Ce jeudi 6 octobre, l’animatrice Karine Le Marchand présentait un documentaire intitulé « Trans, uniques en leur genre », traitant de la transidentité au travers de témoignages de trois personnes trans. Le documentaire en lui-même a été fortement critiqué pour sa tendance au voyeurisme et au misérabilisme : des scènes d’agressions vécues par les intervenant•e•s y étaient par exemple reconstituées inutilement, les « anciens prénoms » de deux intervenantes ont été répétés à de multiples reprises...
Mais alors que le documentaire a eu au moins le mérite de laisser des personnes trans s’exprimer, permettant éventuellement de sensibiliser l’audience aux obstacles et aux violences auxquelles elles doivent faire face, le pire est arrivé en deuxième partie de soirée.
Le documentaire a en effet été suivi d’un débat intitulé « enfant transgenre : que faire ? », animé encore une fois par Karine Le Marchand dans lequel on retrouve un jeune homme trans ayant participé au documentaire, un psychiatre face à... Solange, une mère faisant partie de l’association Ypomoni qui défend les thérapies de conversion sur les jeunes trans. Celle-ci est présentée comme « [refusant] d’accompagner son enfant avant qu’il n’entame une analyse psy de plusieurs années », et Blandine une femme présentée comme « résolument féministe » et « opposée à la notion même de choix du genre ». Autrement dit des militantes transphobes, qui s’opposent ouvertement aux droits des personnes trans.
Si l’association de parents transphobes Ypomoni a déjà cherché sans succès à faire retirer la notion d’identité de genre du texte interdisant les thérapies de conversion, sans succès ; cela ne l’empêche pas de faire la promotion de ces pratiques sur M6, à une heure de grande écoute !
Ce qu’on appelle « thérapies de conversion » sont toutes les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre des personnes LGBTI. Le consensus scientifique sur la question est que ces thérapies sont non seulement inefficaces mais également profondément traumatisantes pour les personnes qui en sont victimes. Actuellement selon le collectif Rien À Guérir environ 15% des personnes trans se seraient « vu proposer » une thérapie de conversion au cours de leur vie, avec un impact très néfaste en matière de santé mentale.
La diffusion de ce genre d’émissions ne fait que renforcer les préjugés transphobes, rendant la vie plus difficile pour toutes les personnes trans. Les activités d’Ypomoni en particulier encouragent clairement des formes de violences intra-familiales qui poussent chaque année des centaines de jeunes trans ou LGBTI dans la rue, la prostitution ou le suicide.
L’émission a d’ailleurs fait l’objet d’un communiqué de dénonciation de la part d’associations trans et féministes. Acceptess-T, qui avait participé à l’émission en espérant pouvoir se faire entendre du public, a également condamné le programme.
[Communiqué]
M6 : La vie des personnes trans n'est pas un divertissement !
1/6 pic.twitter.com/vbkeztCiYk— Fransgenre (@Fransgenre) October 5, 2022
Ce programme démontre de quel côté se situent les géants de l’audiovisuel français. M6 est prête à diffuser un documentaire voyeuriste et un débat orienté de façon à présenter les jeunes trans comme un problème, avec toutes les conséquences auxquelles devront faire face les personnes trans et LGBTI. Le traitement médiatique de ces questions donne de fait la parole aux acteurs des offensives les plus réactionnaires.
Contre ces discours qui sont la face émergée d’une véritable offensive réactionnaire, réaffirmons plus que jamais le droit des personnes transgenre à disposer de son corps, la dépsychiatrisation, la gratuité et la liberté d’accès aux soins médicaux nécessaires aux parcours de transition.
