pour qu’ils s’expriment sur la journée d’aujourd’hui, et sur les suites qu’ils envisagent. Propos recueillis et mis en forme par Marina Garrisi

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Tout le monde tire un bilan positif de la journée, qui aura permis de visibiliser la situation chez Latécoère, de créer des liens avec d’autres secteurs, mais aussi d’échanger dans la bonne humeur, dans un moment où la pression se fait toujours plus sentir à l’approche de la fin des négociations. L’objectif principal que se fixent les travailleurs pour la suite, c’est de grossir les rangs des collègues mobilisés. « On était un peu plus nombreux que la semaine dernière, nous livre Denis, travailleur à Latécoère et syndiqué CGT, maintenant on invite tous nos collègues à sortir avec nous. Peut être qu’aujourd’hui vous n’êtes pas directement touchés par le plan social, mais en vérité, demain Latécoère subira un deuxième PSE, puis un troisième, et ce jusqu’à ce qu’ils nous auront complètement saignés ! ». Julien, ajusteur-monteur depuis plus de 15 ans dans l’entreprise, a trouvé la journée très intéressante, même si lui aussi aimerait voir plus de monde. « Il [n’est] pas évident aujourd’hui de faire bouger les gens, alors qu’on est tous concernés, on a du mal à trouver les moyens de mobiliser ». Le poste de Julien, comme tous les postes d’ajusteur-monteur de l’usine, est directement concerné par les suppressions de poste. « C’est maintenant qu’il faut se battre, après il sera trop tard… Je sais pas si on va pouvoir gagner, mais une chose est [certaine], si on ne fait rien, on est sûrs de perdre ! ». Thou appelle ses collègues à se sentir « tous concernés par ce qui se passe à Latécoère, car Latécoère, c’est chez nous ! Quand on a fait parfois jusqu’à plus de 35 ans dans cette boîte, et qu’aujourd’hui on se fait jeter dehors comme ça, on a le devoir de dire quelque chose. On pourra être fiers de s’être battus et d’avoir été présents. J’appelle les travailleurs à se révolter ! ».
Brigitte, employée à Latécoère depuis plus de 10 ans et adhérente CGT, formule le même objectif : « les syndicats essaient de mener des actions pour répondre aux besoins des salariés, [à] l’angoisse qui se vit en ce moment dans les ateliers, dans les bureaux, mais on n’arrive pas encore à faire sortir tous ceux qui disent soutenir ce mouvement, et c’est ça notre principale limite ».

En effet, chez Latécoère, la « paix sociale » s’est imposée depuis les années 70, le discours des figures des syndicats majoritaires à l’époque n’invitant pas à la combativité, et cette absence de réflexe collectif pèse beaucoup. Pour autant rien n’est perdu d’avance, puisqu’en décembre dernier le site de Périole s’était mis en grève, une première depuis près de 40 ans ! « C’est dur de se battre contre la finance, mais petit à petit les choses peuvent changer. On a besoin d’une solidarité d’un coup, de frapper tous ensemble, c’est comme ça qu’on sera bien plus forts. Aujourd’hui, les gens ont peur et en deviennent convaincus que c’est en tirant la couverture à soi qu’ils vont s’en sortir. Et ça, ça n’est pas qu’à Latécoère, c’est dans la société en général. On oublie que la solution pour les travailleurs passe par l’organisation collective ! ».

Tous ont conscience que leur meilleure arme pour gagner est l’unité, dans un contexte où, à ce jour, trop peu de syndiqués CGC et FO rejoignent la mobilisation. L’appel à ne pas reprendre le travail lancé par Thou, travailleur non syndiqué, s’est suivi d’un rapide vote à main levée, et c’est un premier pas pour construire un rapport de force supérieur. Un second pas pourrait être l’organisation d’une assemblée entre les travailleurs de Latécoère (syndiqués ou non syndiqués, et peu importe le syndicat) avec un temps suffisant de discussion, non seulement pour voter la poursuite de la grève, mais également pour réfléchir tous ensemble à un véritable plan de bataille afin d’étendre la mobilisation (liste de revendications, comment convaincre les collègues en interne, faire connaître la lutte en externe, organiser la convergence avec d’autres secteurs en lutte…). C’est en se sentant véritablement acteurs de la mobilisation que les travailleurs pourront s’impliquer davantage dans le conflit. Et que la crainte de la récupération syndicale, ressentie par une partie des travailleurs en interne, pourra être dépassée.

Enfin, la présence de soutiens extérieurs aura donné confiance aux travailleurs. « Pour moi cette journée est une réussite, nous livre Jean-Paul, et je voudrais remercier les soutiens extérieurs. On a besoin de s’unir tous ensemble si on veut réussir à faire bouger les choses. Nous on compte beaucoup sur la jeunesse pour venir nous soutenir. Plutôt que de se réunir chacun de son côté, on a besoin de réunir les concernés, et les futurs concernés par les suppressions de poste, et de se mobiliser ensemble. C’était comme ça en mai 68 ! »

En attendant, les travailleurs nous donnent rendez-vous le lendemain, puisque ce jeudi 22 septembre, Philippe Poutou, militant du Nouveau Parti Anticapitaliste et candidat aux prochaines présidentielles viendra à l’usine témoigner de son soutien envers les salariés. « Je le remercie de venir nous soutenir, et j’espère qu’il y aura beaucoup de monde de l’intérieur pour l’accueillir. Je serai là dès 7 h du matin pour convaincre tous mes collègues de se mobiliser aujourd’hui, on a besoin de médiatiser ce qu’il se passe chez nous et Philippe Poutou peut nous y aider ! » affirme Christophe, salarié à Latécoère et militant CGT.


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